L’ex-espion Jonathan Pollard veut entrer Ă  la Knesset et envoyer des Arabes de Gaza en Irlande

Nous avons grandi en Ă©crivant des lettres Ă  Washington pour sa libĂ©ration. C’est donc quelque peu surrĂ©aliste d’ĂȘtre assis en face de Jonathan Pollard à JĂ©rusalem, oĂč il se prĂ©pare Ă  se prĂ©senter aux prochaines Ă©lections nationales – quand elles auront lieu.

« Écoutez, soit vous faites partie de la solution, soit vous faites partie du problĂšme », dit-il d’un ton neutre. « Vous ne pouvez pas rester les bras croisĂ©s et critiquer. Si vous croyez en ce que vous dites, vous devez participer.

Pollard a les yeux rivĂ©s sur la Knesset depuis son retour au pays avec sa dĂ©funte Ă©pouse Esther, il y a quatre ans. Il avait passĂ© 30 ans en prison aux États-Unis, dont sept en isolement, accusĂ© d’espionnage pour le compte d’IsraĂ«l contre l’AmĂ©rique. Il a ensuite vĂ©cu assignĂ© Ă  rĂ©sidence et soumis Ă  d’autres restrictions Ă  New York de 2015 Ă  2020.

Que vous soyez ou non d’accord avec lui et sa politique, il est devenu une cĂ©lĂ©britĂ© locale. S’il se prĂ©sente, il voudrait figurer sur la liste Otzma Yehudit d’Itamar Ben-Gvir . Il affirme que Ben-Gvir a une mauvaise rĂ©putation immĂ©ritĂ©e.

« Il n’a jamais Ă©tĂ© autorisĂ© Ă  rĂ©aliser certains de ses projets », dĂ©clare Pollard. « Il dit parfois des choses assez farfelues », admet Pollard. « C’est un homme plein d’émotion. Mais je lui fais confiance. Je crois que son cƓur est au bon endroit.

Pollard s’est vu proposer de se prĂ©senter aux cĂŽtĂ©s de Ben-Gvir lors des derniĂšres Ă©lections – en fait, pendant environ 24 heures, le pays a cru qu’il le ferait – mais finalement, dans l’ombre de la perte de sa femme, dĂ©cĂ©dĂ©e quelques mois seulement avant les Ă©lections. , Pollard dit que sa tĂȘte n’était tout simplement pas au bon endroit.

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu lui a Ă©galement offert une premiĂšre place aux Ă©lections de 2021 lorsque Netanyahu n’a pas rĂ©ussi Ă  remporter la couronne, mais il a Ă©galement dĂ©cidĂ© de ne pas se prĂ©senter Ă  ce moment-lĂ .

« Un de mes amis m’avait appelĂ© et m’avait dit : ‘Attention, ne t’implique pas parce que Bibi ne va pas gagner' », et il aurait brĂ»lĂ© beaucoup de ponts, se souvient Pollard. Il savait que s’il rejoignait le poste de Premier ministre Ă  l’époque et que celui-ci perdait, il ne pourrait peut-ĂȘtre plus jamais se prĂ©senter – c’est pourquoi il ne l’a pas fait.

Mais Pollard entretient depuis longtemps des liens Ă©troits avec Netanyahu – qui se tenait sur le tarmac lorsque Pollard a atterri en IsraĂ«l Ă  l’hiver 2020, en pleine pandĂ©mie.

« L’atterrissage a Ă©tĂ© hystĂ©rique », dit Pollard en secouant la tĂȘte. « Bibi avait promis par Ă©crit Ă  [l’ancien prĂ©sident amĂ©ricain Donald] Trump : pas de publicitĂ©. J’aurais dĂ» m’en douter, mais j’ai vu tous les camĂ©ramans lorsque nous sommes arrivĂ©s Ă  l’atterrissage. Je me suis tournĂ© vers Esther, aleha hashalom [qu’elle repose en paix], et j’ai dit : « Qu’est-ce que je dis ? Elle s’est penchĂ©e en arriĂšre et a dit : « Je suis Ă  la retraite. C’est de ta faute.’

La prochaine chose qu’il a su, c’est que le copilote – conscient des restrictions liĂ©es au COVID – a dĂ©valĂ© les escaliers de l’avion et a demandĂ© Ă  Netanyahu de rĂ©cupĂ©rer les bagages. Il a ensuite posĂ© la main sur le Premier ministre et lui a demandĂ© : « Parlez-vous anglais ?

Pollard se souvient que le Premier ministre riait : le copilote l’avait pris pour un employĂ© de l’aĂ©roport.

« Bibi pensait que c’était la chose la plus hystĂ©rique que vous ayez jamais entendue », dit Pollard.

Un nouvel amour s’épanouit

Nous sommes assis au restaurant laitier de l’hĂŽtel Waldorf, King’s Court. Pollard est un habituĂ© ici et tout le personnel vient lui serrer la main. Ils hochent la tĂȘte avec admiration et vĂ©rifient Ă  plusieurs reprises que tout va bien.

Le restaurant Ă  cĂŽtĂ© du hall est magnifique, bien Ă©clairĂ© et moderne avec des siĂšges moelleux dans lesquels nous nous enfonçons lors d’une soirĂ©e sombre et pluvieuse Ă  JĂ©rusalem. Cela convient Ă©galement parfaitement Ă  Pollard : en 1935, le gouvernement britannique a louĂ© le bĂątiment pour servir de bureau. La Commission Peel, créée en 1936 pour enquĂȘter sur les troubles en Palestine mandataire, a tenu ses sĂ©ances dans la grande salle de l’ancien Palace Hotel.

DiffĂ©rents tĂ©moignages, dont ceux du haut-commissaire et de sa secrĂ©taire, ont Ă©tĂ© donnĂ©s Ă  huis clos. Les dirigeants de la communautĂ© juive qui voulaient savoir ce qui se disait ont demandĂ© l’aide de l’ingĂ©nieur de l’hĂŽtel, et des microphones ont Ă©tĂ© installĂ©s Ă  l’intĂ©rieur des luminaires Ă©lectriques au-dessus de la table de rĂ©union. Un appareil d’enregistrement cachĂ© enregistrait les discussions sur des bobines, qui Ă©taient transmises quotidiennement aux reprĂ©sentants des institutions nationales.

Autour de bouchĂ©es de salade – chacun de nous, y compris la nouvelle Ă©pouse de Pollard, Rivkah, a essayĂ© une variĂ©tĂ© de salade diffĂ©rente et toutes Ă©taient savoureuses – nous parlons de tout, des racines de Pollard aux histoires de prison en passant par les livres qu’il lisait lorsqu’il Ă©tait confinĂ© dans une cellule. On apprend que son grand-pĂšre Ă©tait un producteur laitier sur l’Hudson Ă  New York qui, pendant la Prohibition, s’approvisionnait en fĂ»ts de whisky roulĂ©s sur la riviĂšre. Pollard a grandi au Texas.

Pollard a un rire chaleureux mais modeste, et sa longue barbe blanche tremble comme le PĂšre NoĂ«l avec un « ho-ho-ho » lorsqu’il s’excite. Il aime le whisky et le vin, et particuliĂšrement le vin cultivĂ© dans l’État d’IsraĂ«l.

Mais surtout, il aime deux femmes : sa défunte épouse et sa nouvelle.

Il a rencontrĂ© Rivkah, une mĂšre cĂ©libataire originaire de Birmingham, au Royaume-Uni, au Malha Mall alors qu’il faisait du shopping avec Esther. Rivkah essayait de faire Ă©crire un livre sur son pĂšre, et ils ont commencĂ© Ă  parler. La conversation a durĂ© environ une heure et Esther est restĂ©e lĂ , souriante. Lorsqu’ils se sĂ©parĂšrent, Esther demanda Ă  Pollard : « Est-ce que tu l’aimes bien ?

«Je suis un vieil homme mariĂ© et je reconnais les piĂšges quand j’en entends un», dit Pollard. « Alors j’ai dit : « Pourquoi demandes-tu ? C’est plutĂŽt inappropriĂ©. Et elle a dit : ‘Eh bien, je n’y arriverai pas et je veux que tu sois heureux.’

Esther Ă©tait en train de mourir d’un cancer du sein et, peu de temps aprĂšs, lorsqu’elle s’est rendue une derniĂšre fois Ă  l’hĂŽpital, elle n’a cessĂ© de rĂ©pĂ©ter Ă  Pollard qu’il devait Ă©pouser Rivkah.

« C’était dur d’entendre ça parce que je ne voulais pas la perdre. Et j’ai soudain rĂ©alisĂ© que, vous savez, je pouvais essayer de sauver huit millions de Juifs, mais je ne pouvais pas en sauver un seul », dit Pollard avec regret.

Mais six mois plus tard, il a accepté son offre et a contacté Rivkah.

«J’avais peur parce que cela faisait longtemps que je n’étais pas sorti en couple. Et je pensais : « C’est une belle femme ; il n’y a aucun moyen qu’elle regarde ce vieux bouc. Je l’ai invitĂ©e Ă  dĂ©jeuner chez Piccolino », se souvient Pollard. «AprĂšs avoir Ă©changĂ© des plaisanteries, j’ai juste dit : ‘Veut tu te marier ?’ Et elle m’a regardĂ©, et j’ai vu qu’elle y rĂ©flĂ©chissait. Et elle a dit : « Oui. Que veux tu pour le dĂ©jeuner ?’

Pollard admet qu’il Ă©tait follement amoureux d’Esther pendant 40 ans et qu’il Ă©tait difficile d’envisager d’aimer quelqu’un d’autre. «C’était presque comme une trahison», dit-il. « Mais en poussant notre shidduch, elle m’a donnĂ© la libertĂ© d’aimer et de me remarier. Elle m’a sorti de prison avec l’aide de Dieu. Elle m’a ramenĂ© Ă  la maison et la derniĂšre chose qu’elle a faite a Ă©tĂ© de me donner ma femme.

« Elle est trÚs vivante avec nous. »

Les activités de Pollard aprÚs la prison

Aujourd’hui, Pollard se concentre sur la crĂ©ation de quatre start-ups qu’il avait imaginĂ©es en prison. Ils traitent de l’eau de mer, des protĂ©ines synthĂ©tiques, des Ă©nergies renouvelables et du stockage d’énergie. À l’heure actuelle, elles sont toutes autofinancĂ©es. Il aide Ă©galement Ă  Ă©lever les sept enfants de Rivkah.

« Il n’y a rien en prison qui m’ait autant effrayĂ© que d’avoir affaire Ă  quatre filles israĂ©liennes de 11, 14, 16 et 18 ans », dit Pollard avec tendresse en prenant une bouchĂ©e de sa salade de fruits. « J’avoue que je suis un lĂąche Ă  l’égard de la plus jeune de 11 ans. Tout ce qu’elle a Ă  faire, c’est de donner l’impression qu’elle va pleurer, et tout ce qu’elle veut, c’est bien.

Pollard travaille sur ces sociĂ©tĂ©s parce qu’il estime qu’IsraĂ«l est vulnĂ©rable Ă  sa dĂ©pendance vis-Ă -vis des importations de gaz naturel et de produits alimentaires offshore.

«Je pense que nous devons dĂ©velopper de petits rĂ©acteurs modulaires qui peuvent ĂȘtre enterrĂ©s, renforcĂ©s et dispersĂ©s afin de dĂ©velopper un systĂšme de micro-rĂ©seaux Ă  travers le pays, et le rĂ©seau constitue essentiellement une solution de secours», explique Pollard. Il parle Ă©galement d’un projet sur l’uranium faiblement enrichi, qui reprĂ©sente selon lui l’avenir.

Pollard admet Ă©galement qu’il est « extraordinairement dĂ©primĂ© » par ce qui s’est passĂ© le 7 octobre, principalement parce que cela aurait pu ĂȘtre Ă©vitĂ©.

« DĂšs mon arrivĂ©e ici, je n’ai jamais parlĂ© de rĂ©forme judiciaire. J’ai parlĂ© de rĂ©forme militaire parce que j’avais l’impression – et malheureusement cela s’est confirmĂ© – que l’armĂ©e Ă©tait incapable de penser de maniĂšre offensive. Et nous savons dĂ©sormais quelles en sont les consĂ©quences.»

Il dit que Tsahal devrait ĂȘtre rebaptisĂ© « ArmĂ©e israĂ©lienne » et changer de mentalitĂ©. Il pense Ă©galement qu’IsraĂ«l devra annexer Gaza s’il veut que les habitants retournent dans le Sud.

« Je dis que nous devons Ă©vacuer la population arabe rĂ©sidente [de Gaza] », maintient Pollard. «Je me fiche de savoir oĂč ils vont. Ma prĂ©fĂ©rence va Ă  l’Irlande. Je pense que les Irlandais le mĂ©ritent. Le dĂ©putĂ© irlandais Richard Boyd Barrett a mĂȘme enfilĂ© un keffieh, note-t-il.

Il y a juste assez de temps pour quelques histoires de prison qui font que Shawshank de Stephen King ressemble Ă  un jeu d’enfant, mieux vaut ne pas le publier dans un magazine familial. Pollard raconte comment il a vĂ©cu ses journĂ©es dans une petite cellule, oĂč il a installĂ© une radio (mĂȘme si c’était contraire aux rĂšgles) et lu des piles de livres ; Esther lui envoyait aussi rĂ©guliĂšrement des coupures de presse. Les trois livres qui l’ont le plus marquĂ© : La femme du voyageur temporel ; Les Colombes ; et Comme une feuille conduite .

« J’ai vu le meilleur et le pire », affirme Pollard.


RĂ©daction francophone Infos Israel News pour l’actualitĂ© israĂ©lienne
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