Des dizaines de milliers d’Iraniens ont envahi ce mardi les rues de Téhéran et d’autres grandes villes à l’occasion du 46e anniversaire de la prise d’otages de l’ambassade américaine en 1979. Les cortèges, encadrés par les Gardiens de la Révolution, ont pris cette année un ton ouvertement belliqueux : effigies brûlées de Benjamin Netanyahou et de Donald Trump, appels à la vengeance contre Israël, et menaces de relancer à plein régime le programme nucléaire du pays.
Sous des banderoles “Mort à Israël, mort à l’Amérique”, les manifestants ont défilé en brandissant des missiles en carton, des drapeaux iraniens géants et des portraits de l’ayatollah Ali Khamenei. Le régime a orchestré un “tribunal symbolique” dans lequel des figurants représentant le Premier ministre israélien et le président américain ont été “jugés” pour crimes de guerre. Les médias d’État ont salué ce qu’ils appellent une “démonstration d’unité contre l’ennemi sioniste et l’impérialisme occidental”.
Le timing n’est pas anodin. Ces manifestations surviennent quelques semaines après les frappes massives d’Israël et des États-Unis contre les sites militaires iraniens, menées en représailles aux attaques contre des bases israéliennes dans le Néguev. Pour le régime des mollahs, il s’agit de reprendre l’initiative sur le plan intérieur, en galvanisant la population par un discours nationaliste et victimaire.
Lors de son discours à la télévision nationale, l’ayatollah Ali Khamenei a directement visé Washington :
“Aucune négociation n’est possible tant que les États-Unis soutiennent Israël et maintiennent leurs bases au Moyen-Orient. Ceux qui rêvent de coopération se trompent : l’Iran ne fléchira jamais.”
Le président Massoud Pezeshkian a enfoncé le clou lors d’une visite au siège de l’Organisation de l’énergie atomique iranienne. “Nous reconstruirons nos installations nucléaires, plus solides et plus avancées qu’avant. Le savoir est entre nos mains, et aucune bombe ne pourra le détruire.” Selon lui, la reprise du programme nucléaire est “un devoir national” destiné à “protéger la souveraineté de la République islamique”.
Ces déclarations surviennent alors que des images satellites récentes, publiées par la société américaine MAXAR, confirment des travaux d’excavation autour du site de Natanz, partiellement détruit par les frappes israéliennes de juin dernier. Officiellement, Téhéran parle de “travaux de déblaiement”. Officieusement, les experts du renseignement évoquent un redémarrage clandestin des centrifugeuses, sous la supervision de techniciens revenus de Chine malgré les sanctions onusiennes.
Le chef de la diplomatie iranienne, Abbas Araghchi, a pour sa part admis que le stock d’uranium enrichi à 60 % “reste enfoui sous les ruines” et que les ingénieurs “attendront les bonnes conditions” pour le remettre en service. Des propos ambigus qui ont aussitôt déclenché l’inquiétude de l’AIEA (Agence internationale de l’énergie atomique). Son directeur, Rafael Grossi, a réaffirmé que “l’Iran continue de dissimuler des activités sensibles contraires à l’accord de Vienne de 2015”.
L’événement de ce jour, plus encore que les slogans, témoigne d’un changement de cap à Téhéran : face à son affaiblissement militaire, le régime renoue avec les démonstrations de masse pour masquer ses vulnérabilités internes. Dans les rues, les forces du Bassidj encadrent la foule, veillant à ce qu’aucun signe de contestation n’émerge. Les images diffusées sur les chaînes d’État montrent une ferveur fabriquée, plus qu’un élan populaire.
Pour Israël, ces démonstrations sont loin d’être anodines. Elles rappellent que malgré la destruction d’une partie de son infrastructure nucléaire, l’Iran demeure une menace idéologique et stratégique, capable de rallier autour de lui les milices du Hezbollah, des Houthis et des forces pro-iraniennes en Syrie et en Irak.
Au-delà de la propagande, ces manifestations sont aussi un message à Washington : Téhéran n’acceptera aucune tutelle occidentale, fût-elle diplomatique. En brûlant les portraits de Trump et de Netanyahou côte à côte, les mollahs veulent signifier que la nouvelle alliance israélo-américaine – forgée à la fois dans les airs de Gaza et dans les couloirs de l’ONU – est désormais leur ennemi commun.
À Téhéran, la haine se veut spectaculaire. Mais derrière les cris et les flammes, c’est une autre réalité qui se dessine : celle d’un régime affaibli, replié sur lui-même, qui n’a plus que la rue et la rage pour masquer ses échecs militaires.
Rédaction francophone Infos Israel News pour l’actualité israélienne
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