Ce film présente les Juifs ultra-orthodoxes comme les gangsters les plus violents et impitoyables de New York

Le dernier film de Darren Aronofsky, Caught Red-Handed (נתפסו על חם), divise déjà critiques et spectateurs. Moins sombre que les précédents opus du réalisateur de Requiem for a Dream ou Black Swan, il surprend toutefois par sa représentation inédite – et controversée – de personnages juifs ultra-orthodoxes incarnés comme des criminels redoutables au cœur de New York.

Aronofsky, cinéaste new-yorkais d’origine juive, a choisi cette fois-ci d’adapter un roman noir de Charlie Huston. Le récit suit un jeune barman californien, joué par Austin Butler, dont la carrière sportive brisée le propulse malgré lui dans un engrenage criminel. Au fil des événements, le héros croise une galerie de personnages hauts en couleur : voyous d’Europe de l’Est, flics corrompus, mafieux italiens, mais aussi… deux frères hassidiques impitoyables.

Ces derniers, incarnés par Vincent D’Onofrio et Liev Schreiber, sont décrits comme profondément religieux : respectueux du shabbat, soucieux de ne pas allumer le feu le samedi, attachés à leur mère juive incarnée par l’inimitable Carol Kane. Mais derrière cette façade pieuse, ils n’hésitent pas à exécuter froidement leurs ennemis. Dans une scène marquante, ils confient à leur mère que leur nouveau complice est « à moitié juif » et la rassurent : « C’est lui qui conduira pendant le shabbat. » L’humour noir fuse, mêlant rigueur religieuse et violence mafieuse.

Cette représentation soulève un paradoxe. Pour certains, voir des Juifs ultra-orthodoxes réduits à des caricatures de gangsters impitoyables dans un thriller hollywoodien peut paraître déplacé, surtout dans une période où l’antisémitisme progresse en Europe et aux États-Unis. D’autres, au contraire, y voient une rupture avec le stéréotype récurrent du Juif fragile et persécuté : « Ici, ce sont eux les durs à cuire », commente un critique cité par Infos-Israel.News (infos-israel.news).

Aronofsky n’est pas un cinéaste étranger à ces questions. Lui-même issu d’un milieu juif et régulièrement proche d’Israël, il n’a jamais caché sa volonté de complexifier les représentations. Quant à Liev Schreiber, il revendique son identité juive et son attachement à Israël. Difficile, dès lors, d’y voir une charge antisémite, même si l’effet à l’écran reste ambigu.

Sur le plan cinématographique, Caught Red-Handed n’atteint pas la puissance tragique de The Whale ou de Black Swan. Le film se veut plus léger, ponctué de scènes d’action, d’humour noir et de références pop-culture. Mais derrière le divertissement, il laisse planer une question brûlante : quelle image de la communauté juive retient-on ? Des hommes de foi tiraillés entre piété familiale et violence urbaine, ou de simples stéréotypes recyclés dans un polar ?

Austin Butler, en revanche, confirme son statut de star montante. Après Elvis, rôle qui lui a valu une nomination aux Oscars, il s’impose ici comme un acteur charismatique, portant le film de bout en bout avec une intensité impressionnante. Sa performance, associée à la mise en scène nerveuse d’Aronofsky, sauve un scénario parfois convenu.

En définitive, Caught Red-Handed ne marquera peut-être pas l’histoire du cinéma. Mais il restera comme l’un des rares films hollywoodiens où la culture juive orthodoxe occupe une place centrale, entre ironie, caricature et fascination. Et à l’heure où les représentations façonnent l’opinion, ce choix esthétique ne manquera pas de nourrir le débat.

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