Cessez-le-feu, bombardements et confusion politique : IsraĂ«l s’interroge

En moins de vingt-quatre heures, IsraĂ«l a connu une sĂ©quence politique et militaire aussi rapide qu’incohĂ©rente : rupture du cessez-le-feu par le Hamas, riposte massive de Tsahal, suspension de l’aide humanitaire, puis reprise de la trĂȘve. Une cacophonie de communiquĂ©s qui interroge sur la cohĂ©sion du commandement israĂ©lien.

Tout a commencĂ© dimanche matin, lorsque le Hamas a violĂ© une nouvelle fois le cessez-le-feu par des tirs en direction du sud d’IsraĂ«l. Tsahal a aussitĂŽt rĂ©pliquĂ© par une sĂ©rie de frappes aĂ©riennes d’une intensitĂ© rare, visant des positions terroristes dans la bande de Gaza. Le porte-parole militaire a dĂ©clarĂ© que « l’armĂ©e continuerait d’agir contre toute menace Ă  l’encontre de l’État d’IsraĂ«l ».

Mais quelques heures plus tard, un autre message, bien diffĂ©rent, a circulĂ© : les camions d’aide humanitaire Ă©taient stoppĂ©s Ă  la frontiĂšre, puis autorisĂ©s de nouveau. Et cette reprise de l’assistance a Ă©tĂ© annoncĂ©e non pas par le gouvernement, mais par un â€œŚ’Ś•ŚšŚ ŚžŚ“Ś™Ś Ś™â€ – un « responsable politique » anonyme citĂ© dans les mĂ©dias israĂ©liens. Enfin, Ă  21h17, c’est Tsahal lui-mĂȘme qui a publiĂ© un troisiĂšme communiquĂ© :

« ConformĂ©ment aux directives du gouvernement et aprĂšs une sĂ©rie de frappes significatives, l’armĂ©e reprend l’application du cessez-le-feu. Tsahal continuera d’agir fermement contre toute violation de l’accord. »

Trois messages, trois voix, un seul pays — mais un sentiment croissant de dĂ©sordre au sommet.

Le message brouillé du pouvoir

Le journaliste Amir Segal, dont les analyses sont suivies par des centaines de milliers d’IsraĂ©liens, a rĂ©sumĂ© la situation avec une ironie amĂšre :

« Pour la reprise de la guerre, c’est le bureau du Premier ministre qui parle. Pour la reprise de l’aide humanitaire, c’est un â€œŚ’Ś•ŚšŚ ŚžŚ“Ś™Ś Ś™â€. Et pour la reprise du cessez-le-feu, c’est Tsahal. »

Cette confusion institutionnelle traduit un malaise plus profond : une crise d’autoritĂ© et de communication entre les diffĂ©rentes sphĂšres du pouvoir israĂ©lien – politique, diplomatique et militaire.
Alors que la sociĂ©tĂ© israĂ©lienne reste sous le choc des attaques du 7 octobre et des pertes rĂ©centes Ă  Rafah, le sentiment d’une direction fragmentĂ©e alimente la colĂšre. Sur les rĂ©seaux sociaux, de nombreux IsraĂ©liens ont dĂ©noncĂ© une « gestion Ă  trois tĂȘtes » oĂč chacun semble parler dans le vide.

Une dissonance stratégique

Le problĂšme dĂ©passe la communication. DerriĂšre ces annonces contradictoires se cache un dĂ©saccord sur la stratĂ©gie de long terme : faut-il privilĂ©gier la trĂȘve humanitaire et la pression internationale pour dĂ©sarmer le Hamas, comme le prĂ©conisent Washington et plusieurs pays arabes modĂ©rĂ©s ?
Ou faut-il, au contraire, reprendre une offensive terrestre complÚte, comme le souhaitent de nombreux responsables israéliens, convaincus que seule la destruction totale du Hamas garantira la sécurité du pays ?

Selon des sources proches de la coalition, le cabinet de guerre reste divisĂ©. Certains ministres redoutent que l’opinion publique internationale se retourne contre IsraĂ«l en cas de reprise des combats, tandis que d’autres, notamment au Likoud et chez les partenaires de droite, estiment que « la retenue prolongĂ©e Ă©quivaut Ă  une dĂ©faite morale ».

Le contraste est d’autant plus frappant que sur le terrain, Tsahal agit avec mĂ©thode et cohĂ©rence. L’armĂ©e, concentrĂ©e sur la neutralisation des tunnels et la surveillance de Khan YounĂšs, applique les dĂ©cisions opĂ©rationnelles sans relĂąche. Ce fossĂ© entre le professionnalisme militaire et les hĂ©sitations politiques accentue le sentiment d’un pays en tension interne.

L’équilibre fragile entre dissuasion et diplomatie

Israël se trouve désormais dans une posture inconfortable : maintenir le cessez-le-feu pour préserver les discussions sur le retour des otages, tout en démontrant sa force pour éviter que le Hamas ne reprenne confiance.
Chaque frappe, chaque camion humanitaire, chaque déclaration devient un test de cohérence nationale.
Comme l’écrit Segal : « Le vĂ©ritable enjeu n’est pas la trĂȘve d’un jour ou d’une semaine, mais la capacitĂ© d’IsraĂ«l Ă  parler d’une seule voix quand il s’agit de sa sĂ©curitĂ©. »

Cette remarque rĂ©sonne comme un avertissement. Car dans le chaos politique actuel, le Hamas et ses alliĂ©s voient un signe de fragilitĂ©. La cohĂ©rence du message israĂ©lien – celle qui, historiquement, faisait trembler ses ennemis – semble se fissurer sous la pression des Ă©quilibres diplomatiques.

Une leçon à tirer

À force de jongler entre diplomatie, humanitĂ© et sĂ©curitĂ©, IsraĂ«l risque de brouiller l’image de fermetĂ© qui lui a valu le respect et la dissuasion. Le public israĂ©lien attend moins de discours que de direction.
Et comme l’a rĂ©sumĂ© un ancien chef d’état-major dans Infos-Israel.News :

« En Israël, la guerre se gagne aussi à Jérusalem. Pas seulement à Gaza. »


RĂ©daction francophone Infos Israel News pour l’actualitĂ© israĂ©lienne
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