Emmanuel Macron a réaffirmé avec force son intention de reconnaître un État palestinien aux côtés de l’Arabie saoudite et d’autres partenaires. Dans un message publié le 2 septembre sur X, le président français a averti Israël : « Aucune offensive, tentative d’annexion ou déplacement des populations n’enrayera la dynamique que nous avons créée avec le prince héritier et à laquelle de nombreux partenaires se sont déjà joints. » Le chef de l’État présidera, le 22 septembre, à New York, une conférence sur la « solution à deux États », au siège des Nations unies, aux côtés du prince Mohammed ben Salmane.
Cette annonce, qui survient dans un contexte de vives tensions, intervient alors que des médias israéliens rapportaient que le gouvernement de Benjamin Netanyahou envisageait d’annexer des territoires de Cisjordanie en représailles à la reconnaissance d’un État palestinien. Le bras de fer diplomatique entre Paris et Jérusalem s’intensifie donc, avec en toile de fond un projet dont les contours demeurent extrêmement flous.
Un État « souverain et économiquement viable »
Le texte de référence, adopté à New York le 29 juillet 2025, évoque la création « d’un État de Palestine souverain et économiquement viable vivant côte à côte en paix et en sécurité avec Israël ». Une formule qui reprend les grandes lignes de la solution dite « à deux États », telle qu’elle est régulièrement soutenue par la communauté internationale depuis les accords d’Oslo.
Mais que signifie, dans les faits, ce futur État ? Sera-t-il doté d’une pleine souveraineté ou d’une autonomie limitée sous étroite surveillance sécuritaire ? La question est au cœur du débat.
Les critiques du plan
Pour Rafaëlle Maison, professeur de droit international public à l’université Paris-Saclay, il s’agit d’une reconnaissance qui pourrait tourner à vide. Dans une analyse publiée sur le site Orient XXI, elle souligne que la Déclaration de New York « pourrait sceller l’abandon du droit international concernant la Palestine ». Autrement dit, reconnaître un État palestinien sans exiger la fin de l’occupation israélienne, ni un règlement des frontières, reviendrait à entériner une situation bancale : un État sans réelle souveraineté.
Un tel processus pourrait déboucher sur un « État fantoche », dépourvu d’armée, limité dans ses prérogatives, et chargé avant tout d’assurer la sécurité d’Israël. Les critiques rappellent que la Cour internationale de justice (CIJ) avait demandé en 2024 la fin de l’occupation israélienne, y compris à Gaza. Ne pas en tenir compte reviendrait, selon eux, à bafouer une décision contraignante du droit international.
La position israélienne
Côté israélien, la réaction est sans appel. Le gouvernement Netanyahou dénonce une initiative « unilatérale et dangereuse ». Les rumeurs d’une possible annexion partielle de zones de Cisjordanie témoignent d’une volonté de riposter politiquement à la reconnaissance internationale d’un État palestinien. Pour Jérusalem, une telle reconnaissance, si elle se faisait sans négociations directes, viendrait récompenser un leadership palestinien fragilisé, divisé entre le Hamas et l’Autorité palestinienne.
Les enjeux diplomatiques
La conférence du 22 septembre à l’ONU pourrait marquer un tournant : Paris et Riyad espèrent rallier une coalition de pays européens et arabes en faveur de la reconnaissance. Mais la faisabilité du projet pose question. Quels seront les contours territoriaux de l’État palestinien ? Quid de Jérusalem-Est, revendiquée comme capitale par les Palestiniens, mais considérée par Israël comme partie intégrante de son territoire ?
Pour Benjamin Fiorini, maître de conférences en droit pénal à l’université Paris 8 et secrétaire général de l’association JURDI, « cette reconnaissance risque d’être purement symbolique si elle ne s’accompagne pas de mécanismes concrets garantissant l’effectivité de la souveraineté palestinienne ». En d’autres termes, proclamer un État sans État de droit effectif risquerait de renforcer le cynisme plutôt que la paix.
Le spectre d’un précédent international
L’idée d’un État palestinien « limité » inquiète certains juristes : elle pourrait créer un précédent dans le droit international. Reconnaître un État sans véritable indépendance reviendrait à affaiblir la notion même de souveraineté. Ce serait, selon ses détracteurs, une manière de figer le statu quo en donnant une façade légale à une réalité d’occupation.
De plus, les critiques rappellent que l’histoire regorge d’« États sous tutelle » ou de constructions artificielles qui n’ont jamais permis de résoudre durablement des conflits : du mandat britannique en Palestine au protectorat international sur le Kosovo, ces expériences ont montré leurs limites.
La reconnaissance d’un État palestinien par Emmanuel Macron et ses alliés pourrait bien n’être qu’une avancée symbolique si elle n’est pas accompagnée d’une souveraineté pleine et entière, d’un règlement sur les frontières et d’une véritable fin de l’occupation. Derrière les déclarations de principe, la question fondamentale demeure : parle-t-on d’un État viable ou d’un simulacre destiné à calmer les consciences internationales ?
À New York, le 22 septembre, la France et l’Arabie saoudite entendent imposer une dynamique politique. Mais Israël rappelle que rien ne pourra se faire contre sa volonté. Au final, la question posée par les critiques reste entière : un État palestinien… sans État ?
Rédaction francophone Infos Israel News pour l’actualité israélienne
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