Les législateurs libanais ont voté lundi pour nommer l’homme d’affaires milliardaire Najib Mikati au poste de Premier ministre, chargé de former un gouvernement et de mettre fin à une impasse politique d’un an qui a exacerbé la crise financière du pays.
Mikati, le double Premier ministre qui était au pouvoir pour la dernière fois en 2014, a recueilli une nette majorité de 72 voix des législateurs qui se sont réunis lundi pour consulter le président Michel Aoun.
Mikati, l’un des hommes les plus riches du Liban, est devenu le favori pour le poste après avoir reçu le soutien de la plupart des partis politiques libanais et aussi du puissant groupe militant Hezbollah, soutenu par l’Iran. Mikati a également reçu le soutien d’anciens premiers ministres sunnites, comme Hariri, qui a abandonné ses efforts pour former un gouvernement après avoir échoué à trouver un accord avec Aoun sur la composition du cabinet.
L’impasse politique, alimentée par une lutte pour le pouvoir entre Aoun et Hariri sur les droits et pouvoirs constitutionnels du président et du Premier ministre, a aggravé une crise économique et financière paralysante.
On ne sait pas si Mikati – largement considéré comme une extension de la classe politique qui a conduit le pays à la faillite – sera en mesure de sortir d’une impasse d’un an sur la formation d’un nouveau gouvernement. Il fait face à une opposition chrétienne, notamment du propre parti politique d’Aoun, désormais dirigé par son gendre Gebran Bassil.
La crise financière et économique du Liban a commencé fin 2019 et n’a cessé de s’aggraver depuis lors. La pauvreté a grimpé en flèche ces derniers mois alors que la situation devient incontrôlable, avec des pénuries extrêmes de médicaments, de carburant et d’électricité. La monnaie a perdu environ 90% de sa valeur par rapport au dollar, alimentant l’hyperinflation.
La nomination de Mikati serait la troisième depuis que l’actuel gouvernement provisoire dirigé par Hassan Diab a démissionné après l’explosion massive dans le port de Beyrouth en août dernier. Depuis lors, le cabinet Diab n’a agi qu’à titre intérimaire, aggravant encore la paralysie du Liban.
Le premier à avoir tenté de former un gouvernement a été l’ancien ambassadeur du Liban en Allemagne, Mustafa Adib, qui a démissionné en septembre dernier, près d’un mois après avoir été nommé Premier ministre. Saad Hariri a été le prochain à être nommé et a démissionné la semaine dernière après 10 mois.
Tout nouveau gouvernement est confronté à la tâche monumentale d’entreprendre des réformes désespérément nécessaires, ainsi que de reprendre les pourparlers avec le Fonds monétaire international pour un plan de sauvetage. La communauté internationale a refusé d’aider financièrement le Liban avant que des réformes globales ne soient menées pour lutter contre la corruption généralisée et la mauvaise gestion.
L’enquête sur l’explosion du port du 4 août – déclenchée par la détonation de centaines de milliers de tonnes de nitrate d’ammonium mal stocké – a exacerbé les tensions dans la petite nation, sur fond d’allégations d’ingérence politique dans le travail du pouvoir judiciaire. Plus de 200 personnes ont été tuées et des milliers de blessées dans l’explosion, qui a détruit des parties de la ville.
Mikati, un milliardaire sunnite de la ville septentrionale de Tripoli, a été Premier ministre en 2005 et de 2011 à 2013, lorsqu’il a démissionné en pleine guerre syrienne après un passage de deux ans dans un gouvernement dominé par le Hezbollah et ses alliés.
Il a fondé la société de télécommunications Investcom avec son frère Taha dans les années 1980 et l’a cédée en 2006 au groupe sud-africain MTN pour 5,5 milliards de dollars.
Mikati a le soutien de la France, ancienne puissance coloniale au Liban, mais aussi des États-Unis.
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