Reconnaissance d’un État palestinien : menace ou opportunité pour Israël ?

L’annonce coordonnée de Paris, Londres et Ottawa de reconnaître un État palestinien pourrait sembler, à première vue, un revers diplomatique pour Israël. En réalité, ce geste pourrait bien se révéler être une carte à jouer — en particulier pour relancer la normalisation avec l’Arabie saoudite et même pour tourner définitivement la page des Accords d’Oslo.

Le 24 juillet, le président français Emmanuel Macron a annoncé que la France reconnaîtrait la Palestine lors de l’Assemblée générale de l’ONU en septembre. Le lendemain, le Premier ministre britannique Keir Starmer a déclaré que son pays ferait de même, sous conditions : un cessez-le-feu à Gaza et un engagement israélien vers la “solution à deux États”. La semaine suivante, le Canada a rejoint l’initiative, assortie de ses propres exigences.

Trois membres du G7 en quelques jours : de quoi inquiéter. Mais un détail compte — au lieu d’imposer des sanctions économiques, comme ce fut le cas contre la Russie, ces puissances optent pour un geste purement symbolique, sans conséquence immédiate sur la sécurité ou l’économie israélienne.

Un geste sans portée réelle… tant que Trump est à la Maison Blanche
Pour qu’un État palestinien devienne membre à part entière de l’ONU, il faut passer par le Conseil de sécurité — et les États-Unis ont toujours mis leur veto à cette reconnaissance. Sous un président Trump, le scénario ne changera pas. Il a déjà menacé de faire capoter un accord commercial avec Ottawa après son annonce, et son secrétaire d’État Marco Rubio a qualifié la décision française de “précipitée” et de pur carburant pour la propagande du Hamas.

Ainsi, à court terme, cette reconnaissance ne modifie pas la réalité diplomatique des Palestiniens. Mais elle peut offrir un levier politique.

Une ouverture pour la normalisation avec Riyad
Depuis des mois, la normalisation avec l’Arabie saoudite est bloquée par la “question palestinienne”. Riyad veut montrer à son opinion publique qu’elle n’abandonne pas la cause ; Israël refuse, pour des raisons sécuritaires évidentes, de concéder un engagement concret sur ce dossier. La reconnaissance par la France, le Royaume-Uni et le Canada pourrait fournir aux Saoudiens la couverture politique nécessaire : ils peuvent se targuer d’avoir obtenu une avancée pour les Palestiniens et, dans la foulée, conclure un accord historique avec Jérusalem.

Ainsi, au lieu de présenter la normalisation comme une trahison, Riyad pourrait la vendre comme un prolongement diplomatique des gains obtenus.

Vers la fin des Accords d’Oslo ?
Ironie de l’histoire, cette reconnaissance pourrait aussi servir Israël : en figeant un “État palestinien” purement théorique sur la scène internationale, elle met en lumière l’inapplicabilité du cadre d’Oslo. Les conditions fixées par Israël — désarmement du Hamas, réforme profonde de l’Autorité palestinienne, reconnaissance d’Israël comme État juif — restent lettre morte. La reconnaissance symbolique pourrait, à terme, pousser à repenser totalement le cadre des négociations et libérer Israël de contraintes diplomatiques obsolètes.

Pour l’heure, cette initiative du G7 ressemble moins à une menace immédiate qu’à un mouvement d’échiquier que Jérusalem peut retourner à son avantage — à condition de jouer habilement ses cartes avec Washington et Riyad.

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