Gadi Eizenkot : « J’accepterai d’être le n°2 de Bennett pour faire tomber Netanyahou »

L’ancien chef d’état-major Gadi Eizenkot annonce une volonté politique qui bouscule l’échiquier israélien : prêt à devenir numéro deux de Naftali Bennett si cela permet d’empêcher le retour ou la permanence de Benjamin Netanyahou au pouvoir. Déclaration choc, geste stratégique — et nouveau symptôme d’une classe politique en recomposition face à la crise nationale.


L’ex-général Gadi Eizenkot, personnalité respectée tant dans l’establishment de défense que dans les cercles politiques, a déclaré il y a quelques heures qu’il accepterait, le cas échéant, d’endosser la fonction de « numéro deux » auprès de Naftali Bennett afin de former une coalition capable d’écarter Benjamin Netanyahou de la direction du pays. La formule est limpide : l’enjeu prime sur l’ambition personnelle.

Cette posture traduit la gravité du constat partagé par une partie importante de l’appareil de sécurité et par des élus de divers horizons politiques : la survie démocratique et la sécurité nationale d’Israël exigent, selon eux, une alternative stable à un leadership jugé incapable de rassembler et d’assurer une stratégie crédible après les secousses récentes. « Si c’est le prix à payer pour remettre le pays sur de bons rails, j’accepte d’être le numéro deux », aurait déclaré Eizenkot, résumant une logique de responsabilité régalienne qui met la nation avant l’ego.

Contexte : de la caserne au jeu politique

Gadi Eizenkot n’est pas un novice de la vie publique. Ancien chef d’état-major de Tsahal, il dispose d’une stature morale et d’un capital de crédibilité importants auprès des forces armées et d’une large frange de l’opinion publique. Sa réputation d’officier pondéré et stratège lui confère une autorité particulière au moment où Israël traverse une période de tensions externes et d’aspérités internes.

Naftali Bennett, lui-même passé d’un positionnement national-religieux à une posture pragmatique centriste pendant son mandat de Premier ministre, incarne une figure susceptible de rassembler des pans hétérogènes du spectre politique. L’idée d’une alliance Bennett–Eizenkot vise à conjuguer légitimité civique, sens de la sécurité et acceptabilité politique.

Réactions : soulagement chez certains, inquiétude chez d’autres

À droite, la perspective d’un rapprochement entre dirigeants non-Netanyahiens suscite d’abord une crispation : pour les partisans de Benjamin Netanyahou, toute coalition anti-Netanyahou est perçue comme illégitime, motivée par des calculs politiciens. À gauche et au centre, en revanche, l’annonce d’Eizenkot est saluée comme un signal fort — la preuve que des figures d’autorité dépassent les querelles partisanes pour préserver la stabilité nationale.

Dans les milieux de la défense, la proposition est accueillie avec prudence mais respectueuse considération : la présence d’un ancien chef d’état-major à la tête d’un gouvernement (ou à sa droite) rassure sur la continuité des décisions stratégiques en temps de guerre. Certains analystes, toutefois, avertissent : confier de hautes responsabilités gouvernementales à des personnalités issues du monde militaire soulève la question de la porosité entre sphère sécuritaire et pouvoir politique.

Enjeux politiques et risques d’une recomposition rapide

Accepter d’être numéro deux est un acte au contenu politique dense. D’abord parce qu’il suppose de renoncer, au moins momentanément, à l’aspiration au fauteuil de Premier ministre — geste rare dans un paysage où l’ambition personnelle guide souvent les réarrangements. Ensuite parce qu’une telle alliance nécessiterait des concessions programmatique et idéologiques : implantation, sécurité, économie, rapport au monde arabe. Or ce sont précisément ces dossiers qui ont fracturé la classe politique ces dernières années.

Sur le plan stratégique, un gouvernement dirigé par Bennett avec Eizenkot en second pourrait offrir une fenêtre de stabilisation : gestion stricte de la sécurité, soutien moral aux forces, et tentative de rétablir la confiance internationale. Mais la viabilité d’une telle coalition dépendra de l’acceptation par des partis clés et, surtout, de la capacité à convaincre les électeurs que l’opération vise l’intérêt national et non un simple renversement de personne.

Pourquoi cette offre est révélatrice

La déclaration d’Eizenkot n’est pas qu’un coup politique : elle révèle un basculement culturel chez certaines élites israéliennes. Face aux crises, une partie du pays privilégie désormais la compétence opérationnelle et la crédibilité sécuritaire sur la pure logique partisane. C’est un signal que, pour une frange significative, la priorité immédiate est de garantir la sécurité et la cohésion nationale — même si cela implique des configurations gouvernementales inédites.

Conclusion — un test pour la politique israélienne

La proposition de Gadi Eizenkot de jouer les seconds rôles pour retirer Benjamin Netanyahou de la scène politique représente un test majeur : celui de la maturité démocratique israélienne. Les prochaines semaines diront si les élites politiques sauront trancher entre calculs d’appareil et intérêt national. Si Bennett et Eizenkot parviennent à traduire ce geste en force politique crédible, Israël pourrait voir naître une alternative capable de dépasser les fractures actuelles. Sinon, l’annonce restera un symbole — puissant, mais sans lendemain.


Rédaction francophone Infos Israel News pour l’actualité israélienne
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