La mort politique de Brigitte Bardot : l’icône du cinéma français devenue symbole de fracture nationale

La disparition de Brigitte Bardot, décédée à l’âge de 91 ans dans sa maison du sud de la France, a immédiatement ravivé une fracture politique profonde au sein de la société française. Si le monde entier se souvient d’elle comme d’une icône absolue du cinéma des années 1950 et 1960, incarnation d’une liberté sensuelle et d’un art de vivre à la française, son héritage politique, lui, demeure explosif. Pour une partie du pays, Bardot restera à jamais la star de Et Dieu… créa la femme. Pour une autre, elle incarne une figure controversée, associée à des prises de position radicales contre l’immigration et l’islam, qui lui ont valu condamnations judiciaires et isolement médiatique.

Propulsée au rang de mythe dès 1956, Brigitte Bardot a tourné dans près de cinquante films avant de quitter définitivement le cinéma en 1973. Elle a ensuite consacré sa vie à la défense des animaux, un combat qui lui a assuré un soutien international durable. Mais à partir des années 1990, son engagement public a pris une tournure radicalement différente, marquée par une dénonciation virulente de ce qu’elle appelait « l’islamisation de la France » et « l’invasion migratoire ».

Bardot s’est illustrée par des déclarations d’une extrême violence verbale, visant principalement les musulmans. Elle dénonçait notamment les rites de l’Aïd al-Adha, affirmant que « l’abattage des moutons souillera la terre de France », avant d’ajouter que les musulmans « égorgent des femmes, des enfants, nos moines, nos fonctionnaires, nos touristes ». L’une de ses phrases les plus reprises reste cet avertissement glaçant : « Un jour, nous aussi, nous serons égorgés ». Ces propos lui ont valu, au cours du dernier tiers de sa vie, cinq condamnations judiciaires pour incitation à la haine raciale.

Dans ses livres et tribunes, Bardot affirmait que ses ancêtres avaient « donné leur vie pendant des siècles pour repousser les envahisseurs » et mettait en garde contre une « infiltration souterraine dangereuse de l’islam ». Elle n’hésitait pas à employer le vocabulaire de la conquête et de la guerre culturelle, comparant l’évolution démographique à une invasion. Ses attaques ne se limitaient pas aux musulmans : elle avait également tenu des propos méprisants envers les habitants de l’île de La Réunion, qualifiés de « barbares », renforçant son image de figure clivante et provocatrice.

Son rapprochement avec l’extrême droite française a été assumé sans détour. Dès les années 1990, Bardot est devenue une alliée fidèle de Jean-Marie Le Pen, qu’elle décrivait comme un homme « charmant » et lucide face à « l’explosion terrifiante de l’immigration ». Son époux, Bernard d’Ormale, était lui-même un conseiller politique de cercles d’extrême droite. Plus tard, Bardot a transféré son soutien à Marine Le Pen, qu’elle a soutenue lors des présidentielles de 2012 et 2017. Elle la qualifiait de « seule femme qui a des tripes » et de « Jeanne d’Arc moderne », espérant qu’elle puisse « sauver la France ».

Dans ses derniers écrits, Bardot affirmait que le camp incarné par les Le Pen constituait « le seul remède » aux souffrances d’une France qu’elle jugeait « triste, soumise, malade, ruinée et vulgaire ». Elle se disait toutefois prête à coopérer avec tout responsable politique défendant les animaux, allant jusqu’à louer certaines positions du leader d’extrême gauche Jean-Luc Mélenchon sur le végétarisme, malgré ses positions ouvertement hostiles à Israël.

À l’annonce de sa mort, les réactions ont été révélatrices de cette polarisation. Les figures du Rassemblement national ont été parmi les premières à lui rendre hommage. Marine Le Pen a salué une Française « libre, indomptable et entière », tandis que Jordan Bardella a évoqué la disparition d’une « patriote passionnée ». À l’inverse, une grande partie de la gauche est restée silencieuse ou critique, certains dénonçant une « figure cynique », capable de s’émouvoir du sort des dauphins tout en restant « indifférente à la mort de migrants noyés en Méditerranée ».

Le président Emmanuel Macron, figure centriste, a tenté une synthèse délicate, rendant hommage à l’icône culturelle tout en évitant soigneusement toute référence à ses prises de position politiques. Il a salué « une légende du cinéma du XXᵉ siècle », symbole de liberté et de rayonnement universel, incarnant selon lui « un destin français à l’éclat mondial ».

La question d’un hommage national reste controversée. Certains responsables politiques ont proposé des funérailles d’ampleur comparable à celles de Johnny Hallyday, tandis que d’autres s’y opposent fermement, estimant que ses propos et ses condamnations judiciaires rendent impossible une célébration consensuelle.

Avec la mort de Brigitte Bardot, la France ne perd pas seulement une star du grand écran, mais se retrouve face à un miroir brutal de ses propres divisions. Icône de liberté pour les uns, figure de radicalisation et de rejet pour les autres, Bardot laisse derrière elle un héritage paradoxal, à la fois culturellement glorieux et politiquement explosif. Sa disparition consacre ce que beaucoup décrivent déjà comme sa « mort politique » : celle d’une légende dont le nom continuera longtemps à susciter admiration, colère et malaise.


Rédaction francophone Infos Israel News pour l’actualité israélienne
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