Vingt ans après le déracinement, les femmes de Goush Katif rêvent toujours de retourner à Gaza : “C’était le paradis”

Vingt ans ont passé depuis l’été 2005 et l’expulsion forcée des habitants juifs de Goush Katif, mais pour celles et ceux qui y ont vécu, le mot “désengagement” reste un terme interdit. On parle encore de “déracinement”. Les blessures ne se sont jamais refermées, et le 7 octobre 2023 n’a fait que rouvrir brutalement la plaie.

À Yad Binyamin, localité créée pour accueillir des familles expulsées, nous avons rencontré trois figures de ce passé encore brûlant : Dr. Hanna Katan, gynécologue de Nétzarim ; Dikla Gal-Ad, chanteuse et actrice originaire de Ganei Tal ; et Dana Zellinger, commerçante de Nevé Dekalim, qui avait refusé jusqu’au dernier moment de quitter sa maison et sa boutique le 17 août 2005.

“Nous avons été chassés, et nos fils servent aujourd’hui sur ces mêmes terres”
Dr. Katan se souvient :

« Mon fils était soldat Golani sur l’axe Philadelphi il y a 20 ans, sous les ordres d’Eliraz Peretz z’’l. Ils disaient : “Comment peut-on nous faire sortir d’ici ?” Aujourd’hui, il est revenu servir à Gaza. »

Elle décrit des villages israéliens “fleuris” construits sur le sable par la communauté, remplacés depuis par des ruines :

« Dire que le peuple de Gaza aime la terre ? Impossible. Ils veulent seulement que nous n’y soyons pas. Quand nous étions là, ça prospérait. Aujourd’hui, tout est rasé. »

Pour elle, le retour ne pourra se faire qu’après l’élimination du Hamas, la libération des otages et des garanties que la situation ne se répétera pas.

Des souvenirs mêlant menaces et détermination
Les témoignages rappellent les dangers vécus : attentats à la bombe dès 1987, bus blindés, escortes militaires. À partir de la seconde Intifada, les premiers tirs de roquettes, qui allaient se compter par milliers avant le retrait.

Dana Zellinger raconte :

« On nous avait dit qu’avec la première roquette, ils seraient frappés. En réalité, si nous refaisons la même erreur, nous aurons le même résultat. Nous devons comprendre qu’il n’y a pas d’autre choix que de revenir dans cette région, pas seulement pour la sécurité. C’est notre terre, et les Arabes ne comprennent que ce langage. »

Des projets déjà prêts pour un retour
Dr. Katan affirme qu’une “feuille de route” existe :

« Il y a déjà un millier de familles prêtes à s’installer dans le nord de la bande de Gaza dès aujourd’hui. Lorsque l’on pourra organiser une migration volontaire des habitants arabes, ce sera aussi pour leur bien, sur le plan humanitaire. »

La terre laissée à l’abandon
Dikla Gal-Ad déplore :

« Les serres de Ganei Tal sont restées intactes, avec les systèmes d’irrigation. Le sol était en production. Qu’ont-ils fait ? Démonté les structures pour revendre le métal. Ensuite, ils ont essayé de cultiver… rien n’a poussé. »

“Un paradis malgré les menaces”
Pour ces femmes, la vie à Goush Katif, même sous le feu, représentait un idéal :

« Nous nous souvenons des attaques, des noms des victimes comme Tali Hatuel et ses quatre filles, ou le rabbin Biran, mais, subjectivement, c’était le paradis. Les gens voulaient être là, vivre et protéger la terre. »

Un rêve qui persiste
Elles sont convaincues que le retour est inévitable. Pas seulement pour des raisons sécuritaires, mais comme un acte de justice historique et d’enracinement. Pour elles, Goush Katif symbolise la capacité du peuple juif à faire fleurir le désert, là où d’autres n’ont laissé que désolation.

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