Autorisé à la publication | Le Président Weizmann au President syrien Hafez Assad (en 1999): « Monsieur le Président, nous devons faire la paix. »

Aryeh Schumer, qui Ă©tait le chef du bureau d’Ezer Weizman pendant son mandat Ă  la prĂ©sidence, rĂ©vĂšle de nombreux dĂ©tails sur ses longues annĂ©es passĂ©es dans l’entreprise d’Ezer, Ă  la suite de la rĂ©union inopinĂ©e qu’il avait eue avec l’ancien prĂ©sident syrien lors des obsĂšques du roi Hussein. Aujourd’hui, il est permis de raconter certains faits


Cet Ă©vĂ©nement incroyable qui a Ă©tĂ© rĂ©vĂ©lĂ© a eu lieu il y a exactement 20 ans, le 8 fĂ©vrier 1999 : le prĂ©sident Ezer Weizman et le prĂ©sident syrien Hafez Assad, pĂšre du prĂ©sident en exercice, se font face. L’un d’eux regarde dans les yeux du prĂ©sident rival. Il n’y avait pas de poignĂ©es de main, mais il y avait une atmosphĂšre de conciliation d’une rencontre humaine entre deux personnes. Weizmann, l’homme qui n’a jamais trop souffert d’inhibitions, a dit spontanĂ©ment : « Monsieur le PrĂ©sident, nous devons faire la paix. »

Assad a rĂ©pondu avec un sourire d’excuse.

C’était lors des funĂ©railles du roi Hussein de Jordanie, Ă  qui ont Ă©galement rendu visite les dirigeants des pays arabes ainsi que les dirigeants d’IsraĂ«l, l’État qui a signĂ© un traitĂ© de paix avec la Jordanie. Si ce dialogue s’eta poursuivi, il aurait peut-ĂȘtre pu changer le cours de l’histoire. Mais le prĂ©sident syrien ne lui laissa aucune chance, il murmura quelques mots polis de politesse, un demi- sourire d’excuse et continua son chemin. Quiconque peut apprendre de la situation actuelle du plateau du Golan, et un accord de paix avec les payas arabes peut comprendre la situation d’Israel.

Le sommet des prĂ©sidents Weizmann-Assad ne s’est pas poursuivi et il n’y a plus aucune documentation photographique (contrairement Ă  la poignĂ©e de main controversĂ©e de Weizman avec le chef du Front populaire de libĂ©ration de la Palestine, Nayef Hawatmeh). Les photographes n’étaient pas lĂ . Cet Ă©vĂ©nement inattendu a Ă©tĂ© gravĂ© dans la mĂ©moire du septiĂšme prĂ©sident Weizman, et Aryeh Schumer, le vice-prĂ©sident et l’homme le plus proche du prĂ©sident Weizman, si proche de lui que les PhĂ©niciens l’appelaient « Monsieur le prĂ©sident ». Et certains sont allĂ©s jusqu’à l’appeler avec humour : le prĂ©sident de l’Etat et Weizman le «vrai vice-prĂ©sident». En bref, l’homme le plus fort du pays qui peut tout organiser.

Trente ans aprĂšs le sommet Weizmann-Assad, il a reconstituĂ© l’unique preuve de la rĂ©union des prĂ©sidents choisis au hasard. Cela a Ă©tĂ© dĂ©clarĂ© dans le cimetiĂšre royal d’Amman. Le roi de Jordanie, Hussein bin Talal, est dĂ©cĂ©dĂ©. Des rois, des prĂ©sidents, des premiers ministres et des dirigeants mondiaux du monde entier sont venus Ă  Amman pour rendre un dernier hommage. Parmi eux, il y avait bien sĂ»r le prĂ©sident Assad et le prĂ©sident de l’État d’IsraĂ«l, Ezer Weizman, qui ont nouĂ© des amitiĂ©s personnelles avec son homologue jordanien.

« Les funĂ©railles ont eu lieu selon les rĂšgles de la cĂ©rĂ©monie et les organisateurs ont bien sĂ»r pris soin de sĂ©parer Weizmann des hauts reprĂ©sentants des pays arabes, mais aprĂšs l’enterrement, les murs formels ont Ă©tĂ© franchis. Le prĂ©sident de la Syrie Ă©tait difficile Ă  identifier, et lorsqu’il est passĂ© devant le visage d’Ezer, il portait une casquette qui masquait son identitĂ© bien connue et, au dernier moment, Weizmann s’est rendu compte qu’il Ă©tait en fait le prĂ©sident syrien. « Le prĂ©sident syrien a souri poliment, a secouĂ© la tĂȘte avec comprĂ©hension, a levĂ© le bras en guise d’adieu et il est parti. »

Aujourd’hui, Schumer rĂ©vĂšle qu’Ezer Weizman estimait qu’il pourrait rencontrer Asad Ă  l’enterrement et prĂ©voyait de soulever un problĂšme inhabituel : le retour des ossements de l’agent du Mossad Eli Cohen en IsraĂ«l. Assad n’a pas voulu Ă©couter la demande de Weizmann.

Weizman, selon Schumer, a blessĂ© la famille Cohen, qui partageait son dĂ©sir d’amener l’espion lĂ©gendaire sur la tombe d’IsraĂ«l. Nadia Cohen s’est rendue plusieurs fois au bureau du prĂ©sident Ă  JĂ©rusalem et lui a demandĂ© de se tourner vers Assad pour exprimer sa douleur et sa demande. Weizmann a acceptĂ© l’homme d’État espagnol Miguel Moratinos, haut reprĂ©sentant de l’Union europĂ©enne pour le processus de paix au Moyen-Orient de 1996 Ă  2003. Weizman lui a confiĂ© une lettre personnelle polie et touchante adressĂ©e Ă  Son Excellence le prĂ©sident Assad sur la question de la mise en terre d’Eli Cohen. IsraĂ«l Moratinos, courant alors entre les capitales du Moyen-Orient, a promis de lui donner. Mais cette correspondance n’a pas non plus Ă©tĂ© suivie. Schumer sait qu’Assad a reçu la lettre, mais s’est abstenu de rĂ©pondre.

Weizmann, qui a commencĂ© sa carriĂšre en tant que faucon et fut l’un des artisans de la victoire du Likoud aux Ă©lections de 1977, devint un pigeon blanc qui recherchait la paix Ă  tout prix avec les Palestiniens et profitait de son rĂŽle prĂ©sidentiel pour mener sa propre politique indĂ©pendante. Par exemple, il a presque contraint le Premier ministre Benjamin Netanyahu, qui n’avait aucune expĂ©rience politique aprĂšs sa premiĂšre Ă©lection en 1996, d’appliquer l’accord de HĂ©bron pour transfĂ©rer la plus grande partie du territoire d’HĂ©bron sous le contrĂŽle d’Arafat.

Lors de ces Ă©lections, qui se sont dĂ©roulĂ©es dans le contexte de l’assassinat de Rabin, l’ancien faucon Weizman Ă©tait dĂ©jĂ  une colombe politique. Cependant, selon Schumer, lorsque Netanyahu s’est directement attaquĂ© Ă  Shimon Peres, l’un des architectes d’Oslo, il a votĂ© pour Netanyahu car il Ă©tait certain de pouvoir canaliser Netanyahu dans les directions qui l’intĂ©ressaient : « Nous allons retrancher Bibi », a promis Weizman Ă  Schumer, un confident qui dirigeait auparavant la branche Bnei Akiva Ă  Tel Aviv, qui s’est rendu Ă  Shamir en solidaritĂ© avec le cĂ©lĂšbre patron Ezer.

À l’époque, la question de l’achĂšvement de la mise en Ɠuvre de l’Accord d’HĂ©bron faisait partie de l’Accord d’Oslo II, qui traitait d’un nouveau dĂ©ploiement israĂ©lien Ă  HĂ©bron. La ville des patriarches Ă©tait alors la seule ville arabe Ă  rester entiĂšrement sous le contrĂŽle d’IsraĂ«l. L’accord non signĂ© permet toujours de diviser la ville des patriarches en deux parties inĂ©gales : 80% pour les Arabes et le reste pour les IsraĂ©liens. Weizman a compris que les deux parties ont du mal Ă  digĂ©rer l’accord, chacune avec ses propres arguments. Weizman a estimĂ© qu’une rĂ©union directe entre Netanyahu et Arafat ferait avancer l’accord: « Les tĂȘtes de Netanyahu et d’Arafat devraient ĂȘtre giflĂ©es ensemble », a-t-il dĂ©clarĂ© sur un ton sarcastique.

C’est aprĂšs les combats du tunnel du Mur occidental entre les forces de Tsahal et les forces palestiniennes du mois de Tichri 5757 (1997) que l’un des deux petits-dĂ©jeuners a lieu une fois par semaine Ă  la rĂ©sidence du prĂ©sident, l’hĂŽte Weizmann a informĂ© son invitĂ© qu’il avait dĂ©cidĂ© d’inviter Arafat Ă  la rĂ©sidence du prĂ©sident Ă  JĂ©rusalem. Netanyahu entendit et frissonna.

Aryeh Schumer, qui n’a pas assistĂ© Ă  ces petits dĂ©jeuners, a Ă©tĂ© la deuxiĂšme personne de l’univers Ă  entendre parler de la nouvelle initiative de Weizmann. Le prĂ©sident lui a dit qu’il avait Ă©voquĂ© cette possibilitĂ©, comme une question purement thĂ©orique, lors d’entretiens avec les dirigeants du Shin Bet, du Mossad et de Peres, et avait entendu leurs recommandations positives, mais que c’était la premiĂšre fois qu’il dĂ©cidait de rĂ©aliser une percĂ©e dans le dossier de HĂ©bron. « Es-tu fou ? » Cria Schumer, qui se voyait Ă©galement responsable des dĂ©cisions du prĂ©sident. « Vous ĂȘtes fou de l’inviter ici, ça ne va pas passer, ni au gouvernement ni au public, il y a une limite », a averti Schumer. Enfin, il l’a orientĂ© vers la solution plus raisonnable et moins formelle –

Inviter Arafat chez lui Ă  CĂ©sarĂ©e. « Je lui ai dit que c’était vraiment une bonne idĂ©e », se souvient Schumer.

Lorsque le prĂ©sident et son adjoint se sont mis d’accord sur la tactique Ă  adopter, Weizmann a ordonnĂ© Ă  Shumar de prendre des dispositions techniques avec l’armĂ©e israĂ©lienne pour un hĂ©licoptĂšre palestinien volant vers CĂ©sarĂ©e : «J’ai pris un hĂ©licoptĂšre pour Gaza, oĂč nous avons rĂ©uni Arafat, Muhammad Dahlan et Jibril Raja, quand nous sommes arrivĂ©s Ă  CĂ©sarĂ©e, je suis descendu avec Arafat et son escorte et les ai accompagnĂ©s chez Weizmann. Le prĂ©sident l’a attendu, lui a serrĂ© la main chaleureusement, mais Ă©tait rĂ©ticent Ă  utiliser le pistolet Ă  sa ceinture. « A dĂ©clarĂ© Weizmann Ă  son invitĂ©, ‘ici vous ne pouvez pas porter une arme. » Arafat sortit le pistolet et le passa Ă  l’un de ses assistants, puis les deux entrĂšrent dans la piĂšce. Il y eu une longue conversation en privĂ©. Je n’ai pas reçu le compte rendu de la conversation, mais j’ai compris qu’ils mettaient en Ɠuvre l’accord d’HĂ©bron pour permettre aux Juifs de rester dans leurs quartiers, en laissant la grotte des Patriarches « .


RĂ©daction francophone Infos Israel News pour l’actualitĂ© israĂ©lienne
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