Affaire Zini : quand le père du futur chef du Shin Bet est convoqué par la police — malaise politique à Jérusalem

L’affaire secoue le sommet de l’appareil sécuritaire israélien à peine quelques heures après l’officialisation du futur chef du Shin Bet. Selon le journaliste Amit Segal, un policier s’est présenté hier soir au domicile de la famille Zini, à Ashdod, afin de demander au père de David Zini — général de réserve et prochain patron du service de sécurité intérieure — de l’accompagner pour une audition. Motif présumé : certaines déclarations incendiaires attribuées à l’octogénaire, notamment l’appel provocateur selon lequel « la Cour suprême devrait exploser ».

Le patriarche de la famille Zini, âgé de 80 ans, a refusé de se rendre à cette convocation inopinée. L’incident soulève des interrogations lourdes de conséquences : pourquoi une telle démarche intervient-elle précisément à ce moment, alors que son fils est au centre de l’attention médiatique et politique avec sa nomination au poste le plus sensible de la sécurité intérieure ?

Segal, qui a révélé l’affaire sur ses canaux, souligne le caractère « grossier et transparent » du timing : « Après un geste aussi brutal envers un vieil homme, quelqu’un peut-il encore croire que nous avons affaire à la police de Ben Gvir ? » écrit-il, insinuant que la manœuvre porte l’empreinte de pressions politiques ou institutionnelles.

En principe, l’ouverture d’une enquête pour incitation à la violence n’est pas une décision qu’un simple policier de quartier prendrait de sa propre initiative. L’autorisation doit provenir d’échelons plus élevés, voire de l’appareil judiciaire. Or, dans ce cas précis, la conseillère juridique du gouvernement et le parquet de l’État nient toute implication ou instruction. Ce jeu de dénégations renforce la zone d’ombre : qui a donné le feu vert ?

Le dossier est explosif à double titre. D’un côté, il touche à la liberté d’expression d’un citoyen âgé, même si ses propos sont jugés extrêmes et condamnables. De l’autre, il s’inscrit dans une atmosphère où chaque geste institutionnel autour de la nomination de Zini est scruté à la loupe, et où la méfiance entre l’opinion publique, la police et les élites juridiques ne cesse de croître.

Certains y voient une tentative de fragiliser indirectement le futur chef du Shin Bet, en jetant une ombre sur son entourage familial. D’autres estiment qu’il s’agit simplement d’un excès de zèle bureaucratique, amplifié par la coïncidence avec un calendrier hautement sensible. Quoi qu’il en soit, le malaise est bien réel : quand l’appareil sécuritaire et judiciaire s’entrelace avec les batailles politiques, c’est toute la confiance citoyenne qui s’érode.

La réaction du gouvernement est désormais attendue. Benjamin Netanyahou, qui a validé le choix de Zini, n’a pas encore commenté publiquement cette « mini-crise ». Israël Katz, ministre de la Défense, avait jusqu’ici salué la nomination comme « un gain majeur pour la sécurité nationale ». Mais l’affaire du père convoqué pourrait rouvrir le débat : dans quelle mesure la sphère familiale d’un dirigeant sécuritaire doit-elle peser sur sa légitimité ?

En filigrane, une question plus fondamentale apparaît : l’État hébreu est-il en train de glisser vers une criminalisation des propos outranciers, même lorsqu’ils sont prononcés par des individus sans responsabilité publique directe ? Ou bien assiste-t-on à un règlement de comptes institutionnel, masqué sous la bannière de la lutte contre l’incitation ?

Pour l’heure, la seule certitude est que l’incident ajoute une couche de tension à une période déjà marquée par les débats houleux sur le rôle de la Cour suprême, l’équilibre entre pouvoir judiciaire et exécutif, et la place du Shin Bet dans le système démocratique israélien.


Rédaction francophone Infos Israel News pour l’actualité israélienne
© 2025 – Tous droits réservés