Une Égyptienne accusĂ©e d’espionnage pour le Mossad : « Les soldats Ă©gyptiens et israĂ©liens face Ă  face, une Ă©tincelle et le conflit peut Ă©clater Ă  tout moment »

Dans un espace mĂ©diatique et politique oĂč les condamnations du terrorisme sont parfois perçues comme des actes de trahison, comme chez notre voisine l’Égypte, Dalia Ziada se distingue comme une figure particuliĂšrement courageuse. Ziada, chercheuse en politique, qui a choisi d’aller Ă  contre-courant, a consolidĂ© sa position au cours des deux derniĂšres dĂ©cennies comme l’une des voix les plus marquantes du monde arabe prĂŽnant le libĂ©ralisme, les droits humains et la coexistence entre peuples et religions. Elle a dirigĂ© des institutions de recherche, menĂ© des initiatives Ă©ducatives et politiques, et a Ă©tĂ© reconnue internationalement par les principales plateformes mondiales pour son travail en faveur de la libertĂ©, de la tolĂ©rance et des LumiĂšres dans un monde musulman conservateur.

Avec l’attaque terroriste du 7 octobre, Ziada est devenue l’ennemie publique numĂ©ro un en Égypte. La critique qu’elle a formulĂ©e Ă  l’encontre du Hamas a suscitĂ© une tempĂȘte autour d’elle : menaces, incitations Ă  la haine et accusations de trahison. Finalement, elle a dĂ» fuir l’Égypte par crainte pour sa vie.

« La persĂ©cution que je subis actuellement de la part du gouvernement rĂ©vĂšle l’hypocrisie politique de l’Égypte », dĂ©clare Ziada dans une interview exclusive accordĂ©e Ă  Globes. « Nous avons un accord de paix avec IsraĂ«l. IsraĂ«l a Ă©tĂ© un excellent voisin pour l’Égypte, meilleur que plusieurs pays arabes. Nous avons une coopĂ©ration Ă©conomique et sĂ©curitaire. J’ai vu de mes propres yeux des diplomates israĂ©liens et des hauts fonctionnaires de l’ONU se battre pour l’Égypte aprĂšs la chute des FrĂšres musulmans, disant qu’ils veulent que la nouvelle direction du prĂ©sident al-Sissi rĂ©ussisse, car elle combattra les FrĂšres musulmans. Et quand al-Sissi, alors ministre de la DĂ©fense, s’est tournĂ© vers IsraĂ«l pour conclure un accord sur un rapprochement Ă  la frontiĂšre du SinaĂŻ permettant de combattre les groupes terroristes, la rĂ©action d’IsraĂ«l a Ă©tĂ© incroyable. Ils n’ont pas seulement donnĂ© leur accord, ils ont dit : « Nous venons combattre avec vous ». Sans parler de la coopĂ©ration dans la recherche de gaz en MĂ©diterranĂ©e. »

« Compte tenu de tout cela, » dit Ziada, « il a Ă©tĂ© choquant de voir la rĂ©action du peuple et du gouvernement Ă©gyptiens au 7 octobre. Dans tout le monde arabe, on a cĂ©lĂ©brĂ©. On a cĂ©lĂ©brĂ© le Hamas comme les champions de la rĂ©sistance. L’Égypte a Ă©tĂ© l’un des premiers pays Ă  publier un communiquĂ© ce jour-lĂ , un communiquĂ© qui ne reconnaĂźt pas les victimes de l’attaque. Le communiquĂ© ne dit pas que le Hamas a mal agi. Il ne fait que demander Ă  IsraĂ«l de faire preuve de retenue, parce que ce qui s’est passĂ© est en fait de sa faute, ‘le rĂ©sultat de 70 ans d’occupation’. J’ai l’impression que ce communiquĂ© a peut-ĂȘtre Ă©tĂ© rĂ©digĂ© Ă  l’ambassade du Qatar. C’était fou. »

Données personnelles de Dalia Ziada :
Âge : 43 ans
Profession : Chercheuse principale au Centre JĂ©rusalem des affaires Ă©trangĂšres et de la sĂ©curitĂ©, prĂ©sidente de l’Institut pour la dĂ©mocratie libĂ©rale, ancienne directrice rĂ©gionale du CongrĂšs amĂ©ricano-islamique.
Autre : CNN l’a qualifiĂ©e d’« agent de changement » Ă  suivre, aprĂšs avoir jouĂ© un rĂŽle central dans le mouvement qui a dĂ©clenchĂ© la rĂ©volution Ă©gyptienne de 2011.

« J’ai vu les vidĂ©os de ce qui s’est passĂ© le 7 octobre avec une semaine ou deux de retard », raconte-t-elle. « J’ai Ă©tĂ© invitĂ©e Ă  une confĂ©rence en ligne du ministĂšre des Affaires Ă©trangĂšres et du ministĂšre de la DĂ©fense en IsraĂ«l, qui s’est tenue en arabe. Plus de 200 journalistes, Ă©crivains, activistes et chercheurs d’instituts de recherche, tous arabes, Ă©taient invitĂ©s. Ils nous ont montrĂ© des vidĂ©os filmĂ©es par des membres du Hamas eux-mĂȘmes. AprĂšs les avoir vues, j’ai ressenti le besoin de me tenir du cĂŽtĂ© des victimes. »

Pourquoi était-ce important pour vous de vous exprimer ?
« Des gens ont Ă©tĂ© enlevĂ©s de chez eux, en pyjama, le matin d’une fĂȘte, ont Ă©tĂ© torturĂ©s, tuĂ©s, kidnappĂ©s, y compris des enfants, des tout-petits, des personnes ĂągĂ©es. Pourquoi ? Pourquoi une telle cruautĂ© ? Alors j’ai pris sur moi la mission de parler Ă  mes amis arabes et de leur dire : voilĂ  ce qui s’est passĂ©, pas ce que dit notre presse. »

« Certains membres du parlement ont dit qu’il fallait me faire exĂ©cuter. »
Ziada, qui est chercheuse principale au Centre JĂ©rusalem des affaires Ă©trangĂšres et de la sĂ©curitĂ©, raconte comment les choses ont Ă©voluĂ© : « J’ai commencĂ© sur mes plateformes de rĂ©seaux sociaux, puis j’ai Ă©tĂ© invitĂ©e Ă  commenter dans les mĂ©dias. Une des interviews Ă©tait avec l’Institut d’études de sĂ©curitĂ© nationale de l’UniversitĂ© de Tel-Aviv. Elle s’est dĂ©roulĂ©e en arabe, et je pense que c’était le but, pour atteindre le plus grand public arabe possible, et c’est devenu viral. Tout ce que j’ai dit dans cette interview, c’est que le Hamas est une organisation terroriste, et si les pays arabes raisonnent, ils devraient soutenir IsraĂ«l dans la guerre contre lui et contre le rĂ©gime iranien. »

« J’ai dit cela Ă  un public qui cĂ©lĂ©brait le Hamas comme des champions parce qu’ils avaient tuĂ© des Juifs, donc la rĂ©action contre moi a Ă©tĂ© virulente. Au dĂ©but, elle a Ă©tĂ© menĂ©e par des islamistes, puis la folie a continuĂ© avec des mĂ©dias d’État sous contrĂŽle gouvernemental, qui ont incitĂ© Ă  la haine et m’ont traitĂ©e de traĂźtresse. Ils ont mĂȘme invitĂ© des parlementaires dans des Ă©missions de tĂ©lĂ©vision nationales pour dire que je devais ĂȘtre punie, exĂ©cutĂ©e. Tout cela en trois jours. »

« Un groupe de « salafistes », une branche d’islamistes trĂšs extrĂ©mistes, populaires en Égypte, est allĂ© chez ma mĂšre pour me chercher. C’était trĂšs effrayant. Heureusement, je n’étais pas lĂ . »




« Ils ont demandĂ© Ă  ma mĂšre de me livrer, et c’était clair : je devais mourir. »




« J’ai appelĂ© les autoritĂ©s de sĂ©curitĂ© et un haut policier que je connaissais. Il m’a dit : ‘Nous n’avons plus aucun lien avec toi. Tu as fĂąchĂ© tout le pays avec tes dĂ©clarations, tu mĂ©rites tout ce que tu reçois.’ La nuit suivante a Ă©tĂ© la plus effrayante de ma vie. J’étais sĂ»re qu’ils allaient venir chez moi. Le lendemain matin, je me suis rĂ©veillĂ©e avec la nouvelle que quatre poursuites avaient Ă©tĂ© dĂ©posĂ©es contre moi, toutes par des avocats proches du rĂ©gime d’al-Sissi. On m’accusait de diffusion de fausses informations, menace Ă  la sĂ©curitĂ© nationale, trahison, collaboration avec des entitĂ©s israĂ©liennes, et, plus drĂŽle encore, d’espionnage pour le Mossad israĂ©lien. MĂȘme si cela semble risible, ce sont de vraies accusations en droit pĂ©nal Ă©gyptien, qui peuvent mener Ă  la perpĂ©tuitĂ© ou Ă  la peine de mort. DĂšs leur dĂ©pĂŽt, un mandat d’arrĂȘt a Ă©tĂ© lancĂ© contre moi. Heureusement, Ă  ce moment-lĂ , j’avais dĂ©jĂ  pu quitter l’Égypte. Les poursuites sont toujours en cours aujourd’hui. »


RĂ©daction francophone Infos Israel News pour l’actualitĂ© israĂ©lienne
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