L’affaire illustre à quel point l’antisémitisme se glisse parfois jusque dans les gestes les plus banals du quotidien. À Amsterdam, une promenade en bateau a tourné au cauchemar pour Rozit et son fils, sommés par le skipper de descendre en pleine croisière après qu’il eut appris qu’ils étaient Israéliens. L’homme, pris d’une tirade contre « les crimes d’Israël » et allant jusqu’à évoquer la Shoah pour justifier son refus, a refusé de les ramener au point de départ, leur proposant seulement un remboursement.
« Nous avons eu peur. J’ai même craint qu’il nous pousse à l’eau ou qu’il percute volontairement les parois des canaux », a raconté Rozit. « Il savait dans quel hôtel nous logions. Nous étions sidérés et terrifiés. » L’incident, relayé par la famille auprès de l’entreprise de navigation Those Dam Boat Guys, a immédiatement provoqué une réaction : la compagnie a licencié le skipper et présenté ses excuses officielles. « Nous n’avons aucun intérêt à employer des sous-traitants qui refuseraient de servir des clients pour quelque raison que ce soit », a déclaré la société.
Dans un communiqué, l’entreprise a tenu à rappeler que ses activités reposent sur « la tolérance propre à la culture néerlandaise » et que l’article premier de la Constitution des Pays-Bas interdit strictement toute discrimination. « Qu’il s’agisse d’une prétendue protestation politique ou non, son comportement constituait une violation de ce principe. Personne qui entend ignorer ce principe n’est autorisé à naviguer sous notre pavillon », a tranché la direction.
Le skipper a, selon l’entreprise, tenté de présenter son geste comme une « protestation contre le gouvernement israélien », une justification rejetée par la société comme par les passagers, qui y voient avant tout un acte discriminatoire. L’affaire, largement reprise dans la presse israélienne et européenne, rappelle d’autres épisodes récents où l’antisémitisme a resurgi dans des lieux inattendus – d’un service hospitalier en France à des transports publics en Allemagne.
Cet épisode, banal en apparence mais glaçant par sa violence symbolique, révèle une nouvelle fois la porosité entre militantisme politique radical et haine antijuive. Derrière le prétexte d’une « opposition à Israël », c’est bien une famille juive qui a été humiliée et mise en danger. En sanctionnant immédiatement son employé, la compagnie hollandaise a voulu réaffirmer que la tolérance n’est pas négociable. Mais l’incident montre combien les Juifs, même loin du Moyen-Orient, continuent de payer le prix de la confusion entretenue entre critique politique et rejet identitaire.
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