Tandis que le pays affronte une guerre existentielle, un autre front, plus discret mais tout aussi explosif, fait rage au cœur de la société israélienne : celui des trahisons conjugales. Des liaisons clandestines aux escapades tarifées, le « marché de l’adultère » israélien brasse des centaines de millions de shekels chaque année, alimentant une économie parallèle faite de motels discrets, d’applis codées, de détectives privés, de cadeaux hors de prix et de divorces sanglants.
Depuis le déclenchement de l’opération « Épées de fer », les cabinets de psychologues conjugaux enregistrent une hausse notable des demandes d’aide pour cause de trahison. Le stress de la guerre, l’absence prolongée des conjoints appelés en milouim, la charge mentale des femmes restées seules à la maison : autant de déclencheurs d’un phénomène aussi vieux que le couple lui-même, mais désormais monétisé à grande échelle.
Car au-delà du drame personnel, l’infidélité est devenue une industrie. Les chiffres sont vertigineux. Selon une estimation basée sur les données des tribunaux rabbiniques, en 2024, 11 542 divorces ont été enregistrés, dont près de la moitié – environ 5 300 – auraient pour origine une trahison conjugale. Ce chiffre ne prend même pas en compte les couples non mariés religieusement ou les unions « modernes », pourtant tout aussi exposées aux ruptures infidèles.
Autour des amants et maîtresses gravitent toute une chaîne d’acteurs économiques : hôtels et motels facturant plusieurs centaines de shekels de l’heure, applications « discrètes », smartphones secrets, lingerie fine et bijoux de luxe. Selon une étude de VoucherCloud, les infidèles dépenseraient en moyenne 5 300 $ par an pour entretenir leur double vie. Et ce chiffre ne comprend pas encore les frais judiciaires, les cabinets de détectives ou les heures passées à surveiller le téléphone du partenaire.
Une chambre, deux corps et quelques milliers de shekels
« Il existe en Israël un segment bien particulier d’hôtellerie à l’heure », confirme Eran Agay, propriétaire de plusieurs établissements à Tel-Aviv. « Nos clients réservent souvent pour deux ou trois heures, et il est clair qu’on ne parle pas de tourisme religieux. » Les sites spécialisés, agissant comme des sortes de « Booking.com de la trahison », permettent même de réserver anonymement, en payant en espèces. Certaines suites de luxe peuvent atteindre plusieurs milliers de shekels la nuit, quand il ne s’agit pas d’un simple “plan rapide” à 300 NIS de l’heure dans un zimmer à Ramla.
À cela s’ajoute le volet sentimental de l’économie : cadeaux de réconciliation, bijoux offerts par les amants, voyages romantiques déguisés en séminaires d’entreprise… La culpabilité, elle aussi, est monétisée. Et plus l’adultère dure, plus les infidèles deviennent négligents, comme l’explique l’avocat spécialiste du droit de la famille, Maître Ohad Hofman : « Quand une liaison devient régulière, les dépenses gonflent. L’infidélité devient une sorte de seconde vie avec ses propres coûts. »
Les victimes ? Elles paient aussi. Très cher.
Mais l’économie de l’infidélité ne s’arrête pas là. Les conjoints trompés, eux aussi, alimentent la machine : achat de caméras espions, logiciels de traçage GPS, heures de travail perdues à surveiller des stories Instagram ou des relevés de carte bleue, et bien sûr les honoraires d’avocats et d’enquêteurs privés. Le cabinet Quentin Investigations facture par exemple 12 000 shekels pour 30 heures de filature.
Et attention : les preuves collectées ne se limitent plus à l’acte charnel. Comme le rappelle Hofman, la justice s’intéresse aussi aux dépenses effectuées avec l’argent du ménage. Si un époux achète des bijoux ou même une voiture à sa maîtresse, il peut être contraint par le tribunal de restituer la valeur de ces biens au patrimoine familial commun. Dans certains cas, des conjoints ont découvert l’existence de comptes secrets servant à financer des cadeaux, voire des loyers pour des appartements réservés à la liaison.
Quand le cœur trahit, le portefeuille saigne
À la douleur morale s’ajoute ainsi un gouffre financier. Un divorce « standard » peut coûter environ 150 000 NIS par partie. Pour un litige plus complexe avec enquête, guerre d’avocats et demande de pension, la facture grimpe facilement à plusieurs millions. Et dans 25 % des cas, même les meilleurs juges et thérapeutes ne parviennent pas à sauver le couple.
Dans certains cas, la vengeance l’emporte : une femme septuagénaire a demandé le divorce après avoir retrouvé une photo de son mari enlacé avec une ancienne camarade de lycée – une « infidélité émotionnelle » vieille de 50 ans, mais suffisante à ses yeux pour rompre.
L’adultère : symptôme ou cause ?
Le professeur Yoram Yovel, psychiatre et chercheur en neurosciences, remet pourtant les choses en perspective : « La trahison n’est souvent qu’un symptôme. Le vrai problème, c’est la perte de connexion. Quand deux conjoints cessent de se poser des questions, de partager de l’intérêt mutuel, la distance s’installe. L’adultère n’est qu’un signal d’alarme. »
Pourtant, malgré cette analyse, l’économie de l’adultère ne fait que croître. Pourquoi ? Parce qu’elle répond à un besoin. Il y a une offre, une demande, et un marché. Même dans les périodes de crise comme les guerres, les couples n’explosent pas par paix retrouvée, mais par manque de moyens pour divorcer. Les experts s’accordent à dire qu’après la guerre, le taux de divorce montera en flèche.
Le business de la trahison, miroir d’une société en crise
L’Israélien moderne veut tout : la stabilité familiale, la passion d’un flirt, l’amour des enfants et le frisson d’une double vie. Et ce cocktail, aussi hypocrite soit-il, fait tourner une économie grise que personne ne veut vraiment réguler. Une société qui banalise la trahison tout en sanctifiant l’amour, qui condamne l’adultère au tribunal mais le romantise dans les séries Netflix.
Mais à ceux qui croient que « ce n’est qu’une erreur » ou « un coup de folie », il faut rappeler : une nuit d’égarement peut coûter plus cher qu’un appartement à Tel-Aviv. L’amour, lui, reste gratuit. La trahison, elle, laisse des factures.
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