Un nouvel épisode de tension entre l’État israélien et une frange radicale du monde ultra-orthodoxe se prépare. Ce jeudi, le “courant de Jérusalem” (הפלג הירושלמי), mouvement connu pour son opposition farouche à la conscription, a annoncé une série de manifestations simultanées à 17 heures dans tout le pays, en réaction à l’arrestation de l’avrekh (étudiant marié en yeshiva) rabbi Eliyahou Nahoum. Celui-ci a été intercepté par la police routière, puis transféré à la police militaire pour désertion, après plus de deux ans sans s’être jamais présenté au bureau de recrutement.
Les responsables du mouvement dénoncent un “גזירת שמד” – un décret de persécution religieuse – et affirment que Nahoum a été arrêté “בעוון לימוד התורה”, autrement dit pour le seul fait de s’être consacré à l’étude de la Torah. Dans leur communiqué, ils accusent les autorités israéliennes de mener une “התנכלות לשלטון התורה” (campagne de harcèlement contre le monde de l’étude), et appellent les fidèles à descendre en masse dans la rue. Les cinq lieux retenus sont symboliques : l’entrée de Jérusalem, l’axe Giv’at Shmuel–Bnei Brak, Modi’in Illit, Beit Shemesh et Safed.
L’affaire intervient dans un contexte particulièrement sensible. Ces derniers jours, plus de 25 jeunes ultra-orthodoxes ont été arrêtés à l’aéroport Ben-Gourion alors qu’ils tentaient de partir pour Ouman à l’occasion de Roch Hachana. Selon les organisations de soutien, plus de 70 jeunes issus du monde yeshiva se trouvent actuellement incarcérés dans des prisons militaires. Ces arrestations, très médiatisées, galvanisent la base militante du “courant de Jérusalem”, héritier du rabbin Shmuel Auerbach זצ״ל, qui prônait une opposition totale à toute coopération avec Tsahal en matière de service militaire.
La rhétorique utilisée est lourde de symboles : “שלטון הרשע” (le régime du mal), “המערכה הגורלית על נשמת אפה של היהדות החרדית” (la bataille décisive pour l’âme du judaïsme haredi). L’objectif est de présenter les arrestations non comme une simple application de la loi militaire, mais comme une offensive idéologique contre le monde de la Torah. Cette dramatisation vise à mobiliser des foules importantes, avec le risque réel de perturbations majeures du trafic routier et d’affrontements avec les forces de l’ordre.
Pour l’État d’Israël, le défi est double. D’un côté, maintenir l’égalité devant la loi et appliquer la conscription dans un contexte de guerre prolongée, où Tsahal a besoin de toutes ses forces. De l’autre, éviter une escalade intérieure avec une frange qui refuse toute légitimité au service militaire. Cet affrontement met en lumière une fracture persistante : entre une société israélienne mobilisée face aux menaces extérieures et un courant qui revendique l’isolement et la non-participation, au prix d’une radicalisation de plus en plus visible dans l’espace public.
Rédaction francophone Infos Israel News pour l’actualité israélienne
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