Interview d’Eric Zemmour par IsraĂ«l :  » Je suis un rĂ©publicain laĂŻc. Je ne connais pas la communautĂ© juive « 

Depuis l’annonce de sa candidature Ă  la prĂ©sidence française, Eric Zemmour, considĂ©rĂ© comme un membre de l’extrĂȘme-droite et devenu l’un des tĂȘtes de liste de la course, a Ă©tĂ© mĂȘlĂ© Ă  une sĂ©rie de scandales. Maintenant, dans une interview avec Maariv, il parle de sa transition vers la politique.

OĂč Ă©taient les jours oĂč l’on pouvait rencontrer Eric Zemmour au mythique quartier de Montparnasse Ă  Paris, oĂč l’écrivain Ernest Hemingway et d’autres avaient l’habitude de s’asseoir, et d’écouter ses savantes explications historiques du destin terrible et inĂ©vitable qui attend la France et l’urgence d’éviter qu’elle ne devienne un pays d’immigration. Ceux qui l’ont rencontrĂ© Ă  cette Ă©poque ont entendu de lui comment le flux incessant d’immigrants devait ĂȘtre arrĂȘtĂ©, Ă  son avis, de maniĂšre dĂ©cisive, et se dĂ©barrasser autant que possible de ceux qui Ă©taient dĂ©jĂ  arrivĂ©s par la rĂ©vocation des droits sociaux et plus encore.

Mais aujourd’hui, comme il est l’un des candidats les plus en vue de l’élection prĂ©sidentielle française du 10 avril, pour le rencontrer dans le cadre d’un entretien, le journaliste israĂ©lien s’est rendu sur la place Saint-Germain.

Eric Zemmour, 63 ans, juif, est le fils de parents immigrĂ©s d’AlgĂ©rie. Sa compĂ©tence ne l’a pas aidĂ© Ă  rĂ©ussir l’examen oral Ă  l’École supĂ©rieure de gestion, oĂč la plupart des Ă©lites politiques et bureaucratiques françaises ont passĂ©, ce qui l’a conduit, sans choix, au monde des mĂ©dias. Pendant de nombreuses annĂ©es, il a pu ĂȘtre rencontrĂ© en tant que collĂšgue lors de confĂ©rences de presse ou lors de voyages avec des chefs d’État et de gouvernement. Il a Ă©tĂ©, entre autres, Ă©crivain pour Le Figaro. En novembre dernier, il a annoncĂ© sa candidature Ă  la prĂ©sidence.

Sa candidature Ă  la prochaine Ă©lection prĂ©sidentielle française a apportĂ© du piment et beaucoup de brutalitĂ© Ă  la campagne Ă©lectorale jusque-lĂ  fanĂ©e sur fond de restrictions corona. AprĂšs les deux derniers mois au cours desquels il a Ă©tĂ© classĂ© deuxiĂšme dans les sondages d’opinion, il est actuellement classĂ© quatriĂšme aprĂšs le prĂ©sident sortant Emanuel Macron – « un enfant non dĂ©veloppé », a-t-il dit – sa rivale d’extrĂȘme droite Marine Le Pen, qu’il dĂ©finit comme  » socialiste », et la candidate rĂ©publicaine ValĂ©rie PĂ©cresse.

Bien qu’il soit identifiĂ© Ă  l’extrĂȘme droite, il affirme ne pas appartenir au camp de l’extrĂȘme droite parce qu’il voulait renverser la rĂ©publique, et il veut en fait la sauver « du danger de mort de l’immigration et du remplacement de l’État par un État islamique. » « Un tel danger est traitĂ© brutalement plutĂŽt que gentiment », a-t-il dĂ©clarĂ©.

Son franc-parler lui a entre-temps valu d’incessants scandales. Ces derniers jours, un tribunal en France lui a infligĂ© une amende de dix mille euros aprĂšs avoir qualifiĂ© les mineurs immigrĂ©s absorbĂ©s sans leurs familles « d’assassins, de violeurs, de voleurs « . De plus, la communautĂ© politique et le grand public l’ont condamnĂ© pour avoir dĂ©clarĂ© que « les Ă©lĂšves ayant des besoins spĂ©ciaux devraient ĂȘtre exclus d’un systĂšme d’éducation sĂ©paré ».

Jusqu’à prĂ©sent, dans la campagne Ă©lectorale, Eric Zemmour a essayĂ© de ne pas mettre l’accent sur son judaĂŻsme auprĂšs de ses Ă©lecteurs, mais dans le contexte musulman. En tant que « petit juif barbare », comme il se dĂ©finit lui-mĂȘme, « mes ancĂȘtres ont vĂ©cu en AlgĂ©rie pendant mille ans, bien avant l’occupation musulmane ». Son judaĂŻsme ne l’a pas empĂȘchĂ© d’affirmer que le marĂ©chal français Philippe Petain, chef du rĂ©gime de Vichy qui a collaborĂ© avec les nazis pendant la Seconde Guerre mondiale, « a sauvĂ© des Juifs français aux dĂ©pens des Ă©trangers ».

Les dirigeants de la communautĂ© juive de France et des intellectuels juifs français, comme le philosophe Bernard-Henri LĂ©vy, ont exprimĂ© leur inquiĂ©tude quant au fait que les activitĂ©s et les dĂ©clarations de Eric Zemmour provoquaient une augmentation de l’antisĂ©mitisme dans le pays.

Que pensez-vous des préoccupations de la communauté juive de votre pays ?

« Je suis un rĂ©publicain laĂŻc. Je ne connais pas la communautĂ© juive. Je connais des Français de religion juive. Je me fiche de ce que disent les reprĂ©sentants de cette communautĂ©. Aujourd’hui, ce n’est pas moi qui propage l’antisĂ©mitisme, c’est une population nous le savons tous, et c’est elle qui a expulsĂ© les juifs de la banlieue. Ma famille vivait en banlieue Ă  Paris. Il y avait beaucoup de juifs lĂ -bas, aujourd’hui il n’y en a plus. Dans les Ă©coles publiques de la rĂ©gion parisienne, il n’y a plus de juifs. C’est lĂ  que se situe la question de l’antisĂ©mitisme. »

Dans sa propagande de campagne Ă©lectorale, Eric Zemmour met l’accent sur les «fondations chrĂ©tiennes» de la France et, en l’honneur de NoĂ«l, il a mĂȘme tournĂ© une vidĂ©o pour ses Ă©lecteurs depuis une Ă©glise. « Je parle de la culture chrĂ©tienne », souligne-t-il. « La religion est une question de foi, et je n’ai aucune foi. » Cependant, certains affirment l’avoir vu visiter rĂ©guliĂšrement la synagogue de son quartier.

Il a dit qu’il Ă©tait loin de haĂŻr les musulmans et les pays musulmans. « Mon pĂšre et mon grand-pĂšre parlaient un excellent arabe », dit-il. « C’étaient des experts de la musique arabe qu’ils aimaient beaucoup mĂȘme aprĂšs leur arrivĂ©e en France. Ils Ă©coutaient de la musique arabe des nuits entiĂšres, mais c’est une autre histoire. Alors je connais ce monde de l’intĂ©rieur. Je sais qu’ils respectent ceux qui se respectent eux-mĂȘmes et mĂ©prisent ceux qui ne se respectent pas.

Je ne veux pas changer l’islam, mĂȘme si en France les religions sont permises et doivent ĂȘtre critiquĂ©es. Les pays musulmans sont libres d’ériger l’islam en religion d’État, mais ils ne viendront pas nous donner des leçons. Je blĂąme la situation créée en France uniquement par les autoritĂ©s françaises. Je protĂšge le peuple français, « Pour son identitĂ©, pour sa langue, pour son histoire et sa tradition, pour ses coutumes. Tous les pays le font. Seules les Ă©lites françaises demandent eux-mĂȘmes si c’est lĂ©gitime. Je ferai en sorte que les musulmans respectent la France. »

Êtes-vous contre le port de symboles religieux dans le domaine public, cela inclut-il Ă©galement le port d’une kippa ? « 

Oui. Nous ne portions pas de kippa dans la rue, et aujourd’hui les Juifs ne portent pas de kippa dans la rue de toute façon, afin qu’ils ne soient pas attaquĂ©s. »

« Je soutiens les propos de Clermont-Tonnerre Ă  l’AssemblĂ©e nationale aprĂšs la RĂ©volution française, ‘Nous devons tout refuser aux Juifs en tant que nation et tout leur donner en tant qu’individus' », ajoute-t-il. « Cela devrait Ă©galement ĂȘtre vrai pour les musulmans. »

« La France ne doit pas ĂȘtre dĂ©pendante de l’Europe », a-t-il dĂ©clarĂ©. Pour autant, il ne s’oppose pas au maintien d’un cadre europĂ©en pour les besoins d’une France souveraine. Mais selon lui, les rĂ©unions dans les institutions syndicales devraient se dĂ©rouler en français. Lui-mĂȘme ne parle pas anglais.

OĂč iriez-vous si un jour vous Ă©tiez expulsĂ© de France comme vous cherchez Ă  le faire aux immigrĂ©s ?

« En Italie. À cause de la culture europĂ©enne, de l’histoire, des paysages grandioses. J’aime le cinĂ©ma, la cuisine, les femmes italiennes. »

Pourquoi avez-vous décidé à 63 ans de devenir politicien ?

« Je n’ai pas d’ambitions personnelles. Je ne cherche pas d’emploi ou de poste. J’avais le mĂ©tier de journaliste politique et un grand intĂ©rĂȘt pour la littĂ©rature et l’histoire. J’ai fait des apparitions dans les mĂ©dias avec succĂšs. Je ne cherche pas un nouveau mĂ©tier Bien que je sois issu d’une famille pauvre, je n’étais pas exactement au bas de l’échelle. Mais la vie de la France va mal, et c’est la seule raison pour laquelle je me suis lancĂ© dans cette aventure, cette bataille, parce que je sens que la France est en danger de mort, et que le peuple français est menacĂ© d’ĂȘtre remplacĂ© et poussĂ© par d’autres. J’ai pris les choses en main, jusqu’à ce que je dĂ©cide de le faire moi-mĂȘme.

Selon lui, il a une famille en Israël.

Quelle sera votre politique envers Israel si vous ĂȘtes Ă©lu ?

« Quant Ă  la politique d’IsraĂ«l, pour moi c’est simple. IsraĂ«l se dĂ©fend lui-mĂȘme et ses intĂ©rĂȘts, et il a absolument raison et a le droit de le faire. Tous les pays ont le droit de dĂ©fendre leurs intĂ©rĂȘts, et ce n’est pas moi qui critiquerai, IsraĂ«l a raison. Quant Ă  la politique française, nous comme dans toute rĂ©gion, nous devons avoir une politique Ă©quilibrĂ©e vis-Ă -vis de tous les pays de la rĂ©gion. Mais il faut renoncer Ă  certains exemples. La politique française semble parfois dĂ©passĂ©e par rapport Ă  la situation. Aujourd’hui, il est clair que ce n’est plus IsraĂ«l d’un cĂŽtĂ© et les pays arabes de l’autre. » Quand j’étais enfant, je me souviens qu’IsraĂ«l Ă©tait un alliĂ© de l’Iran, et on voit qu’aujourd’hui l’Arabie Saoudite et le Maroc sont des alliĂ©s d’IsraĂ«l. La politique doit tenir compte de ces changements dans le monde. »

Le nom de Eric Zemmour, mariĂ© et pĂšre de trois enfants, a rĂ©cemment Ă©tĂ© liĂ© Ă  un scandale romantique lorsque les mĂ©dias français ont rapportĂ© qu’il aurait un autre enfant d’une liaison qu’il a eue hors mariage avec son assistante, Sarah Knafo, 28 ans qui partage ses vues extrĂȘmes sur le sauvetage de la France. Il la dĂ©finit dĂ©sormais comme « une Ă©pouse, partenaire, mentor et conseillĂšre », sans laquelle il ne se serait pas rendu aux urnes. Cependant, il a promis de continuer Ă  poursuivre quiconque s’engagerait dans sa vie privĂ©e, et de toute façon, a-t-il dit, il n’y a pas de titre de « premiĂšre dame » en RĂ©publique française. « Il Ă©tait une fois, soupire-t-il, c’était diffĂ©rent. Par exemple, le prĂ©sident socialiste François Mitterrand emmenait avec lui dans son avion pour tous les voyages officiels une journaliste suĂ©doise qui Ă©tait sa maĂźtresse, et il l’a mĂȘme mise enceinte. Nous tous, tous les journalistes, ont vu et savaient, mais se sont tus. »

Eric Zemmour ne rate pas une occasion d’espionner ses anciens amis, les journalistes : « Vous ĂȘtes les personnes les plus dĂ©testĂ©es du peuple, et il a raison », dit celui qui Ă©tait journaliste jusqu’à rĂ©cemment. « Vous avez une tendance collective Ă  copier. Quand je deviendrai prĂ©sident, je vous libĂ©rerai de l’esclavage intellectuel. « 


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