VÉRITÉ, CONFIANCE ET FIDÉLITÉ [Texte intĂ©gral] par Rony Akrich

Ils jouissent de notre confiance et veulent signifier la vĂ©ritĂ©, ils sont nos guides et nos pĂšres spirituels. Malheureusement, en perdant notre innocence, nous dĂ©couvrons avec tristesse ceux que nous Ă©voquions comme des parangons de vertu et de grandeur, ĂȘtre en fait des impies fallacieux. Ce sentiment de trahison entraĂźne trop de personnes Ă  la dĂ©rive de la foi. À bien des Ă©gards, ce phĂ©nomĂšne sociĂ©tal et cultuel brosse, sans faux semblant, un tableau bien sombre pour la communautĂ© religieuse.

Ces soi-disant bergers portaient tous nos espoirs et ils nous ont trahis.

NĂ©anmoins, disons-le, l’écrasante majoritĂ© des rabbins, des enseignants et des mentors spirituels effectuent leurs devoirs avec intĂ©gritĂ© et abnĂ©gation.

Évitons les amalgames afin de ne pas tomber dans l’excùs! Nous ne devons jamais faire cette erreur fatale qui consiste à condamner l’ensemble pour les fautes de quelques-uns.

Beaucoup de gens ont perdu la foi en ces pĂątres censĂ©s inspirer nos convictions et il existe un nombre de raisons suffisamment objectives pour cela: nous les voyons trop souvent sombrer dans des scandales sexuels, la maltraitance d’enfants, les intrigues politiques, la corruption, la fraude et la dissimulation. Tout cela n’a certes guĂšre servi la cause du Projet divin proposĂ© dans le texte biblique, beaucoup sont devenus mĂ©crĂ©ants et ont liquĂ©fiĂ© leur fidĂ©litĂ©, non seulement envers ceux censĂ©s transmettre les Principes toraniques, mais, dans une certaine mesure aussi, Ă  la bontĂ© et Ă  la morale de nos textes eux-mĂȘmes. Une telle conduite, de tels comportements profanent littĂ©ralement le Nom divin et Sa gloire, ils souillent le devenir essentiel de la CrĂ©ation en le vidant de tout sens et de toute profondeur, une dĂ©finition Ă  la lettre de l’HĂ©breu: « h’iloul Hashem ». Une rĂ©sonance toute creuse pour le Projet de Dieu. Ils l’ont assassinĂ©e en tuant dans l’Ɠuf l’idĂ©e mĂȘme du devenir de l’Homme, d’IsraĂ«l et de l’HumanitĂ©.

Nous Ă©tions, nous dit-on, au temps des gĂ©ants sĂ©culiers ou religieux. Si les causes, les raisons, les sensibilitĂ©s Ă©taient justes, les solutions furent fĂ©lonnes et malveillantes, les consĂ©quences, elles, furent insupportables pour le peuple laborieux. Jour aprĂšs jour, de nouvelles affaires tiennent le haut du pavĂ©, les gĂ©ants sont devenus tragiques car passĂ©s de la grandeur Ă  la dĂ©cadence. Tous les horizons de nos existences s’obscurcissent, ces gens que nous admirions nous ont déçus par leurs Ă©checs et leurs faiblesses, nous sommes une gĂ©nĂ©ration dĂ©sabusĂ©e, impertinente et malheureusement ce phĂ©nomĂšne touche tout autant le monde dit ‘religieux’ que non religieux.

À certains Ă©gards, cette impudence, comme l’abandon de la foi, peut ĂȘtre le signe obvie d’un drame plus intense que la trĂšs rĂ©elle souffrance Ă©prouvĂ©e par les victimes innocentes de conduites et comportements scĂ©lĂ©rats (douleur que je ne veux en aucune façon minorer). La tragĂ©die de corruption prĂ©sume que tout soit souillĂ©, rien n’est vraiment totalement bon, personne n’est rĂ©ellement sincĂšre, tous et chaque-un sont avides de profits, d’intĂ©rĂȘts que ce soit pour le corps, pour l’esprit ou Ă  l’égard de tout autre. Tout est mythifiĂ©, magnifiĂ©, la religion ressemble Ă  un marchĂ© de camelots, nul ne sait ni ne peut savoir, au milieu des nouveaux hĂąbleurs et frimeurs de la confession juive, quel est le message, le Projet du Dieu crĂ©ateur d’un tout ‘un’.

Pourquoi vouloir Ă  tout prix prĂ©tendre Ă  un au-delĂ , une espĂšce d’ailleurs oĂč tout serait magiquement parfait et harmonieux?
Pourquoi vouloir faire de ce monde, de notre prĂ©sent, une chose insignifiante pour laquelle mĂȘme Dieu n’aurait rĂ©ellement que peu d’attention?
Pourquoi vouloir rĂ©duire le Livre des Livres Ă  un simple et banal codex de lois concernant l’individu et seulement lui, vouloir oublier la DĂ©claration divine Ă  Avraham l’HĂ©breu et concernant, certes, IsraĂ«l mais, Ă  travers lui, l’ensemble de l’HumanitĂ© ?
Pourquoi avoir corrompu l’IdĂ©al toranique du tout et de tous et l’avoir confinĂ© au seul culte religieux de l’individu, cellule Ă©parse, isolĂ©e et inutile au devenir de l’ensemble si elle reste sans conscience de ce tout?

Il y a lĂ  complot et refus catĂ©gorique de mĂȘler Dieu Ă  l’Histoire et au Monde, ils condamnent toutes aspirations spirituelles aux connaissances plurielles et dĂ©truisent l’espĂ©rance d’un devenir. Ils gĂ©nĂšrent la passivitĂ© et le ressentiment, finalement leur tout devient une prophĂ©tie auto-rĂ©alisatrice de dĂ©faitisme et de dĂ©sespoir quant Ă  leur prĂ©sent soi-disant absent.
A ce moment de notre réquisitoire nous devons faire le point et formuler quelques principes de base.
PremiĂšrement, ne condamnons pas la Torah, c’est une Ă©norme erreur que de juger le JudaĂŻsme sur le comportement des Juifs. La Torah transcende toute personne ou toute institution: le fait de ne pas toujours vivre au diapason de ses idĂ©aux ne peut venir remettre en cause l’essence mĂȘme de ces idĂ©aux.

DeuxiĂšmement, nous vivons dans un monde imparfait, les individus ne sont pas tous justes et droits, ils ne sont pas tous des gredins et des salauds, les masses reflĂštent un Ă©ventail infini de gris. Si, Ă  tout instant, chacun de nous peut Ă©chouer, fauter, se tromper, rien ne nous permet d’exclure la possibilitĂ© et le principe de nos capacitĂ©s Ă  faire le bien Ă  part entiĂšre. En effet, le bien que nous faisons ne peut en aucun cas ĂȘtre confisquĂ© par le mal que nous entretenons.
En consĂ©quence, nous devons Ă©viter l’arrogance de tous ceux qui, assujettis au conformisme de leur pauvre existence, prononcent continuellement d’un air bĂ©at des sentences critiques sur les dĂ©ficiences et les revers d’autrui. Et qu’à Dieu ne plaise, ils s’épanchent joyeusement et se rĂ©jouissent de l’échec comme du faux pas de chaque-un, un genre d’attitude et de comportement frĂ©nĂ©tiques dĂ©couverts et retrouvĂ©s sur la toile des rĂ©seaux sociaux.

Diaboliser, accuser, salir, est devenu le sport favori d’un grand nombre de nos sapiens qui, Ă  dĂ©faut d’altĂ©ritĂ©, se dĂ©fonce Ă  coup de boutoirs verbaux sur tout ce qui bouge virtuellement et physiquement. L’autre devient le plus souvent l’exutoire de cet ‘un’ effrayĂ© par sa propre remise en question, sa nĂ©cessaire remise en cause, un argument choc pour un individu faible, mais tous ont une responsabilitĂ© collective.

Lors du procĂšs de Nuremberg, les dirigeants nazis furent jugĂ©s et condamnĂ©s, d’autres criminels tentĂšrent de se cacher derriĂšre l’argument prometteur qu’ils obĂ©issaient aux injonctions de leurs maitres et n’étaient que des agents subalternes. Souvenez-vous, peu aprĂšs le gĂ©nocide commis au Rwanda, la mĂȘme interrogation interpella tout un chacun : fallait-il, pouvait-on sĂ©parer les uns des autres, ceux qui ordonnaient les massacres et ceux qui obtempĂ©raient aux ordres ?
L’implication morale de tout homme face Ă  une injonction abjecte et scĂ©lĂ©rate sera de s’interdire de cĂ©der Ă  l’immonde gĂ©nocidaire, mĂȘme aux dĂ©pens de sa propre vie. Certes, affirmer cela exige de toute personne humaine Ă©normĂ©ment d’abnĂ©gation et un courage sacrĂ© car les consĂ©quences seront de toutes les maniĂšres dramatiques, soit ĂȘtre abattu, soit assassinĂ©.

Les cours de justice prononceront d’abord un verdict sans appel concernant les dirigeants politiques et les chefs militaires mais sans, pour autant, permettre aux exĂ©cutants de s’en tirer Ă  bon compte avec des circonstances attĂ©nuantes.
C’est pour ces tortionnaires assassins que fut Ă©tablie la notion de crime contre l’HumanitĂ©.
La conciliation silencieuse d’une nation qui, dans sa grande majoritĂ©, soutient explicitement la barbarie, engage trĂšs certainement le concept de responsabilitĂ© collective. Il n’existe pas, Ă  mon humble avis, une possible dĂ©marcation de-facto, nul ne peut Ă©viter l’Histoire, nul ne peut se soustraire au monde. La neutralitĂ© est dĂ©jĂ  une forme d’intelligence avec l’ennemi, la non-assistance Ă  personnes en danger devient partisane.

Que nous le voulions ou non, nous revenons fatalement vers l’homme individu et son rapport Ă  l’Histoire, nous l’avions compris, nul ne peut vĂ©ritablement ĂȘtre affranchi de toute responsabilitĂ© collective.
Nous ne sommes point sĂ©parĂ©s de l’HumanitĂ©, nous sommes cette HumanitĂ©.
Nous contribuons Ă  l’ƒuvre de l’Histoire et nous ne pouvons guĂšre nous dĂ©filer devant nos responsabilitĂ©s, sinon cela voudrait dire que nous renonçons Ă  nous-mĂȘmes, Ă  nos droits comme Ă  nos devoirs.
L’ordre moral est donc fondamental si l’on veut rendre nos collectivitĂ©s plus sĂ»res, et, dĂ©finitivement plus saines.
A SUIVRE




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