Un animateur de Galei Tsahal fait l’éloge du réalisateur anti-israélien Mohammad Bakri, la station prend ses distances

Une vive polémique a éclaté ce mercredi autour de la radio militaire israélienne Galei Tzahal, après qu’un animateur a tenu à l’antenne des propos élogieux sur le réalisateur et acteur arabe-israélien Mohammad Bakri, connu pour ses positions radicalement anti-israéliennes et pour son film controversé Jenin, Jenin. La direction de la station s’est rapidement désolidarisée de ces déclarations, affirmant qu’elles « ne reflètent en aucun cas la position de la radio ».

Lors d’une émission diffusée en direct, l’animateur a annoncé la mort de Bakri en le qualifiant d’« acteur aimé et extraordinaire » et de « l’un des plus grands », allant jusqu’à adresser « une immense accolade à la famille Bakri ». Ces propos ont immédiatement suscité l’indignation de responsables politiques et d’une partie de l’opinion publique, choqués qu’une radio de l’armée israélienne rende hommage à une figure associée à de virulentes campagnes de délégitimation de Tsahal à l’étranger.

Le député Avichai Boaron a réagi avec virulence, estimant que cet épisode démontrait précisément pourquoi, selon lui, il faudrait fermer la station. Il a rappelé que Mohammad Bakri était le réalisateur ayant présenté les soldats de Tsahal comme des criminels de guerre, et que la justice israélienne l’avait condamné à verser des indemnisations à des soldats pour diffamation. Les tribunaux avaient alors jugé que son film contenait « des mensonges et des inventions », constituant une « diffamation ciblée » des combattants israéliens. Boaron a également souligné les propos de Bakri assimilés à un discours de négation de la Shoah, affirmant que « personne n’avait vérifié la version des Allemands ».

Le ministre des Communications Shlomo Karhi a, lui aussi, condamné fermement les propos tenus à l’antenne. Dans une déclaration incendiaire, il a accusé « la maison des soldats » de faire l’éloge « de l’un des plus grands soutiens du terrorisme », rappelant que Bakri avait qualifié toute normalisation avec « l’ennemi sioniste » de trahison et était responsable, selon lui, de « l’un des films les plus antisémites et anti-sionistes jamais produits ». Karhi a ajouté que les soldats israéliens n’auraient bientôt « plus à avoir honte de leur maison », laissant entendre un changement profond à venir dans la ligne éditoriale de la station.

Face à la tempête, la direction de Galei Tzahal a publié un communiqué officiel cherchant à apaiser la controverse. La radio explique qu’il s’agissait d’« une remarque dite de manière spontanée par un animateur de magazine, en direct, au moment où il découvrait l’information ». Selon la station, l’animateur se serait référé uniquement au travail artistique de Bakri en tant qu’acteur de théâtre et de cinéma, sans tenir compte de « l’ensemble de son parcours et de ses prises de position ». Après un échange avec la direction, l’animateur aurait exprimé ses regrets sur la formulation employée. La radio insiste : « Cette déclaration ne reflète pas la position de la station », précisant que d’autres programmes ont abordé le sujet de manière critique, en rappelant notamment le rôle de Bakri dans la diffamation de soldats de Tsahal.

La controverse ravive un débat ancien autour de la place de Galei Tzahal dans le paysage médiatique israélien et de sa mission en tant que radio militaire financée par l’État. Elle remet également sur le devant de la scène le parcours extrêmement clivant de Mohammad Bakri, qui avait suscité une indignation internationale avec Jenin, Jenin, film interdit puis réautorisé avant d’être à nouveau banni à la suite d’actions en justice. Bakri s’était aussi distingué par des déclarations accusant à la fois Adolf Hitler et David Ben Gourion de la création de l’État d’Israël, et par des interviews accordées à des médias proches du Hezbollah, dénonçant Israël comme une « entité raciste et oppressive ».

Au-delà de l’incident radiophonique, cette affaire illustre une fracture profonde au sein de la société israélienne sur la liberté d’expression, les limites de la critique artistique et la responsabilité particulière des médias liés à l’armée dans un contexte de guerre et de tension nationale permanente.