Un Hassid de Satmar accusé d’espionnage pour l’Iran : la fracture qui inquiète Israël

La justice israélienne a inculpé Yaakov Perl, 49 ans, accusé d’avoir recueilli et transmis des informations sensibles à des représentants iraniens. L’affaire, qui implique la surveillance présumée du domicile de l’ex-chef d’état-major Herzi Halevi et du dispositif autour du ministre Itamar Ben Gvir, ravive les débats sur la vulnérabilité des institutions et le risque de stigmatisation des communautés religieuses.

La suite des faits est lourde de sens. Le parquet de Tel-Aviv a déposé un acte d’accusation contre Yaakov Perl, citoyen américain détenteur d’un passeport israélien et membre de la mouvance Satmar. Selon l’acte d’accusation, Perl aurait documenté les allées et venues près du domicile de l’ancien chef d’état-major Herzi Halevi et observé le déploiement des forces autour de la résidence du ministre de la Sécurité nationale, Itamar Ben Gvir. En échange, des agents iraniens lui auraient promis des paiements. Les chefs d’accusation retenus — assistance à l’ennemi en temps de guerre, transmission d’informations destinées à nuire à la sécurité nationale et divulgation de données susceptibles d’avantager l’ennemi — témoignent de la gravité imputée aux faits.

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Dans un climat régional déjà tendu, ces révélations aiguillent l’attention des autorités. « Si les faits sont avérés, il s’agit d’une trahison d’une gravité extrême », a déclaré un responsable sécuritaire cité par la presse. La portée potentiellement létale de telles transmissions — fournir à un État ennemi des indications sur les mouvements de responsables de la défense — impose une réponse judiciaire et opérationnelle claire. Les services de renseignement travaillent à reconstituer les modalités de contact et à vérifier l’ampleur des informations transmises.

L’affaire illustre par ailleurs une stratégie iranienne mise en lumière par les agences de contre-espionnage : exploiter des fractures internes, qu’elles soient idéologiques, financières ou communautaires, pour recruter des sources. Téhéran a multiplié ces dernières années tentatives d’infiltration et campagnes d’influence, depuis le cyber jusqu’au terrain humain. L’implication présumée d’un membre de la mouvance Satmar — courant historiquement antisioniste et souvent en marge des structures de l’État — revêt une dimension symbolique particulière qui peut alimenter craintes et discours simplificateurs.

Les réactions politiques et sociales sont vives. Certains médias insistent sur l’hostilité doctrinale de certains groupes antisionistes pour expliquer leur vulnérabilité à l’instrumentalisation étrangère. D’autres appellent à la retenue : l’immense majorité des fidèles reste loyale à Israël et il serait dangereux de transformer un dossier judiciaire en condamnation collective. « Il faut isoler les traîtres, pas stigmatiser des milliers de familles pieuses », a insisté un député de la Knesset, soucieux d’éviter une polarisation accrue.

La dimension communautaire dépasse les frontières d’Israël. En France, où une importante communauté hassidique coexiste avec d’autres courants juifs, l’affaire suscite une double inquiétude : la sécurité d’Israël d’une part, le risque de « hiloul Hachem » — la profanation du Nom — d’autre part. Des responsables religieux interrogés soulignent le préjudice moral que ces dossiers causent à l’image du judaïsme et demandent prudence et nuance dans les jugements publics.

Sur le plan juridique, le dossier s’annonce complexe : auditions, confrontations des preuves matérielles et numériques, vérification des flux financiers allégués. La sensibilité des informations peut contraindre la tenue partielle de procédures à huis clos afin de préserver des sources et méthodes. La défense pourra contester la matérialité des faits ou invoquer d’autres motivations, mais l’accumulation des éléments présentés par le parquet laissera présager une bataille juridique serrée.

Au-delà du tribunal, l’enjeu est sociétal : comment concilier fermeté face à l’ingérence étrangère et protection des libertés civiles, sans céder aux amalgames ? Israël, fracturé par des tensions politiques et religieuses, doit éviter que la peur n’entretienne des divisions utiles à ses ennemis. La vigilance reste de mise : services, institutions et leaders communautaires doivent collaborer pour identifier les risques, protéger les cibles potentielles et restaurer la confiance entre communautés sans céder à la peur ni aux généralisations abusives, préserver la cohésion nationale.


Rédaction francophone Infos Israel News pour l’actualité israélienne
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