AlgĂ©rie : Leçon d’histoire pour le dĂ©putĂ© PS du 93 Goldberg, qui ose demander Ă  Hollande de s’excuser

 

En écrivant Ă  François Hollande, dans un courrier tenant compte du cinquantenaire de « L’indĂ©pendance de l’AlgĂ©rie » « qu’aujourd’hui, la France pourrait saisir cette occasion pour s’exprimer enfin clairement sur certains des Ă©vĂ©nements les plus douloureux de notre passĂ© commun afin que nous progressions dans la voie d’une rĂ©conciliation encore inachevĂ©e”[
]

“Ma dĂ©marche ne procĂšde pas d’une recherche de la repentance de notre pays, mais d’une reconnaissance des violences commises par les forces de l’ordre, une reconnaissance qui rende la France plus forte et plus unie, une reconnaissance qui rendra enfin collectivement hommage aux victimes et Ă  leur mĂ©moire et dont notre pays sera finalement grandi”.

Rappelons Ă  ce Goldberg l’ignorant quelques faits ; quand les Barbaresques se prĂ©sentaient tout armĂ©s devant nos anciens parapets, sur leurs vaisseaux de course ou leurs chevaux arabes, on les repoussait tant bien que mal, en y mettant parfois sept ou huit siĂšcles. Leurs descendants ont trouvĂ© dans notre aberration idĂ©ologique le moyen de rĂ©ussir lĂ  oĂč leurs ancĂȘtres avaient Ă©chouĂ©.

Pourquoi dit-on que la France a occupĂ© l’AlgĂ©rie alors que c’est elle qui l’a créée ?

Sachant que :

— C’est la France qui lui a donnĂ© ses frontiĂšres,

— C’est la France qui lui a donnĂ© son nom,

— C’est la France qui a construit ses infrastructures,

— C’est la France qui a donnĂ© une identitĂ© Ă  son peuple,

Rappelons donc Ă  Goldberg l’ignorant, quelques faits historiques qui justifierais que ce soit l’AlgĂ©rie qui se repente des crimes des arabes l’ayant envahis et des crimes des ottomans.

Les rachats d’esclaves aux Barbaresques se sont effectuĂ©s entre le 11e et 19e siĂšcle, ainsi ce sont plus de 3 millions d’esclaves qui ont Ă©tĂ© durant cette pĂšriode rachetĂ©s par deux congrĂ©gations espagnols.

Par leur recension de divers documents, beaucoup d’Historiens en arrive Ă  chiffrer Ă  quelques dizaines de millions le nombre d’esclaves europĂ©ens aux mains des barbaresques et ce sur une pĂšriode de 8 siĂšcle.

C’est en 1583 que l’on situe les premiers rachats rĂ©pertoriĂ©s. En 1585 une mission, sorte de nonciature apostolique, s’installe Ă  Alger, sans parler des religieux esclaves volontaires qui accompagnaient les victimes en partageant leur sort (rappelons-nous St Vincent de Paul maintenant vivace leur foi par la pratique de leur religion). Les riches pouvaient payer eux-mĂȘmes leur rançon, mais pour les pauvres ce fut l’Église, la PapautĂ© qui la premiĂšre s’en prĂ©occupa en mettant en place des institutions spĂ©cialisĂ©es dans les nĂ©gociations de rachat des esclaves, car le but des pirates Ă©tait, non seulement de procurer Ă  leurs compatriotes la main-d’Ɠuvre qualifiĂ©e dont ils manquait (armuriers, artisans, jardiniers, etc.) et de la » chair fraĂźche « Ă  bon compte pour les harems, mais aussi d’extorquer le plus d’argent possible aux EuropĂ©ens qu’ils savaient soucieux de ne pas abandonner leurs coreligionnaires dans la souffrance..

Tabarca, depuis 1540 comptoir gĂ©nois sur un rocher minuscule ou s’entassĂšrent jusqu’à 2000 habitants, Ă  proximitĂ© du rivage Ă  quelques lieues Ă  l’est de La Calle, fut un centre actif de rachat dĂšs le dĂ©but du XVIIe siĂšcle.

En 1596, se fonde en Sicile » l’ArciconfraternitĂ  della ridenzione dei Cattivi qui eut son siĂšge en l’église Santa Maria Nuova Ă  Palerme.

À GĂȘnes en 1597, on voit se constituer le » Magistrato del Riscatto degli Schiavi « qui prenait la succession d’un ancien organisme remontant Ă  1403, le » Magistratodi ».

« Au XVIIe siĂšcle, les corsaires algĂ©riens deviennent de plus en plus redoutables. La MĂ©diterranĂ©e n’est plus assez vaste pour eux ; ils cherchent un autre théùtre pour leurs dĂ©prĂ©dations, et s’avancent jusqu’aux Ăźles Canaries, oĂč ils portent la dĂ©solation et la mort. Dans l’espace d’une seule annĂ©e, en 1582, deux mille esclaves chrĂ©tiens sont vendus Ă  Alger, et l’on en comptait alors plus de trente mille dans les diffĂ©rentes parties de la rĂ©gence. Michel CervantĂšs, qui y Ă©tait prisonnier Ă  cette Ă©poque, nous a laissĂ© des dĂ©tails curieux sur la maniĂšre dont les AlgĂ©riens traitaient leurs esclaves ; nous allons les rapporter en faisant le rĂ©cit de la captivitĂ© du cĂ©lĂšbre romancier espagnol » (J-F Lamarque CervantĂšs esclave d’Alger) Au XVIIIe siĂšcle Ă  Cagliari, c’est le » bureau de rachat des esclaves sardes » qui participa deux fois, sous l’autoritĂ© du Roi de PiĂ©mont-Sardaigne et avec la contribution financiĂšre de bon nombre de souverains europĂ©ens y compris le Pape Ă  la libĂ©ration des esclaves qu’il allait accueillir pour mettre en valeur son Ăźle de Sardaigne dont il venait d’hĂ©riter, jugĂ©e insuffisamment peuplĂ©e.

Il y eut mĂȘme des ordres religieux dĂ©volus expressĂ©ment au rachat des esclaves chrĂ©tiens : Les Tinitaires des saints Jean de Matha et FĂ©lix de Valois et les MercĂ©daires des saints Pierre Nolasque et Raymond de Penafort.

Trinitaires et MercĂ©daires s’offraient en Ă©change des esclaves chrĂ©tiens quand l’argent ne suffisait pas Ă  leur rachat ; il n’y a que dans le catholicisme que l’on voit cela
 Une fois dans la place, ils soutenaient la foi des chrĂ©tiens prisonniers souvent persĂ©cutĂ©s pour les contraindre Ă  une conversion forcĂ©e. Du XIIIe au XVIIIe siĂšcle, les seuls MercĂ©daires auraient libĂ©rĂ© pas moins de 60.000captifs Les conditions gĂ©nĂ©rales des esclaves chrĂ©tiens Ă  Alger Ă©taient effrayantes. Les malheureux prisonniers faits par les corsaires se divisaient en deux classes : la premiĂšre comprenait le capitaine, les officiers du bĂątiment capturĂ© et les passagers avec leurs femmes et leurs enfants ; cette premiĂšre classe Ă©tait soumise Ă  un travail moins dur que les simples matelots qu’on vendait publiquement au plus offrant et dernier enchĂ©risseur ; les enfants Ă©taient presque tous envoyĂ©s au palais du dey ou aux maisons des premiĂšres familles, et les femmes servaient les dames maures ou entraient dans les harems
 Du cĂŽtĂ© des Espagnols, des organismes de rachat similaires Ă  Alger et Ă  Tunis notamment un hĂŽpital.

Les Français Ă©taient reprĂ©sentĂ©s par des capucins Ă  TĂ©touan et des Carmes Ă  Alger, ils agissaient en missionnaires et reprĂ©sentants officieux du Roi de France, se prĂ©occupant du salut des Ăąmes, baptĂȘmes et enterrements, tout en organisant parfois en secret au pĂ©ril de leur vie, des Ă©vasions en groupe par la mer grĂące Ă  de hardis navigateurs tel Felipe Romano le Valencien qui dĂ©joua plusieurs fois les contrĂŽles des Janissaires tout en commerçant avec eux.

Le retour des rachetĂ©s dans leur pays ou ailleurs, puisqu’on retrouve le cas d’une centaine de familles d’esclaves originaires de Tabarca encore, capturĂ©s par les pirates d’Alger en 1756 au cours d’un conflit entre les deux rĂ©gences, dĂ©portĂ©es Ă  Alger puis rachetĂ©es par le Roi d’Espagne qui seront installĂ©s, eux d’origine gĂ©noise, sur une petite Ăźle Ă  11 milles au sud d’Alicante nommĂ©e de ce fait Nueva Tabarca oĂč ils feront souche et deviendront Espagnols.

C’est ainsi que ces gens, certainement nĂ©s Ă  Tabarca (comptoir gĂ©nois du corail), mais issus de familles originaires de Pegli, prĂšs de GĂȘnes et parlant un dialecte ligure, se sont retrouvĂ©s, vers 1776, sujets du Roi d’Espagne dans une petite Ăźle au large du cap de Santa Pola Ă  11 milles au sud d’Alicante oĂč ils ont fait souche et se sont hispanisĂ©s. Les archives ecclĂ©siastiques sont toujours dĂ©tenues par les reprĂ©sentants de l’Église catholique Ă  Tunis et il toujours possible d’avoir des informations sur des ancĂȘtres esclaves, notamment les noms et adresses des familles musulmanes les ayant dĂ©tenus et utilisĂ©s, ainsi ce document fourni par l’Église catholique de Tunis

Au retour des libĂ©rĂ©s on organise de grandes cĂ©rĂ©monies avec actions de grĂąces et parade du convoi dans les rues sous les acclamations de la foule. Ils portaient, parfois au bout d’un bĂąton sur l’épaule, un symbole de leur asservissement passĂ© tel que des chaĂźnes symboliques ou un petit pain noir, seule nourriture que leurs geĂŽliers leur consentaient Premier pas vers une relative tranquillitĂ©, en 1816 le traitĂ© de Tunis mit un terme aux expĂ©ditions de pillage commanditĂ©es par son Bey Ă  l’encontre du royaume de PiĂ©mont-Sardaigne, comme celle de 1798 Ă  San Pietro.

Toutefois, Alger et Tripoli n’étant pas parties Ă  cet accord, ce n’est qu’en 1830 avec le dĂ©barquement des Français Ă  Sidi Ferruch que la pacification de la mĂ©diterranĂ©e occidentale sera dĂ©finitivement acquise, paix qu’elle n’avait pas connue depuis prĂšs de 14 siĂšcles.

« Ce qui nous amĂšne Ă  dire quelques mots du dernier des esclaves cĂ©lĂšbres, le gĂ©nĂ©ral Youssouf, nĂ© en l’üle d’Elbe, capturĂ© en mer Ă  11 ans, esclave puis Mamelouk Ă  Tunis oĂč l’élimination en duel secret d’un congĂ©nĂšre jaloux de son idylle avec une fille de leur maĂźtre, suivie de la dĂ©couverte du corps qu’il avait scellĂ© dans un mur, le contraignit Ă  prendre la fuite. Il se prĂ©senta alors aux Français arrivĂ©s de fraĂźche date et se mit Ă  leur service comme interprĂšte. Se faisant apprĂ©cier de ses supĂ©rieurs il deviendra officier, sera l’artisan de la prise de BĂŽne, participera Ă  fonder les corps des Tirailleurs et des Spahis et finira sa vie Ă  Nice avec le grade de gĂ©nĂ©ral de division aprĂšs avoir servi dans de nombreuses campagnes hors d’AlgĂ©rie. »

Le souvenir de la libĂ©ration des « esclaves en terre d’islam » perdure en MĂ©diterranĂ©e occidentale de nos jours.

Dans l’église de Gairaut, on peut apercevoir une statue dĂ©diĂ©e Ă  Notre Dame de la Merci.

Ce vocable rappelle l’ordre instituĂ© par S.Pierre Nolasque(+ 1256) Ă  Barcelone pour le rachat des captifs, c’est Ă  dire des chrĂ©tiens dĂ©tenus par les Barbaresques. Les Espagnols durent se battre pendant 400 ans pour chasser les Maures de leur pays (1085-1492). Les chrĂ©tiens faits captifs Ă©taient particuliĂšrement Ă  plaindre. Ils Ă©taient vendus comme esclaves aux musulmans d’Afrique. Force Ă©tait alors de payer rançon pour obtenir leur dĂ©livrance.

Pierre Noslasque, inspirĂ© par la Vierge Marie, fonda l’ordre de la Merci ou de la RĂ©demption ou Rachat des captifs. Aux trois vƓux habituels : obĂ©issance, pauvretĂ©, chastetĂ©, les mercĂ©daires en ajoutaient un quatriĂšme, celui de se constituer en otage, quand c’était pour eux le seul moyen d’accomplir leur mission. GrĂące Ă  l’hĂ©roĂŻsme et la gĂ©nĂ©rositĂ© des chrĂ©tiens, cette mission se poursuivit jusqu’à la disparition de la piraterie.

Pourquoi le culte de Notre Dame de la Merci Ă  Gairaut ?

Est-ce une dĂ©votion importĂ©e par un ancien captif dĂ©livrĂ© ou par une famille dont un des membres fut mercĂ©daire ? Est-ce en rapport avec la victoire sur les musulmans en 1543, siĂšge de Nice ? Nul ne peut l’affirmer. En tous cas, la fĂȘte de N.D de la Merci fut primitivement instituĂ©e pour remercier la Vierge d’avoir rendu la libertĂ© aux prisonniers qui lui criaient » merci « .

Mais chaque annĂ©e, le 24 septembre (ou le dimanche le plus proche), depuis que le Pape Innocent II institua cette fĂȘte pour l’Église entiĂšre (1696), les Gairautins aiment venir honorer Marie pour la fĂȘte de leur quartier.

Au reste, la sollicitude des PĂšres de la Merci ne se bornait pas Ă  faire des quĂȘtes dans les divers Ă©tats de la chrĂ©tientĂ© pour subvenir au rachat des malheureux esclaves, ils visitaient, ils consolaient dans leur captivitĂ© ceux qu’ils n’avaient pu affranchir ; ils entendaient leur confession et les maintenaient dans leur foi ; lorsqu’ils Ă©taient malades, ils les soignaient dans un petit hĂŽpital qu’ils avaient Ă©levĂ© Ă  leurs frais, et les empĂȘchaient de tomber dans les vices honteux oĂč la passion brutale de leurs maĂźtres ne les entraĂźnait que trop souvent.

Telle était la malheureuse condition des chrétiens que le sort de la guerre faisait tomber entre les mains des redoutables corsaires algériens.

1/ Comment l’AlgĂ©rie devint française

Depuis le XVIe siĂšcle, les commerçants français payaient au Dey le droit de faire du nĂ©goce dans les « concessions d’Afrique » qui trafiquaient surtout du corail. Ces concessions avaient Ă©tĂ© renouvelĂ©es en 1818.

Depuis le CongrĂšs de Vienne, le Dey n’avait plus le droit de rĂ©duire les chrĂ©tiens Ă  l’esclavage et d’en faire commerce. Il avait dĂ» rendre, en 1816, mille captifs chrĂ©tiens sous a menace d’une flotte anglaise. Mais il continuait Ă  pratiquer en MĂ©diterranĂ©e des raids de corsaires, la « course », comme on disait.

En 1819 un amiral français et un amiral anglais sont allĂ©s voir Hussein-Dey pour le sommer, au nom de leurs gouvernements, de renoncer Ă  la course. Le Dey hausse les Ă©paules. Renoncer Ă  la course ? Mais c’est de la course que les gens de la RĂ©gence d’Alger tirent depuis des siĂšcles leurs plus grands profits. Il n’écoute pas ces EuropĂ©ens. Mais la France ne peut pas abandonner ses ressortissants, ni laisser bafouer son pavillon par les pirates du Dey.

« De petits intĂ©rĂȘts de commerce ne peuvent balancer les grands intĂ©rĂȘts de l’humanitĂ© : il est temps que les peuples civilisĂ©s s’affranchissent des honteux tributs qu’ils paient Ă  une poignĂ©e de barbares. » (Intervention de M. de Chateaubriand Ă  la Chambre des Pairs rapportĂ©e par Raynal)

L’histoire du blĂ© vendu Ă  la France

1793 n’est pas loin, la rĂ©volution, la libertĂ©, l’égalitĂ© françaises font trembler les rois du vieux continent.

L’Europe est coalisĂ©e contre la France et ses idĂ©es subversives. La disette est partout. Il ne reste qu’une alliĂ©e : la rĂ©gence d’Alger et le Dey. Celle-ci par l’entremise de la maison Bacri-Busnach, des commerçants juifs livournais, qui dĂ©tiennent presque tout le commerce de la rĂ©gence, livre du blĂ© Ă  la France Ă  la premiĂšre RĂ©publique en 1792, et ce pendant 7 ans. Le fameux blĂ© de la discorde.

Ce blĂ© Ă©valuĂ© Ă  14 millions payĂ©s en partie aux hĂ©ritiers Baccri-Busnach sera rĂ©clamĂ© par les neuf Deys qui se sont succĂ©dĂ© pendant toute cette pĂ©riode, 1792/1830-ja, mais surtout par le dernier Dey Hussein III. La Restauration Ă©valua la dette en 1819, Ă  7 millions. En 1827, rien n’est fait. Hussein crĂ©diteur de Bacri-Busnach et particuliĂšrement intĂ©ressĂ©, rĂ©clame le paiement Ă  Louis XVIII. Rien n’est fait.

Mais
 Talleyrand voulait des territoires pour la France, et de grands territoires Ă  peupler. On ne peut plus s’étaler en Europe, sauf peut-ĂȘtre la Wallonie ? Il regarde du cĂŽtĂ© de l’AlgĂ©rie. Il est le maĂźtre de ces stratĂ©gies. Ensuite, aggraver le diffĂ©rent entre Paris et Alger, les mĂ©faits de la course en MĂ©diterranĂ©e suffisaient, enfin traĂźner la patte pour honorer les vĂ©ritables rĂ©clamations du Dey pour le rĂšglement de la dette, qui s’élĂšvent Ă  plusieurs millions, millions qui vont fondre au soleil, au fur et Ă  mesure du temps et des rĂ©gimes qui passent.

À cette Ă©poque, le congrĂšs de Vienne Ă©tait rĂ©uni ; les plĂ©nipotentiaires qui le composaient portĂšrent leur attention sur l’AlgĂ©rie, et tĂ©moignĂšrent le dĂ©sir de s’unir pour opposer une digue aux dĂ©prĂ©dations des corsaires. L’Angleterre seule, qui craignait que cette rĂ©pression ne rendĂźt Ă  la France l’influence qu’elle avait prĂ©cĂ©demment exercĂ©e sur les Barbaresques, s’y opposa.

Dans ce moment mĂȘme, une escadre amĂ©ricaine, composĂ©e de trois frĂ©gates, un sloop, un brick, trois schooners, et commandĂ©e par le capitaine Decatur, se dirigeait vers Alger ; elle venait relever l’Union d’un honteux tribut que lui avait imposĂ© le Dey, bien dĂ©cidĂ©e Ă  obtenir une prompte et complĂšte satisfaction. Avant mĂȘme de se montrer devant la ville, les AmĂ©ricains capturĂšrent trois navires algĂ©riens. Une attitude si Ă©nergique dĂ©concerta le divan, qui souscrivit presque sans rĂ©clamations Ă  tout ce qu’exigeaient des ennemis si dĂ©terminĂ©s Ă  faire triompher leur bon droit. Le succĂšs de cette expĂ©dition ramena l’attention des puissances europĂ©ennes sur Alger, et, dĂšs ce moment, elles rĂ©solurent d’abolir l’esclavage des chrĂ©tiens dans les États barbaresques.

« DĂ©cidĂ©ment, l’AlgĂ©rie tout le monde la voulait, mais pas pour les mĂȘmes raisons. Allez dire aujourd’hui Ă  quelques pieds noirs encore meurtris que l’AlgĂ©rie et la Belgique furent l’enjeu d’un marchandage entre plusieurs pays europĂ©ens. Ils n’en croiraient pas leurs oreilles et pourtant. Et si on vous disait que l’affaire Ă©tait prĂ©vue, et voulue depuis longtemps ! Qu’elle Ă©tait en quelque sorte dans le sac. » « Lors donc, Talleyrand nomme en 1815, le sieur Pierre Deval, consul de France Ă  Alger le consul multiplie les provocations et les rodomontades.

Etait-ce dans son caractĂšre, son Ă©ducation ou bien plus sĂ»rement sous ordre de son Ministre ? Comment Deval, connu comme un homme tout en courbettes, a-t-il brusquement trouvĂ© l’audace de contrer en public le Dey ?

On peut supposer que celui-ci a au cours de l’audience du 29 avril 1827 au cours de la rĂ©ception officielle du BaĂŻram (fĂȘte de l’AĂŻd en turc).

27 avril 1827 oĂč fut portĂ© le fameux “coup d’éventail” par le souverain d’Alger au consul français, et qui a Ă©tĂ© le prĂ©texte de la rupture et de l’agression française, trois ans plus tard, soit tombĂ© simplement dans un piĂšge, depuis longtemps mis en place. À partir de cet incident, le consul Deval va utiliser tous les moyens pour envenimer les choses. Le gouvernement français enverra au Dey un ultimatum insultant, dont on n’ignore pas au bord de la Seine qu’il sera rejetĂ© par Alger. Et c’est la rupture voulue et minutieusement prĂ©parĂ©e, depuis de longues annĂ©es par Paris. La vĂ©ritĂ© est qu’il fut frappĂ© de trois coups de chasse-mouches. Une douleur symbolique ! Quelle manƓuvre diabolique ! Mais Talleyrand l’est-il moins ? »

Le blocus des cĂŽtes algĂ©riennes dĂ©cidĂ© par le gouvernement français n’ayant pas Ă©tĂ© efficace, les actes de piraterie se multipliaient, les autres nations se plaignaient de plus en plus de l’insĂ©curitĂ© en MĂ©diterranĂ©e, le Conseil des ministres français songea Ă  une expĂ©dition contre Alger.

D’autres incidents survenus en pleine mer, et sur la cĂŽte algĂ©rienne ajoutaient des motifs au conflit. Le 30 juillet 1829, l’amiral De la BretonniĂȘre, montĂ© sur le vaisseau « La Provence » et accompagnĂ© du brick « l’Alerte » se prĂ©sentĂšrent devant Alger, pour demander, une fois de plus, rĂ©paration du dey.

« Le 31 juillet 1929, il fut reçu par le dey, aprĂšs avoir refusĂ© de dĂ©poser son Ă©pĂ©e comme il Ă©tait exigĂ© Ă  tous les visiteurs. C’était un autre acte irrespectueux Ă  l’égard non seulement du dey mais aussi des coutumes protocolaires Ă  la Cour d’Alger. Au bout de deux heures de confĂ©rence, le dey remit au surlendemain sa rĂ©ponse dĂ©finitive.

Le 2 aoĂ»t 1929, nouvelle entrevue qui n’aboutit Ă  aucun rĂ©sultat attendu par la dĂ©lĂ©gation française, De la BretonniĂȘre regagna son bord, aprĂšs avoir prĂ©venu l’oukil el hardj qui l’accompagnait, qu’il appareillerait le lendemain Ă  midi. » Le lendemain « La Provence » appareilla vers le large. Trois coups de canon, Ă  blanc, donnĂšrent le signal d’un tir en direction du navire Celui ci fut touchĂ©, mais sans gravitĂ© puisqu’il poursuivit sa route.

Le 8 aoĂ»t 1829, le Conseil des ministres chargeait le gĂ©nĂ©ral de Bourmont et d’Haussez de prĂ©parer l’expĂ©dition.

Les prĂ©paratifs militaires et diplomatiques s’accĂ©lĂšrent au dĂ©but de l’annĂ©e 1830 ; tout doit ĂȘtre mis en place et terminĂ© au dĂ©but du mois de mai, car, selon les « spĂ©cialistes », c’est la pĂ©riode la plus favorable pour un dĂ©barquement sur les cĂŽtes algĂ©riennes.

On est allĂ© chercher au ministĂšre de la Guerre un plan rĂ©alisĂ© par un espion français, le commandant du gĂ©nie Boutin, fait en 1801. Ce plan prĂ©cisait que le meilleur endroit pour accoster sans trop de danger Ă©tait la presqu’üle de Sidi-Fredj.

Le 31 janvier 1830, le Conseil des ministres français fixa le point de dĂ©barquement Ă  Sidi Ferruch. Tous les chefs devant diriger l’opĂ©ration furent dĂ©signĂ©s.

Des garanties internationales de neutralitĂ© furent prises auprĂšs de toutes les puissances europĂ©ennes. Chacune consentit Ă  dĂ©lĂ©guer un observateur qui accompagnera l’expĂ©dition.

De son cĂŽtĂ©, Hussein Dey prĂ©venu des dispositions prises par la France, et les forces qu’elle s’apprĂȘtait Ă  mettre en action, fit de son mieux pour se prĂ©parer Ă  la rĂ©sistance. Il fit, entre autres, Ă©lever de nouvelles batteries pour mieux protĂ©ger la baie d’Alger. Il acquit de nouveaux canons et accumulĂ©s de grandes quantitĂ©s de munitions.

En mĂȘme temps, il donnait l’ordre aux beys de Constantine, de Titteri et d’Oran de rĂ©unir toutes les forces que leur beylik pourrait fournir, et de venir, eux-mĂȘmes, Ă  la tĂšte de ces contingents, prendre part Ă  la dĂ©fense d’Alger.

Le 2 mai, les opĂ©rations de l’embarquement des troupes françaises furent commencĂ©es.

Le 25 mai, la flotte mit voile sur Mayorque. Le 13 juin la flotte française arriva Ă  l’entrĂ©e de la baie d’Alger
 .

Que se passe-t-il pour les grandes puissances pendant ce temps ? Si elles sont favorables Ă  l‘attaque française contre la piraterie menĂ©e depuis Alger ; elles craignent que la France ne devienne trop puissante.

Le 4 novembre 1830, s’ouvre Ă  point nommĂ©, la confĂ©rence de Londres.

Talleyrand est nommĂ© ambassadeur Ă  Londres par Louis Philippe pour participer aux nĂ©gociations qui allaient sceller le sort du territoire compris entre la Hollande et la France. Allait-on scinder en deux ce territoire ? Une partie Ă  la France, l’autre aux Pays-Bas, ou bien allait-on crĂ©er un État indĂ©pendant, la Belgique ?

Talleyrand trĂšs habilement se range Ă  la majoritĂ©, il abandonne les prĂ©tentions du trĂŽne de France sur cette partie du territoire et obtient par accord tacite la souverainetĂ© française en AlgĂ©rie. L’AlgĂ©rie contre la Wallonie fut-ce une bonne diplomatie ?

Car, comme s’interroge si intelligemment Jean Isnard : « Avec le recul de l’Histoire, Talleyrand a-t-il eu tort ? Ou bien est-ce nos chefs politiques qui n’ont pas Ă©tĂ© Ă  la hauteur des rĂȘves d’un homme qui a consacrĂ© sa vie Ă  la grandeur de la France ? »

L’Histoire a tenu Ă  un fil. Que se serait-il passĂ© si Waterloo avait connu une autre fin ? que se serait-il passĂ© si la Wallonie avait Ă©tĂ© scindĂ©e en deux ? que se serait-il passĂ© sans Talleyrand qui fidĂšle Ă  sa lĂ©gende obtint l’AlgĂ©rie contre la Wallonie ?

L’esclavage perdure en terre d’islam

Un esclavage discret et Ă  peine attĂ©nuĂ© se perpĂ©tue aujourd’hui. Il y a des zones de non-droit absolu en Arabie Saoudite et dans certains pays du Golfe, par exemple. Au Niger ou au Mali, vous pouvez acheter – Ă  l’unitĂ© – un enfant de 10 ans dont vous ferez ce que vous voudrez. Alors que les autoritĂ©s religieuses en Occident ont fini par basculer dans le camp des abolitionnistes au XIXe siĂšcle et aujourd’hui encore battent leur coulpe pour les crimes passĂ©s, je n’entends aucun prĂ©dicateur d’Al-Jazira condamner ces pratiques. »

J’espĂšre que les Africains et les descendants des esclaves vont oser bientĂŽt demander des excuses et des rĂ©parations aux arabo-musulmans. Il est plus que temps. On ne peut Ă©ternellement accuser les Occidentaux


PremiĂšres traites nĂ©griĂšres, l’exploitation de captifs noirs par les peuples du bassin mĂ©diterranĂ©en n’est pas une nouveautĂ© moderne. On en relĂšve de premiĂšres traces dans l’Égypte pharaonique d’il y a 4000 ans puis plus tard chez les Grecs et les Romains.

Elle va ĂȘtre relancĂ©e par l’islam pour une raison en premier lieu religieuse : « en pays d’Islam, seuls sont esclaves les enfants d’esclaves et les personnes capturĂ©es Ă  la guerre Des personnes libres ne peuvent ĂȘtre asservies, pas plus que les enfants abandonnĂ©s, selon une politique courante dans les civilisations antiques» (Olivier PĂ©trĂ©-Grenouilleau.) D’oĂč le recours au gisement subsaharien.

Cela commence avec un fameux traitĂ© conclu en 652 entre des Nubiens et l’émir d’Assouan, pour la livraison chaque annĂ©e d’un quota de 360 captifs Ă  ce dernier en Ă©change de marchandises diverses. Rapidement, les habitants du monde islamique en arrivent Ă  assimiler les Noirs Ă  des esclaves et, pour justifier le rapprochement entre l’infĂ©rioritĂ© juridique et la couleur de peau, ils font appel Ă  la fameuse malĂ©diction de Cham.

L’anthropologue Malek Chebel montre dans l’esclavage en terre d’islam comment une culture esclavagiste s’est greffĂ©e sur l’islam. Il a justement sous-titrĂ© son ouvrage un tabou bien gardĂ©. Il s’agit non d’un livre d’histoire, mais d’un rĂ©cit de voyage ethnographique Ă©maillĂ© de rĂ©fĂ©rences littĂ©raires. SpĂ©cialiste du monde musulman, l’anthropologue Malek Chebel s’est penchĂ© sur un sujet rarement abordĂ© : l’esclavage en terre d’islam, sans se limiter aux traites nĂ©griĂšres.

Il Ă©voque les anciens trafics d’esclaves blancs, mais aussi les trafics humains qui perdurent dans maints pays sous des formes plus ou moins Ă©dulcorĂ©es. Le Coran, livre fondateur de l’islam, Ă©voque l’esclavage dans pas moins de 25 versets sans le condamner formellement.

« Le Coran n’étant pas contraignant, l’abolition relĂšve de la seule initiative personnelle du maĂźtre. Cette ambiguĂŻtĂ© est constitutive de l’approche coranique : encourager ceux qui font le bien, mais ne pas alourdir la peine de ceux qui ne font rien », Ă©crit Malek Chebel. « Plusieurs versets entĂ©rinent au demeurant l’infĂ©rioritĂ© de l’esclave par rapport Ă  son maĂźtre ». Le calife Omar (581-644) est Ă  l’origine d’une lĂ©gislation qui interdit de mettre en servitude un musulman. Dans les faits, c’est cette prescription, qui encourage les musulmans Ă  chercher des esclaves hors de leurs terres, c’est-Ă -dire en Afrique noire et en Europe orientale, (les barbaresques) À la fin du Moyen Âge, comme le vivier slave s’épuise du fait de la christianisation de l’Europe orientale, les musulmans se tournent vers les pirates qui Ă©cument la MĂ©diterranĂ©e. Ces derniers effectuent des razzias sur les villages cĂŽtiers des rivages europĂ©ens. Le souvenir des combats livrĂ©s par les habitants Ă  ces pirates perdure dans
 la tĂȘte de prisonnier maure qui sert d’emblĂšme Ă  la Corse.

On Ă©value Ă  plus d’un million le nombre d’habitants enlevĂ©s en Europe occidentale entre le XVIe et le XVIIIe siĂšcle, au temps de François 1er, Louis XIV et Louis XV. Ces esclaves, surtout des hommes, sont exploitĂ©s de la pire des façons dans les orangeraies, les carriĂšres de pierres, les galĂšres, les chantiers,
 d’Afrique du Nord. Des organisations chrĂ©tiennes dĂ©ploient beaucoup d’énergie dans le rachat de ces malheureux, tel Miguel de CervantĂšs.

En Europe orientale et dans les Balkans, pendant la mĂȘme pĂ©riode, les Ottomans prĂ©lĂšvent environ trois millions d’esclaves. Mais l’expansion europĂ©enne, Ă  partir de la fin du XVIIIe siĂšcle, met fin Ă  ces razzias.

Rapidement, l’esclavage devient un fait musulman, comme il l’a Ă©tĂ© grec ou romain. « Nulle part on ne trouve contre lui d’opposition ou de rĂ©probation », note l’auteur. Ainsi montre-t-il que les plus grandes figures intellectuelles de l’islam ont Ă©tĂ© comme les autres de grands propriĂ©taires d’esclaves.

Malek Chebel rapporte trois codes rĂ©gissant l’esclavage en terre d’islam. À travers des rĂ©fĂ©rences littĂ©raires, en premier lieu les Mille et une Nuits, ainsi que de nombreux rĂ©cits de voyageurs, il dĂ©peint aussi le statut des esclaves, leur dĂ©shumanisation par la privation de nom et leur exploitation Ă  des fins sexuelles, qu’il s’agisse des concubines destinĂ©es Ă  assouvir les plaisirs de leur maĂźtre ou des eunuques chargĂ©s de les garder !

InventĂ©e et dĂ©veloppĂ©e Ă  grande Ă©chelle par la Chine impĂ©riale, exportĂ©e dans les pays musulmans et jusqu’en Italie (les castrats), l’exploitation des eunuques est l’une des formes d’esclavage les plus inhumaines qui soient. Cela commence avec l’ablation des parties gĂ©nitales, gĂ©nĂ©ralement pratiquĂ©e sur de jeunes adolescents : elle se solde par une mortalitĂ© effroyable
 Dans beaucoup de rĂ©gions perdure l’esclavage « de traĂźne » : il affecte les descendants d’esclaves qui portent le fardeau de leur hĂ©rĂ©ditĂ© ; ainsi ne peuvent-ils par exemple Ă©pouser une femme de classe supĂ©rieure.

Sur la cĂŽte sud de l’Iran subsiste une communautĂ© issue des anciens esclaves noirs qui parle arabe, pratique le sunnisme et entretient des coutumes d’origine africaine. En Arabie, malgrĂ© la rĂ©pĂ©tition des Ă©dits abolitionnistes, l’esclavage perdure de fait, avec une relative discrĂ©tion. Il concerne des ressortissants africains, sans parler des travailleurs asiatiques dont le sort est proche de la servitude.

L’esclavage demeure prĂ©sent aussi dans les rĂ©gions sahariennes (Libye, Niger, Tchad, Mali
) sans qu’on puisse en chiffrer l’importance. CĂ©dant Ă  la pression des ONG, un chef targui du Niger, Amrissal Ag Amdague, a acceptĂ© le 10 mars 2005 de libĂ©rer 7.000 esclaves coutumiers contre espĂšces sonnantes et trĂ©buchantes ! En Mauritanie, l’esclavage des Noirs (Harratine) par les BĂ©douins est une rĂ©alitĂ© prĂ©gnante dont l’auteur a lui-mĂȘme pris la mesure lors de ses voyages
 Autant dire que la lutte contre l’esclavage demeure d’actualitĂ© et cet ouvrage permet de s’en convaincre. Malek Chebel le rappelle avec justesse : « l’esclavage est la pratique la mieux partagĂ©e de la planĂšte, c’est un fait humain universel ».

L’esclavage dans le monde musulman, trois fois plus Ă©talĂ© dans le temps qu’en Occident, a aussi touchĂ© deux fois plus d’individus, soit 20 millions de personnes sur 10 siĂšcles.

« Autres Ă©poques, autres politiques. Maintenant, tout est rentrĂ© dans l’ordre ou presque. La Belgique existe (pour combien de temps ?), l’AlgĂ©rie est indĂ©pendante et la France est
 Ă©ternelle. » 3/

Nous mettons ici une interview de Daniel Lefeuvre, historien de la colonisation par Quention AriĂšs prĂ©parateur Ă  l’IEP de Grenoble Ă  propos de « Pour en finir avec la repentance coloniale de Daniel LEFEUVRE »

Quentin AriĂšs : Pourquoi avoir Ă©crit pour en finir avec la repentance coloniale ? Est-ce pour imposer plus de frontiĂšres entre l’Histoire et le politique ?

Daniel Lefeuvre : Il ne s’agissait pas d’établir une frontiĂšre entre l’histoire et le politique, Ă  proprement parler. Mais d’abord de rappeler les fondements essentiels de la discipline historique, face Ă  la dĂ©ferlante de productions, Ă  caractĂšre prĂ©tendument historique, visant Ă  « condamner » la colonisation et Ă©tablissant une continuitĂ© artificielle entre le passĂ© colonial et la situation, dans la France d’aujourd’hui, des populations immigrĂ©es ou issues des immigrations.

D’autre part, je souhaitais rappeler, Ă  grands traits, quelques acquis de l’historiographie des colonisations et dĂ©monter quelques mythes – dans le prolongement des travaux prĂ©curseurs de Paul Bairoch, d’Henri Brunschwig et de Jacques Marseille — notamment sur :

— les mĂ©thodes et le bilan des guerres coloniales, sur le rĂŽle de la colonisation dans le dĂ©veloppement Ă©conomique de la France, sur le poids relatif de l’immigration maghrĂ©bine dans les reconstructions du pays aux lendemains des guerres mondiales, sur les manifestations de xĂ©nophobie et de racisme dont les immigrĂ©s ont Ă©tĂ© les victimes, en interrogeant l’éventuelle spĂ©cificitĂ© quant Ă  l’ampleur et aux formes affectant les populations magrĂ©bines et noires, etc.

Le tout ouvrant Ă  une rĂ©flexion sur l’avenir de la France, qui a trouvĂ© son prolongement dans le livre, Ă©crit avec Michel Renard, faut-il avoir honte de l’identitĂ© nationale ? (Larousse, 2008).

Quentin AriĂšs : Vous faites rĂ©fĂ©rence Ă  la « loi Taubira » sur la traite nĂ©griĂšre et le commerce triangulaire comme un abus du politique dans l’Histoire. Selon vous la loi venant d’ĂȘtre votĂ©e sur le gĂ©nocide armĂ©nien est-elle du mĂȘme calibre ?

Daniel Lefeuvre : Oui. Indiscutablement. Je suis convaincu qu’il faut laisser aux historiens le soin d’écrire l’histoire. Sur ce sujet – qui reste l’objet de controverse, des historiens anglo-saxons discutant de la pertinence de l’accusation de gĂ©nocide – comme pour tous ceux qui ont fait l’objet de lois « mĂ©morielles », je renvoie les candidats Ă  l’article que Madeleine RebĂ©rioux — historienne spĂ©cialiste de Jean JaurĂšs et du socialisme français —, alors prĂ©sidente de la Ligue des Droits de l’Homme, avait publiĂ© dans la revue L’Histoire (n° 138, novembre 1990, pp. 92-94) pour s’opposer Ă  la loi Gayssot : « Le GĂ©nocide, le juge et l’historien ». Au passage, ils relĂšveront en quoi, selon M. RebĂ©rioux les historiens sont-ils des « rĂ©visionnistes par mĂ©tier ».

Quentin AriÚs : Avez-vous été contacté par Sciences Po Grenoble pour le choix de cet ouvrage pour leurs concours ?

Daniel Lefeuvre : Non, Ă  aucun moment, et il n’y avait aucune raison pour que je le sois. Les jurys sont et doivent rester totalement libres de leur choix. En revanche, compte tenu des critiques soulevĂ©es par ce choix, j’ai proposĂ© Ă  la direction de l’école l’organisation d’un dĂ©bat dont le principe a Ă©tĂ© acceptĂ©, ce dont je suis reconnaissant Ă  la direction de l’école. Je ne doute pas que Sarah Mekdjian qui a vigoureusement contestĂ© ce choix acceptera cette discussion publique.

Elle aura ainsi la possibilitĂ© de prĂ©senter en dĂ©tail les « provocations et les erreurs » que contiendrait mon livre — ce « pamphlet politique rĂ©actionnaire » comme elle se plait Ă  le qualifier — et j’aurais plaisir Ă  lui rĂ©pondre. Ce livre s’inscrit dans une rĂ©flexion sur l’histoire coloniale. Il souhaite rappeler l’importance des connaissances produites dans ce domaine qui dessinent une « histoire ambiguĂ« », pour reprendre le titre particuliĂšrement opportun du livre de Pierre Brocheux et Daniel HĂ©mery, Indochine, la colonisation ambiguĂ« (La DĂ©couverte, 2001, 451 pages).

Au plan politique, le contexte Ă©tait – et reste – celui d’une instrumentalisation de l’histoire, d’une histoire-rĂ©quisitoire, dont l’objectif n’est pas de rĂ©vĂ©ler un passĂ© honteux, oubliĂ© ou occultĂ©, comme on tente de le faire croire, mais de remettre en cause les fondements de la RĂ©publique, au profit d’une conception communautariste et multiculturelle de la sociĂ©tĂ©.

Quentin AriÚs : Cet ouvrage est détaillé, plein de références peu étudiées lors des classes de terminales ou de premiÚres dans les lycées, avez-vous des références complémentaires à donner ?

Daniel Lefeuvre : L’historiographie coloniale est trùs abondante.

Quelques références complémentaires :

— Dictionnaire de la France coloniale, sous la direction de Jean-Pierre Rioux (Flammarion, 2007).

— Dictionnaire des esclavages, sous la direction d’Oliver PĂ©trĂ©-Grenouilleau (Larousse, 2010).

Daniel Lefeuvre ; ChĂšre AlgĂ©rie, la France et sa colonie, Paris, Flammarion, 2005 Daniel Lefeuvre ; pour en finir avec la repentance coloniale, Paris, Flammarion, 2008 Jacques Marseille ; Empire colonial et capitalisme français : Histoire d’un divorce Paris, Flammarion2005)

1/Sources Jean-Bernard LEMAIRE St Germain-en-Laye le 25 novembre2002 Les cahiers de la Méditerranée Sources bibliographiques :

— Fernand BRAUDEL » la mĂ©diterranĂ©e au temps de Philippe II » 2 t., (Armand colin, 1985) — Giuseppe VALLEBONA ” Storia di una colonizzazione “ — Capitaine de FrĂ©gate Cavelier de Cuverville » PĂȘche du corail sur les cotes de l’AlgĂ©rie « (Nancy, Berger-Levraud 1880)

2/ sources : ‘Olivier PĂ©trĂ©-Grenouilleau : Traites nĂ©griĂšres, Malek chebel L’esclavage en terre d’Islam

3/D’aprĂšs l’essai de Jean Pierre Badia — Lacoste et Nouschi : AlgĂ©rie, passĂ© et prĂ©sent. Jean Isnard

Par respect pour l’histoire, il serait Ă  l’évidence plus juste et plus honnĂȘte de parler de construction et non d’occupation.

Je joins Ă  cette longue compilation, ce petit texte de Renaud Camus qui mieux que personne en quelques phrases dĂ©crit ce qu’il en est aujourd’hui.

« Le flux actuel des immigrĂ©s clandestins — au demeurant fort peu clandestins : on ne voit qu’eux — aurait tous les caractĂšres de la farce s’il n’était si lourd de menaces pour notre civilisation, ou ce qu’il en reste. Nous avons eu pendant trente ans les rĂ©fugiĂ©s de la dictature (nous disait-on), voici les rĂ©fugiĂ©s de la libertĂ© (la plupart viennent de Tunisie, ces temps-ci). Toute rĂ©fĂ©rence au droit d’asile est Ă  peu prĂšs abandonnĂ©e, comme un vieux prĂ©texte devenu inutile. Les nouveaux arrivants quittent leur pays Ă  la faveur des progrĂšs dĂ©mocratiques qui y ont cours, ils profitent du dĂ©sordre entraĂźnĂ© par l’effondrement des anciens pouvoirs pour gagner des terres plus rĂ©munĂ©ratrices, et voilĂ  tout. [
] Les bĂ©nĂ©ficiaires d’un si surprenant accueil savent qu’ils ne doivent surtout pas remercier, ni se montrer Ă©tonnĂ©s mĂȘme s’ils le sont, et reconnaissants encore bien moins : cela pourrait rĂ©veiller le dormeur, faire naĂźtre la suspicion dans l’esprit du colonisĂ© ravi. [
] AprĂšs le fantastique succĂšs de leurs revendications de misĂ©reux il sera toujours temps pour eux, plus tard, un peu plus tard, bien vite, lorsqu’ils seront les maĂźtres, de prĂ©senter des exigences de maĂźtres ».

J’ai pu rĂ©aliser cette compilation en m’appuyant sur un site « La Gazette de LĂ -Bas (dit) site, qui sur la prĂ©sence française en AlgĂ©rie nous donne les meilleures informations, qu’il me pardonne mon « pillage » qui en Ă©change me permet et de les citĂ©s et de recommander aux lecteurs de riposte laĂŻque, qui veulent connaĂźtre la vĂ©ritĂ© au-delĂ  de celle que l’on nous impose, d’y aller voir.

Michel Ciardi

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