Une caricature d’Emmanuel Macron publiée vendredi par Les Républicains sur Twitter a suscité l’émoi avant d’être retirée par le parti, En Marche! dénonçant de son côté un visuel «puisant dans l’imaginaire antisémite».

Un petit tour et puis s’en va. Publiée hier sur le compte twitter des Républicains, une caricature d’Emmanuel Macron, reprenant à peu près tous les codes des dessins antisémites des années 30, a finalement été supprimée.

Costume noir et haut de forme, coupe-cigare en forme de faucille communiste, oeil tombant, sans oublier le nez crochu… Un classique du genre de la propagande antisémite. Le candidat ainsi représenté est entouré de ses soutiens. On retrouve ainsi, pêle-mêle, Gérard Collomb, Jacques Attali, Robert Hue, Bertrand Delanoe ou encore François Bayrou. Et ce sous titre, teinté de complotisme, comme on en fait en ce moment chez Les Républicains : «La vérité sur la galaxie Macron». Une vérité ? Laquelle ?

Rien de bien méchant, selon la direction du parti, qui, dans un communiqué, a expliqué avoir retiré l’image pour éviter des «polémiques inutiles». On a connu mieux, question mea culpa.

«Conscient que la caricature d’Emmanuel Macron que le compte Twitter des Républicains avait diffusée et retirée sur les réseaux sociaux a pu être mal interprétée, je tiens, au nom de tous les Républicains, à présenter mes excuses à ceux qui ont pu être blessés ou choqués», a déclaré le secrétaire général du parti LR Bernard Accoyer.

La caricature «a pu être mal interprétée», assure-t-on. Il s’agirait en fait simplement d’une référence au monde de la banque, avec le haut de forme et le cigare, et au communisme, avec la faucille. Pour le nez crochu, cependant, on n’aura pas d’explication.

Le mythe du complot juif
Que ce tableau voué à dépeindre un candidat qui engrange les soutiens à gauche comme à droite convoque et véhicule la figure du juif interroge. Celui-ci, étant accusé, dans le mythe du complot juif, d’avoir orchestré à la fois le communisme et le capitalisme. Le point commun entre les deux : le mondialisme, que les juifs, apatrides, errants, voudraient instaurer, pour signer la fin des nations. Cette théorie a été largement popularisée par un faux document publié au début du XXe siècle, les Protocoles des Sages de Sion, prétendant représenter un plan de conquête du monde par les juifs.

Ainsi s’est développée l’imaginaire du juif, une faucille à la main, puis celle du banquier. Et ça tombe bien, Emmanuel Macron travaillait à la banque Rothschild, établissement qui a souvent été au coeur de la rhétorique antisémite, ses thuriféraires l’accusant d’avoir alimenté les conflits entre les nations.

Ceux qui ont publié cette caricature pouvaient-ils réellement ignorer ces codes de historiques de l’antisémitisme ? Selon l’historien Nicolas Lebourg, interrogé par le Monde, «il faut avoir une certaine culture de l’image pour connaître ces références.»

Qu’il s’agisse ou non d’un manque de culture de l’équipe chargée de l’infographie pour le compte d’un parti de la droite républicaine, une chose est sûre: ce cliché du nez crochu véhicule un imaginaire antisémite puissant. Comme les réactions outragées de la fachosphère, criant à la censure et dénonçant un «grand orchestre socialo-sioniste», le démontrent d’ailleurs.

Pour sa défense, la direction des Républicains a également ressorti un dessin de Plantu, qui dépeint lui ainsi Emmanuel Macron en banquier et cité l’auteur du dessin, «Xav». Une façon de détourner le débat sur le terrain de la liberté d’expression ? Ce dernier a en fait publié son dessin la semaine dernière, au moment du ralliement de l’ancien communiste Patrick Braouezec auprès d’Emmanuel Macron – d’où la faucille. Il n’est pas question ici d’accessoires, mais bien d’une caricature d’Emmanuel Macron à fort relents antisémites que le parti de son principal concurrent a, publiée.Avant de devoir la remplacer par une photo d’Emmanuel Macron, face au tollé.

Charlotte Belaich – Source Libération