L’Europe s’indigne, Washington tranche. Alors que les ministres des Affaires étrangères de l’Union européenne se réunissaient ce week-end à Copenhague, les États-Unis ont choisi la fermeté : pas de visas pour 80 hauts responsables de l’Autorité palestinienne, dont Mahmoud Abbas, à moins qu’ils ne remplissent une série de conditions strictes. Parmi elles : la condamnation explicite du terrorisme, la suppression de l’incitation à la haine dans les manuels scolaires, l’arrêt des campagnes internationales visant à contourner la négociation directe, y compris devant la Cour pénale internationale, et l’abandon des démarches pour une reconnaissance unilatérale d’un État palestinien.
« Pas d’Assemblée générale de l’ONU pour eux sans respect des engagements », a tranché le secrétaire d’État Marco Rubio, qui a officialisé ces sanctions dans une note transmise au Congrès. Cette décision s’appuie sur la législation américaine, notamment sur les clauses interdisant le financement de toute autorité continuant à rémunérer les terroristes et leurs familles.
L’ironie, souligne le chroniqueur Ben-Dror Yemini, est qu’à maintes reprises l’Union européenne a adopté elle-même des résolutions semblables, exigeant l’arrêt du financement palestinien à des manuels scolaires incitant à la violence. Le Parlement européen avait encore voté en mai dernier la suspension de son aide tant que l’incitation au terrorisme persistait. Pourtant, dès le lendemain, l’ex-chef de la diplomatie européenne Josep Borrell avait ignoré la décision, préférant maintenir les flux financiers pour éviter la faillite de l’Autorité. « À quoi bon signer des accords, si leur violation entraîne des récompenses ? », s’interroge Yemini.
Ce double standard illustre une constante européenne : condamner Israël pour sa politique de construction dans les implantations – pourtant non prohibée par les accords d’Oslo – tout en tolérant les entorses palestiniennes aux mêmes accords. En autorisant les campagnes internationales contre Israël, en fermant les yeux sur la glorification des terroristes et en finançant malgré tout Ramallah, l’Europe envoie un signal : la transgression est permise.
Les États-Unis, eux, rappellent qu’ils n’en sont pas à leur première mise au point. Déjà dans les années 1970, Henry Kissinger avait fixé des conditions claires au dialogue entre Washington et l’OLP : rejet du terrorisme, reconnaissance des résolutions 242 et 338, et reconnaissance explicite d’Israël. En 1988, après d’âpres négociations, Yasser Arafat dut prononcer à Genève une déclaration condamnant le terrorisme et acceptant la coexistence de « deux États, dont un État juif, Israël ». Ce fut la clé d’ouverture d’un court dialogue avec les États-Unis, vite interrompu lorsque l’OLP apporta son soutien à Saddam Hussein pendant la guerre du Golfe.
Depuis, les mêmes scénarios se répètent. Chaque fois qu’une pression américaine exige un engagement clair, les responsables palestiniens concèdent une déclaration minimale, avant de revenir sur leurs positions fondamentales : rejet de la reconnaissance d’Israël comme État juif, insistance sur la « loi du retour », financement des terroristes et incitation permanente dans les écoles. En 2009 encore, la conférence du Fatah dirigée par Mahmoud Abbas a rejeté publiquement l’idée d’une reconnaissance israélienne, démontrant l’écart entre la façade diplomatique et la réalité politique.
Yemini résume avec amertume : « L’approche actuelle de Washington ne garantit pas la paix. Mais celle de l’Europe, fondée sur la complaisance, la mollesse et la contradiction, l’éloigne à coup sûr. » Tant que Bruxelles continuera à récompenser les violations palestiniennes par des financements et des promesses de reconnaissance, toute chance d’avancer vers une véritable solution à deux États restera illusoire.
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