Guerre de l’Eurovision : la rébellion s’intensifie au Portugal ; l’Italie exige de ne pas diffuser le concours.

À moins de cinq mois de l’Eurovision 2025, prévu à Vienne, le concours musical le plus suivi d’Europe est confronté à une crise politique et idéologique d’une ampleur rarement observée dans son histoire récente. Bien que l’Union européenne de radio-télévision (UER) ait confirmé officiellement la participation d’Israël, une vague de contestations secoue plusieurs pays, notamment le Portugal et l’Italie, mettant en lumière la politisation croissante d’un événement censé rester culturel et apolitique.

Au Portugal, la situation a pris une tournure spectaculaire. Sur les seize artistes sélectionnés pour le Festival da Canção, qui désigne le représentant portugais à l’Eurovision, treize ont annoncé publiquement qu’ils refuseraient de se rendre à Vienne en cas de victoire. Cette position, assumée et coordonnée, constitue un précédent : jamais une majorité aussi écrasante de candidats nationaux n’avait boycotté par avance une participation à l’Eurovision. Les artistes justifient leur décision par une opposition déclarée à la présence israélienne, qu’ils associent directement à la guerre en cours au Moyen-Orient.

Face à cette fronde, le diffuseur public portugais RTP a tenté de calmer le jeu. La direction a rappelé que la participation au concours relevait d’un engagement institutionnel déjà validé, indépendamment des positions personnelles des artistes. RTP a confirmé que le processus de sélection se poursuivrait normalement et que, quel que soit le vainqueur, le Portugal serait officiellement représenté à l’Eurovision. En coulisses, cependant, la situation est explosive : un refus de l’artiste sélectionné placerait le diffuseur dans une position délicate, juridiquement et financièrement.

En Italie, la contestation prend une forme différente mais tout aussi révélatrice du malaise européen. Une pétition initiée par plusieurs dizaines d’employés du diffuseur public RAI appelle la direction à se retirer purement et simplement de l’Eurovision 2025, voire à refuser de retransmettre l’événement. Les signataires affirment que la diffusion du concours constituerait, selon eux, une forme de normalisation inacceptable de la participation israélienne. Bien que minoritaire, ce mouvement bénéficie d’un fort écho médiatique dans un pays où la question israélo-palestinienne divise profondément l’opinion publique.

Ces initiatives surviennent dans un contexte déjà tendu. La date limite officielle pour se retirer de l’Eurovision est désormais dépassée, ce qui signifie que tout retrait tardif entraînerait des pénalités financières importantes pour les diffuseurs concernés. À ce stade, cinq pays ont déjà annoncé leur retrait officiel de la compétition, réduisant le nombre de participants à environ 35, un chiffre exceptionnellement bas pour une édition anniversaire du concours, qui célèbre cette année sa 70ᵉ édition.

L’impact de ces retraits dépasse le symbole politique. Sur le plan logistique, les organisateurs redoutent une réorganisation des demi-finales, voire une modification du format de la finale. Sur le plan financier, la situation est tout aussi préoccupante : certains pays ayant quitté la compétition figuraient parmi les contributeurs majeurs au budget global, ce qui risque d’alourdir la charge pour les diffuseurs restants et pour la ville hôte, Vienne.

Pour l’UER, la ligne officielle demeure inchangée. L’organisation rappelle que l’Eurovision est une compétition entre diffuseurs publics, non entre gouvernements, et que les règles s’appliquent de manière identique à tous les participants. Israël, membre de l’UER depuis des décennies, respecte le règlement et ne peut être exclu pour des raisons politiques sans remettre en cause les fondements mêmes du concours. En interne, toutefois, la direction de l’UER reconnaît que la pression exercée par certains milieux militants atteint un niveau inédit.

En Israël, cette hostilité européenne est perçue comme une nouvelle illustration de l’isolement diplomatique et culturel auquel le pays est confronté depuis le déclenchement de la guerre. Les responsables israéliens soulignent que l’Eurovision n’a jamais exclu d’autres pays engagés dans des conflits armés, dénonçant ce qu’ils considèrent comme un double standard évident. La délégation israélienne, de son côté, poursuit sa préparation en affirmant vouloir se concentrer exclusivement sur la musique et la performance artistique.

Au-delà du cas israélien, la crise actuelle pose une question plus large : l’Eurovision peut-elle encore prétendre être un espace neutre dans un continent profondément polarisé ? L’édition 2025 s’annonce déjà comme l’une des plus politisées de l’histoire du concours. À Vienne, sur scène comme en coulisses, la musique risque une nouvelle fois d’être reléguée au second plan, au profit d’un affrontement idéologique qui dépasse largement le cadre du spectacle.


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