Shifra Horowitz, 24 ans, s’est suicidée hier dans son appartement à Jérusalem. Elle appartient au monde ultra-orthodoxe, elle a été abusée sexuellement par le passé par Haïm Walder selon Arutz 7, et ses amis disent qu’elle s’est effondrée mentalement face à aux réactions face à la mort de son bourreau. Qui est responsable de sa mort ? Celui qui l’a attaquée et détruit son âme. Qu’est-ce qui l’a poussée à se suicider ? Il est possible que le climat public dans lequel de puissants éléments ultra-orthodoxes se soient mobilisés depuis plusieurs jours pour blanchir le nom de quelqu’un qui, selon 22 femmes, leur a fait du mal lui a causé une peine terrible.

Le discours de ces sommité haredi qui disent que Haïm Walder a subi la honte est clair et visible : au nom du sceptique, et en l’honneur de sa famille, les femmes qui ont dit qu’elles ont été blessées sont à blâmer malgré les preuves qui y ont été exposées. Mais au sommet du monde lituanien, il y a ceux qui ne s’intéressent pas aux preuves : par exemple, le rabbin Gershon Edelstein qui a transmis un message écœurant aux élevés selon lequel l’affaire devrait être enseignée à travers la honte causé au pauvre Haïm Walder. Je veux croire que le public ultra-orthodoxe n’est pas entièrement aveugle. Que les parents s’occupent de leurs enfants. Que dans notre génération, les filles sont encouragées à parler. Mais il y aura certainement une lutte encore et encore…

Dans ce contexte, la visite du Grand Rabbin David Lau à la tente de deuil de la famille de Haïm Walder est un acte malheureux. Car sans le vouloir, il ne joue pas un rôle important et cause du mal aux victimes et plus tard, ils diront : « Hé, même le grand rabbin est arrivé chez eux », et présenteront son image de réconfort des personnes en deuil. S’il est clair que tout son but était de réconforter une famille brisée, dont il connaît les fils, il n’a pas l’intention de donner une once de légitimité à la vulnérabilité, c’est un message indirect à la légitimation des violences sexuelles dans le monde orthodoxe.

Rabbi Lau est un homme sage et attentionné mais il est aussi malin et c’est pour cela qu’il a réussi à être le grand rabbin malgré tous les sourcils levés lors de son élection, il s’est même demandé s’il aurait pu y parvenir s’il n’était pas né dans la bonne famille et doté de compétences politiques. Etant un homme politique intelligent et expérimenté, il ne peut ignorer le contexte, et le sens de son image à la venue chez cette famille.

Il sait également que sa visite de condoléances a lieu alors que la société ultra-orthodoxe traverse des moments de doutes. Quand il y a ceux qui prennent le parti de Haïm Walder et accusent les journalistes de sa mort comme le Rav Bitton sur Qualita, mais il y a aussi ceux qui ne le font pas. Le journal « Mishpacha » publie aujourd’hui un éditorial important, une page entière sur la nécessité d’aborder de tels problèmes afin qu’ils ne se reproduisent plus.

Notre site Infos Israel News a aussi a été très durement critiqué pour ne pas censurer le harcèlement sexuel dans la communauté religieuse, mais comme sa rédactrice en chef en a été victime dans sa jeunesse, ce genre de censure ne se fera jamais quitte à perdre de nombreux lecteurs.

Cela vaut la peine de saluer les journalistes qui voient sous leurs yeux les âmes qui vont être blessées, et font cet effort pour les protéger. Des tels articles, même juifs et religieux ne doivent pas censurer de telles atrocités. Et sur les réseaux sociaux la révolution est bien plus avancée – femmes et hommes partagent, avec des réserves, dans un langage plus doux et plus indirect – mais partagent.

Face à tout cela, Rav Lau essaie de marcher entre les gouttes. À la fois réconforter et être d’accord avec tout le monde. Hier, après avoir vu à quel point ses actions avaient causé de la douleur et même le suicide de Shifra.

Le Bureau du Grand Rabbin a déclaré au nom du Grand Rabbin d’Israël, GRD Lau :

« La position ferme du Grand Rabbin était et sera qu’aucun harcèlement ou blessure ne devrait être inscrit à l’ordre du jour. Ces actes doivent être éradiqués et déracinés de tous. Dans tous les cas où il y a une trace d’acte indécent ou de harcèlement, il est obligatoire de se plaindre aux autorités croyantes de ces choses et de ne pas se cacher. Même dans son rôle de président de la Grande Cour, le rabbin est conscient de ces adversités et s’efforce de les extirper. Ces mots ont été prononcés lors de nombreuses conférences qui ont traité du sujet et le rabbin continuera à les répéter à chaque occasion. Le cœur du rabbin est donné à tous ceux qui ont été blessés ou seront blessés et il fera tout pour les aider. »

Cette annonce est la quintessence du mandat de Rabbi Lau.  Il contient apparemment toutes les bonnes déclarations, mais il manque de courage. Qu’est-ce que le courage ? Il aurait été plus courageux de dire :  « Le rabbin appelle les victimes à porter plainte auprès de la police, si elles le peuvent. » Ou « Le rabbin s’abstient de donner une légitimité aux assaillants. » Ou « les victimes ne sont pas coupables ».

Rabbi Lau terminera son mandat en 2023, qui a commencé comme d’habitude avec des promesses de combattre et d’aimer la Torah et le judaïsme, et d’être à l’écoute des faibles. Dans la pratique, il s’agissait principalement d’un sacerdoce politique, dans lequel les intérêts ultra-orthodoxes étaient préservés mais dans aucun cas, le courage envers le grand public n’a été enregistré.

Et où se mesure le courage sinon ici, quand un cri de sacrifice supplie d’être entendu, et que des forces puissantes se battent pour le faire taire. Ici, le rabbin Lau aurait pu être un phare, comme le rabbin Shmuel Eliyahu par exemple, mais rav Lau a choisi de rester le champion national de la danse entre les gouttes, et des formulations hypocrites et politisées.

Honte à ceux qui ont tourné le dos aux victimes.