Une nouvelle passe d’armes diplomatique oppose Paris et Jérusalem. Emmanuel Macron a adressé une longue lettre de réponse à Benyamin Netanyahou, après que ce dernier l’a accusé d’« attiser l’antisémitisme » en France par ses positions critiques à l’égard d’Israël et son soutien à la création d’un État palestinien. Dans ce texte de six pages, révélé par la presse française, le président français tente à la fois de défendre son bilan en matière de lutte contre la haine antijuive et de justifier sa ligne diplomatique vis-à-vis du conflit à Gaza.
Macron ne mâche pas ses mots. « L’occupation de Gaza, l’expulsion forcée et la famine des Palestiniens, la déshumanisation et la rhétorique de haine, de même que l’annexion de la Cisjordanie, ne conduiront jamais Israël à la victoire », écrit-il. Le président avertit que de telles politiques « isoleront davantage votre pays et offriront un prétexte à ceux qui nourrissent l’antisémitisme ». Dans sa vision, la pérennité de l’État juif passe par une solution politique durable et non par un « cercle vicieux de guerre permanente ».
La réponse est cinglante à la lettre envoyée une semaine plus tôt par Netanyahou, dans laquelle le Premier ministre israélien accusait le président français d’avoir « allumé la flamme de l’antisémitisme » par ses déclarations publiques en faveur d’une reconnaissance d’un État palestinien. « Depuis vos propos, l’antisémitisme s’est renforcé en France », écrivait Netanyahou, en citant une série d’agressions et d’actes hostiles contre des Juifs. Pour lui, les prises de position de Macron « récompensent le terrorisme du Hamas » et encouragent « les ennemis des Juifs en Europe ».
Face à ces accusations, Macron tente de rappeler son engagement. « La protection des Juifs de France a toujours été une priorité de mes actions », affirme-t-il, citant le déploiement de 15 000 policiers pour la sécurité des institutions juives depuis le 7 octobre 2023. Le chef de l’État souligne également que la France a officiellement adopté la définition de l’antisémitisme de l’IHRA, et qu’« aucune faiblesse n’est tolérée face à la haine ». Mais il ajoute aussitôt que la lutte contre l’antisémitisme « ne saurait exonérer Israël de la responsabilité de ses choix politiques à Gaza ».
Macron insiste sur une ligne qui se veut « à la fois ferme et amicale ». « Nous avons entre nous des divergences profondes », reconnaît-il, tout en affirmant qu’elles doivent être discutées « au nom de l’amitié et de la fidélité » entre Paris et Jérusalem. Il appelle Netanyahou à « sortir du cercle meurtrier et illégal de l’escalade » et à tendre la main aux partenaires internationaux pour construire « un avenir de paix, de sécurité et de prospérité pour Israël et pour toute la région ».
Cette confrontation épistolaire s’inscrit dans un climat diplomatique déjà tendu. Ces dernières semaines, Washington et Jérusalem ont critiqué ouvertement la France pour ce qu’ils estiment être une complaisance à l’égard du Hamas et un manque de fermeté face à la montée de l’antisémitisme【https://infos-israel.news/category/alerte-info-24-24/】. La position de Macron, qui combine défense des Juifs français et reconnaissance du droit palestinien à un État, illustre une ambiguïté que ses adversaires considèrent comme intenable.
Pour Israël, le problème dépasse la simple rhétorique. « Macron peut multiplier les promesses de protection, mais il ne peut ignorer que ses appels à un État palestinien encouragent le Hamas et mettent en danger les Juifs de France », note un éditorial sur RakBeIsrael.buzz. Les autorités israéliennes rappellent que les pogroms antisémites en Europe ne sont pas un souvenir lointain, mais une menace actuelle et croissante, exacerbée par les slogans anti-israéliens qui envahissent les manifestations.
Au-delà du duel personnel entre Macron et Netanyahou, l’épisode illustre la fracture profonde entre l’Europe et Israël. Tandis que Paris plaide pour un « équilibre » entre solidarité avec Israël et reconnaissance des droits palestiniens, Jérusalem souligne que le temps joue contre la sécurité du peuple juif et que chaque concession politique nourrit l’illusion du Hamas et de ses parrains iraniens.
En conclusion, cette querelle de lettres met en lumière une évidence brutale : dans un monde traversé par la résurgence de l’antisémitisme, les mots des dirigeants occidentaux ne sont jamais neutres. Lorsqu’ils critiquent Israël, ils nourrissent, volontairement ou non, ceux qui brandissent ces critiques comme justifications à la haine des Juifs. Et c’est précisément ce que Netanyahou reproche à Macron : ne pas voir que la frontière entre diplomatie et incitation est devenue dangereusement poreuse.
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