Le 3 juin 2025, une nouvelle secoue la scène politique israélienne : la communauté hassidique de Gour, l’une des plus influentes du pays, exerce une pression croissante pour pousser à la dissolution de la Knesset. Cette initiative s’inscrit dans le cadre d’un mécontentement interne lié à la gestion de la guerre, à la loi sur la conscription des ultra-orthodoxes, et à des désaccords croissants au sein de la coalition dirigée par Benyamin Netanyahou.
Mais loin d’être un signe d’effondrement, cette crise illustre la vitalité du débat démocratique israélien et met en lumière une constante : même sous pression, Israël reste un modèle de pluralisme, de résilience institutionnelle, et de dialogue civique.
Le hassidisme de Gour : un acteur politique central
La dynastie hassidique de Gour est l’un des piliers du judaïsme ultra-orthodoxe ashkénaze. Très organisée, disciplinée, et dotée d’un pouvoir électoral significatif, elle est historiquement affiliée au parti Agoudat Israël, qui fait partie de l’alliance politique Judaïsme unifié de la Torah (Yahadout HaTorah).
Depuis des décennies, Gour est un partenaire clé des gouvernements de droite, échangeant son soutien parlementaire contre des garanties sur l’autonomie éducative, le financement des yeshivot, et l’exemption de service militaire.
Les dons sont la bienvenue en cette situation particulièrement difficile :
Mais aujourd’hui, la pression monte à l’intérieur du mouvement : certains responsables religieux et politiques considèrent que la coalition actuelle ne défend plus suffisamment leurs intérêts.
Une loi sur la conscription comme déclencheur
Le sujet de la conscription des ultra-orthodoxes refait surface avec intensité. La Cour suprême a exigé du gouvernement qu’il légifère sur la fin des exemptions automatiques dont bénéficient les étudiants en yeshiva. Ce dossier sensible, touchant à la fois la sécurité, l’identité religieuse, et l’équité sociale, a créé de vives tensions dans la coalition.
Le hassidisme de Gour considère que le gouvernement n’a pas suffisamment protégé la spécificité du monde haredi face à ce qu’il perçoit comme une ingérence de l’État laïc dans la sphère spirituelle. D’où la menace : faire tomber le gouvernement pour forcer des élections anticipées.
Une crise, mais pas une rupture
Il serait toutefois exagéré de parler d’un effondrement du système politique. En réalité, cette situation reflète la complexité mais aussi la solidité de la démocratie israélienne. Voici pourquoi :
Le Parlement fonctionne librement, même en temps de guerre.
Les débats internes à la coalition montrent que le pouvoir exécutif n’est pas hégémonique.
Les courants religieux, laïcs, de droite et de gauche s’affrontent dans les urnes, pas dans la rue.
Israël est l’un des rares pays au monde à mener une guerre existentielle tout en maintenant des institutions démocratiques ouvertes, fonctionnelles, et pluralistes.
Une stratégie politique : pression, pas séparation
Certains analystes estiment que les menaces de Gour ne visent pas réellement à faire chuter le gouvernement, mais à renforcer leur position dans les négociations internes. Il s’agit d’une tactique bien connue en Israël : mettre en balance le maintien de la coalition contre des concessions budgétaires ou juridiques.
Autrement dit, le hassidisme de Gour utilise les outils de la démocratie parlementaire pour peser sur l’agenda gouvernemental. Cela peut sembler cynique, mais c’est le jeu de toute démocratie parlementaire. Et dans le cas d’Israël, cela évite une confrontation violente.
Le rôle stabilisateur du Premier ministre
Dans cette tempête politique, Benyamin Netanyahou joue une fois de plus le rôle de médiateur stratégique. Malgré les critiques, il reste l’homme capable de tenir ensemble des blocs contradictoires : la droite religieuse, les laïcs, les libéraux économiques, et les nationalistes sécuritaires.
Sa capacité à négocier, temporiser et composer est l’un des secrets de la longévité de la démocratie israélienne. Netanyahou sait que la stabilité intérieure est cruciale en période de guerre, et il travaille activement à désamorcer les tensions.
Un contexte de guerre qui exacerbe les tensions
Il ne faut pas oublier que cette crise intervient dans un contexte exceptionnel : Israël est toujours en guerre contre le Hamas, affronte les menaces du Hezbollah au nord, les Houthis au sud, et l’Iran à distance. Dans ce climat, la moindre crise politique prend une ampleur décuplée.
Mais c’est justement là que la force d’Israël se manifeste : les institutions tiennent bon, même sous le feu. Les débats se poursuivent à la Knesset, la presse reste libre, les manifestations sont autorisées. Cette vitalité politique est un message fort à ses ennemis : Israël est une démocratie vivante, pas un régime autoritaire affaibli.
Le pluralisme israélien : un modèle à part
Israël n’est pas une démocratie occidentale classique. C’est un État juif, avec une population très diversifiée : laïcs, religieux, ultra-orthodoxes, Arabes israéliens, druzes, immigrants russes ou éthiopiens. Le fait que tous ces groupes puissent s’exprimer politiquement, même en période de crise, est un témoignage de la maturité politique du pays.
Dans peu d’autres États au monde, une communauté religieuse minoritaire pourrait menacer de faire chuter le gouvernement sans subir de répression ou d’ostracisme. En Israël, c’est la norme.
La démocratie israélienne face à ses défis
Évidemment, ce pluralisme crée des tensions. Mais il est préférable à l’uniformité imposée. La crise actuelle montre que :
Les ultra-orthodoxes veulent participer au système sans renier leur identité.
Le système israélien leur permet de le faire.
Les compromis sont possibles, même sur des sujets explosifs comme la conscription.
Ce n’est pas la fin de la coalition, ni de la démocratie : c’est sa démonstration de force.
Conclusion : une crise révélatrice, pas destructrice
La pression exercée par le hassidisme de Gour pour dissoudre la Knesset n’est pas un signe de faiblesse d’Israël. C’est une démonstration de sa pluralité, de la capacité des groupes les plus différents à coexister et à négocier dans le cadre de la loi.
Israël reste le seul État du Moyen-Orient où les religieux peuvent critiquer ouvertement le gouvernement sans craindre pour leur vie. C’est cela, la véritable force de l’État juif.
Et tant que ces tensions se règlent à la Knesset plutôt qu’à la kalachnikov, Israël peut être fier de sa démocratie — une démocratie unique, assiégée, mais résiliente.
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