L’Iran appelle à un affrontement direct avec Israël après l’élimination de Haithemm Ali Tabatabai

Le régime iranien semble avoir franchi un nouveau seuil dans sa rhétorique belliqueuse. Au lendemain de l’élimination ciblée, attribuée à Israël, du numéro deux militaire du Hezbollah, Haithemm Ali Tabatabai, dans la banlieue sud de Beyrouth, Ali Larijani, secrétaire du Conseil suprême de la sécurité nationale iranienne, a publiquement appelé à un “affrontement direct avec Israël”. Cette déclaration, diffusée en arabe sur X, révèle une nervosité croissante à Téhéran, où la déroute stratégique subie ces dernières semaines — frappes répétées contre des cadres du Hezbollah, effondrement de l’équilibre militaire au Liban, paralysie du “front nord” — met le régime face à ses propres limites.

Larijani a présenté la mort de Tabatabai comme un “martyre souhaité”, tout en accusant le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu de pousser la région au point où “il ne restera plus d’autre option qu’un affrontement direct avec la fausse entité”. Cette rhétorique, déjà employée par Téhéran à d’autres moments de tension, se distingue cette fois par son contexte : l’élimination d’un des plus hauts stratèges militaires du Hezbollah, un homme décrit par Tsahal comme le chef du réseau militaire de l’organisation terroriste et comme le dernier cadre majeur issu de la génération fondatrice du mouvement chiite.

Le Hezbollah lui-même a confirmé que Tabatabai avait été tué aux côtés de quatre membres de son unité dans une frappe au cœur de la Dahieh, bastion du mouvement au sud de Beyrouth. Selon la chaîne libanaise Al-Manar et des dépêches de Reuters, 28 autres personnes ont été blessées. Du côté israélien, le porte-parole de Tsahal a salué un “ciblage précis d’un cadre très haut placé”, rappelant que Tabatabai avait été un acteur clé de l’expansion militaire du Hezbollah en Syrie et un ancien commandant de la force Radwan, l’unité d’élite chargée d’infiltrer le territoire israélien en cas de guerre.

Face à cet événement majeur, les réactions iraniennes ont été multiples, parfois contradictoires. Une source proche du Hezbollah citée anonymement par AFP a confirmé qu’un débat interne était en cours : une partie du mouvement souhaite une riposte immédiate, tandis que d’autres responsables préconisent pour l’instant « toutes les voies diplomatiques possibles ». Ce désaccord interne témoigne de l’état de fragilité stratégique dans lequel se trouve le Hezbollah, affaibli par une série de frappes qui ont éliminé plusieurs de ses plus hauts commandants opérationnels en quelques mois.

La figure la plus virulente à Téhéran a été Mohsen Rezaei, ancien commandant des Gardiens de la Révolution et influent membre du Conseil de discernement du régime iranien. Lors d’un discours prononcé à Kerman, ville natale de Qassem Soleimani, Rezaei a accusé Israël de croire qu’elle peut “imposer son agenda par les assassinats”, tout en affirmant que “chaque commandant éliminé rapproche Israël de sa disparition”. Rezaei a exhorté le Hezbollah à reconsidérer sa politique de “patience stratégique”, estimant que l’État israélien exploite cet attentisme pour intensifier ses opérations préventives.

Ces déclarations s’inscrivent dans une séquence plus large : l’Iran, très affaibli par l’échec de sa stratégie de pression multitiraille, multiplie les menaces verbales tout en évitant pour l’instant une confrontation ouverte. L’élimination de Tabatabai s’ajoute aux frappes successives contre des cellules iraniennes en Syrie, à la destruction de dépôts d’armements stratégiques, et à la neutralisation d’opérations transfrontalières planifiées. Sur le plan diplomatique, Téhéran tente pourtant de projeter une image d’unité et de force, arguant que “l’axe de la résistance” serait aujourd’hui “plus puissant qu’à l’époque d’Hassan Nasrallah”. Rezaei affirme même que la guerre psychologique israélienne vise à masquer l’“effondrement moral” de Tel-Aviv — argument que l’on retrouve régulièrement dans la propagande iranienne depuis des années.

Mais si les mots sont durs, la réalité est plus complexe. Selon plusieurs analystes relayés par la presse arabe, Téhéran se retrouve dans un dilemme stratégique : répondre militairement risque de déclencher une escalade régionale qu’il n’est pas certain de pouvoir soutenir, tandis que l’absence de réponse affaiblit son image auprès des factions qu’il finance et arme, du Liban au Yémen en passant par Gaza. L’élimination de Tabatabai, l’une des personnes les plus protégées du Hezbollah, montre que les services de renseignement israéliens ont atteint une pénétration opérationnelle extrêmement profonde dans l’appareil militaire du mouvement, ce qui inquiète ouvertement les dirigeants iraniens.

Le contexte libanais ajoute une couche de complexité supplémentaire. Le pays, déjà en crise structurelle, redoute une guerre ouverte d’une ampleur comparable à celle de 2006, mais avec des capacités militaires israéliennes infiniment supérieures. La population chiite du sud-Liban, traditionnellement soutien du Hezbollah, exprime désormais des signes de lassitude dans de nombreux reportages publiés dans les médias arabes. Des familles craignent un conflit total qui dévasterait leurs villages tandis que le leadership du Hezbollah se trouve contraint d’afficher une posture martiale malgré un rapport de force de plus en plus défavorable.

En Israël, la réaction a été sobre mais déterminée : Tsahal rappelle que Tabatabai était responsable de la planification d’attaques contre des civils israéliens et qu’il menait les opérations d’infiltration en Syrie, notamment les tentatives de déploiement de forces à proximité du Golan. L’armée israélienne voit dans cette élimination l’une des opérations les plus significatives depuis le début du cycle de confrontation avec l’Iran et ses proxys. L’exécutif israélien, soutenu par l’administration du président Trump, considère ces frappes ciblées comme un moyen de réduire progressivement la capacité offensive du Hezbollah sans entrer dans une guerre totale — un équilibre délicat mais efficace jusqu’à présent.

Au sein de l’axe pro-iranien, certains responsables tentent pourtant de présenter la mort de Tabatabai comme un catalyseur de mobilisation populaire. Rezaei, lors de son discours, a ainsi insisté sur le fait que ces commandants « appartiennent aux peuples opprimés », une manière de transposer la lutte iranienne vers une dimension transnationale. Mais cette rhétorique — largement diffusée sur les chaînes d’État iraniennes — ne parvient plus à masquer l’évidente fragilité opérationnelle du Hezbollah.

Sur le terrain, c’est l’équilibre sécuritaire de tout le Moyen-Orient qui se voit de nouveau ébranlé. Le risque d’escalade existe, mais la posture iranienne reste pour l’instant davantage verbale que militaire. Les déclarations de Larijani sur X semblent moins annoncer un affrontement imminent qu’une tentative de restaurer une dissuasion perdue. Pour Israël, la ligne reste claire : empêcher le Hezbollah de reconstituer ses capacités, maintenir la pression sur ses cadres, et neutraliser toute tentative de transfert d’armes stratégiques financées par Téhéran. Ce jeu d’équilibriste pourrait redessiner les rapports de force dans les mois à venir, alors que les acteurs régionaux évaluent leurs marges de manœuvre.

Dans ce climat de tension croissante, une question demeure : jusqu’où l’Iran peut-il aller sans risquer une confrontation directe qu’il tente justement d’éviter ? Tant que Téhéran continue de perdre sur le terrain tout en se contentant de menaces verbales, le régime risque d’apparaître affaibli aux yeux de ses propres alliés. Israël, lui, a démontré une fois de plus sa capacité à atteindre ses ennemis là où ils se sentaient intouchables. Et c’est peut-être ce message, plus que tout autre, qui redéfinit désormais les règles du jeu.


Rédaction francophone Infos Israel News pour l’actualité israélienne
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