Vous l’avez sûrement remarqué : boire un café dans un gobelet en carton vous coûte presque autant qu’un repas complet il y a quelques années. Quant au shawarma, autrefois collation populaire du midi, il s’approche dangereusement des 50 shekels dans certaines villes. Même le simple falafel – symbole national de la cuisine israélienne accessible – ne fait plus partie des “plats du pauvre”.
La flambée des prix touche tous les secteurs, mais celle de la restauration rapide et de la consommation courante est devenue insupportable pour le citoyen israélien moyen. Alors, que se passe-t-il vraiment ? Pourquoi le café coûte-t-il plus cher qu’un litre d’essence ? Et surtout : qui profite réellement de cette inflation galopante ?
Un pouvoir d’achat en chute libre
Depuis le début de la guerre contre le Hamas en octobre 2023, l’économie israélienne subit une pression inédite. Mobilisation massive, hausse du coût des importations, crise du logement et instabilité politique ont créé une tempête économique.
Mais pendant que l’État tente de contenir les dégâts, certains secteurs – comme celui de la restauration rapide – semblent en profiter allègrement. Les prix augmentent, sans que la qualité, le service ou les matières premières ne suivent.
Les dons sont la bienvenue en cette situation particulièrement difficile :
Un simple cappuccino dans une chaîne connue ? 18 à 22 shekels. Un shawarma avec boisson ? 45 à 60 shekels. Un sandwich thon-salade ? 38 shekels.
Et pourtant, le salaire moyen ne suit pas.
Les restaurateurs pointés du doigt
Selon une enquête de la chaîne Channel 12, les marges bénéficiaires des restaurateurs sur certains produits ont doublé en moins de deux ans.
– Une tasse de café coûte environ 1,80 shekel à produire (eau, grains, tasse, électricité).
– Elle est vendue en moyenne entre 14 et 22 shekels.
Idem pour le falafel : la matière première (pois chiches, huile, pain pita, condiments) revient à environ 4 shekels par portion. Et pourtant, le prix affiché peut atteindre 22 à 28 shekels dans les centres urbains.
Les restaurateurs justifient cela par la hausse des loyers, du personnel, des taxes. Mais pour les consommateurs, cela ressemble de plus en plus à un abus.
La guerre comme excuse ?
Il est évident que la guerre a perturbé les chaînes d’approvisionnement, augmenté les coûts de transport, et limité les heures d’ouverture. Mais faut-il pour autant multiplier les prix par deux ?
Certains professionnels du secteur avouent en privé que la situation leur permet de “passer des hausses discrètement”, profitant de la confusion générale. D’autres admettent que la concurrence a disparu dans certains quartiers, permettant d’imposer des tarifs sans justification.
Et le plus étonnant ? Les franchises internationales, pourtant soumises aux mêmes règles économiques, n’ont pas augmenté leurs prix dans les mêmes proportions.
L’État réagit… timidement
Face à la grogne populaire, le ministère de l’Économie a lancé une enquête sur les marges abusives, en particulier dans les produits alimentaires de base. Mais les moyens restent limités, et les restaurateurs échappent souvent au contrôle des prix.
Le gouvernement envisage la mise en place de “menus à prix plafonné”, notamment pour les étudiants et les soldats. Mais pour l’instant, ces annonces restent théoriques.
Dans l’opposition, certains députés réclament un contrôle renforcé des chaînes de restauration, et même des amendes pour ceux qui gonflent artificiellement leurs prix.
Une classe moyenne asphyxiée
Ce phénomène touche directement les familles israéliennes, les jeunes couples, les étudiants, les réservistes. Manger à l’extérieur est devenu un luxe. Même une sortie au parc, avec un café et une glace, dépasse facilement les 100 shekels à deux.
De plus en plus de familles se rabattent sur des repas faits maison, sur des sandwicheries communautaires, ou sur la cuisine partagée via les réseaux sociaux. La classe moyenne israélienne, pourtant pilier de l’économie, est poussée vers des choix de consommation dignes d’une période d’austérité.
Le cas du shawarma : une icône défigurée
Autrefois symbole de la rue israélienne, le shawarma est aujourd’hui devenu un produit de luxe. Dans les centres de Tel-Aviv, il dépasse les 50 shekels, sans boisson. À Jérusalem, il peut frôler les 60 avec accompagnements.
Les vendeurs de shawarma invoquent l’augmentation du prix de la viande, de l’huile, du gaz. Mais là aussi, les chiffres montrent que les marges sont parfois démesurées.
La frustration est d’autant plus grande que le shawarma, plat populaire par excellence, est devenu inaccessible pour les mêmes classes sociales qui l’ont rendu célèbre.
Le rôle des grandes chaînes
Les chaînes de café, de boulangerie ou de restauration rapide ont souvent des conditions d’achat préférentielles, des partenariats avec des fournisseurs, des réseaux logistiques efficaces. Pourtant, elles sont parmi les premières à avoir augmenté leurs prix.
Certaines exploitent leur notoriété pour faire payer cher un produit standardisé. D’autres ajoutent des frais invisibles (service, emballage, supplément pour le lait végétal…) pour augmenter discrètement la facture.
Le marketing remplace la qualité. Le prestige remplace la transparence.
Une réaction citoyenne en cours ?
Face à cette situation, certains Israéliens commencent à boycotter les établissements aux prix abusifs. Des groupes Facebook recensent les “bons plans”, les restaurants “éthiques”, ou encore les shawarma à moins de 30 shekels – devenus presque des légendes urbaines.
Des restaurateurs indépendants, eux, jouent la carte de la transparence. Ils affichent le coût réel de leurs produits, s’engagent à limiter les hausses, et misent sur la fidélité de la clientèle. Le résultat ? Un soutien massif, des files d’attente, et une réputation grandissante.
Un symbole de crise sociétale
Cette flambée des prix n’est pas qu’un phénomène économique : elle symbolise une fracture sociale croissante. D’un côté, une élite qui peut se permettre les brunchs à 120 shekels. De l’autre, une majorité qui doit compter chaque pièce de 10.
Ce fossé, accentué par la guerre, les inégalités et la spéculation, met en péril le tissu social israélien.
Mais il révèle aussi la résilience d’un peuple, qui sait s’adapter, contourner les obstacles, et créer de la solidarité même face à l’absurde.
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