Dans le monde humain, il semble que la diversitĂ© fasse problĂšme, dâemblĂ©e. Il nous est Ă©trangement difficile dâaccepter la diversitĂ© humaine, comme telle.
Il est certes naturel que nous Ă©tablissions, plus facilement, des liens avec des personnes dâhorizons similaires, nous hĂ©sitons souvent Ă frĂ©quenter, ou Ă travailler, avec des communautĂ©s culturelles trĂšs diffĂ©rentes des nĂŽtres. Cela conduit inĂ©vitablement Ă une situation dans laquelle nous sommes ignorants de ce qui se passe au-delĂ de nos propres murs, dans dâautres communautĂ©s, dâautres rĂ©gions de ce pays oĂč nous rĂ©sidons.
En consĂ©quence, et tout naturellement, nous commençons Ă nous mĂ©fier de tout ce qui est diffĂšrent, la crainte par insuffisance, la peur par mĂ©diocritĂ©, servent la bĂȘtise, la malveillance et les rivalitĂ©s.
LâunitĂ© ne peut aboutir sans abandonner nos mauvais penchants, sans cesser de rechercher le non-conformisme rassurant et cesser de vouloir imposer lâuniformitĂ©.
Cela concerne tout dâabord la cellule familiale, source premiĂšre de lâĂ©ducation intime, puis la citĂ© ouverte vers lâĂȘtre social et enfin mon pays dans son ensemble. Partager les mĂȘmes valeurs, la mĂȘme culture, la mĂȘme origine, les mĂȘmes us et coutumes, nâa jamais empĂȘchĂ© les conflits et les drames. Toutefois, nous ne pouvons pas ignorer la rĂ©alitĂ© : dans notre pays, nous ne partageons pas tous les mĂȘmes valeurs, nous ne suivons pas une seule et mĂȘme pratique religieuse et nous venons, pour beaucoup, de cultures diffĂ©rentes.
Pour jouir de la paix, de la prospĂ©ritĂ© et de la dĂ©mocratie, nous devons dâabord reconnaĂźtre que nous ne serons jamais tous identiques, mĂȘme si HĂ©breux.
Nous pouvons alors nous efforcer de dĂ©velopper lâunitĂ© par le respect mutuel et la tolĂ©rance pour nos diffĂ©rences. Lâun des moyens de rĂ©aliser lâunitĂ© consiste Ă interagir avec des personnes dâorigines diffĂ©rentes des nĂŽtres. GrĂące Ă cela, nous pouvons comprendre et respecter les cultures de chacun. Progressivement, nous commencerons Ă comprendre les joies, les difficultĂ©s et les griefs des autres.
Pour moi, vivre dans une société uniforme serait plutÎt ennuyeux.
Pour ma part, je choisirai toujours de vivre parmi des personnes appartenant à des systÚmes sociaux différents, aux opinions politiques et aux appartenances religieuses différentes.
Cet environnement est nettement plus passionnant, avantageux et profitable.
Mais changer notre façon de penser, de nous comporter et dâinteragir avec les autres nâest pas une entreprise facile.
Nous devons changer radicalement notre maniĂšre de faire.
Cela nous oblige Ă nous interroger.
Cela nous oblige Ă ĂȘtre plus conscients de notre environnement.
Nous devons ĂȘtre assez courageux pour nous mĂȘler Ă des groupes inconnus et explorer de nouveaux domaines. Ainsi, la prochaine fois que nous prononcerons le mot « unité », rĂ©flĂ©chissons dâabord si nous le pensons vraiment ou non.
Si le problĂšme nâest pas un manque de terrain dâentente, si nous sommes toujours unis par notre hĂ©ritage, par notre destin, alors peut-ĂȘtre que le problĂšme se trouve ailleurs?
Peut-ĂȘtre est-ce un problĂšme dâidĂ©ologie ?
Il est vrai que nous, Juifs, nous empressons de nous stéréotyper.
Des porte-paroles orthodoxes accusent des rabbins non orthodoxes dâĂȘtre des « clowns » et affirment que les autres mouvements ont abandonnĂ© la Torah ou lâont ajustĂ©e pour lâadapter Ă leurs fantaisies prĂ©fĂ©rĂ©es.
Les leaders des mouvements sĂ©culiers, eux, affirment que ces derniers sont des superstitieux mĂ©diĂ©vaux (est-ce vraiment une si mauvaise chose?) Et quâils ne se prĂ©occupent que de la minutie rituelle plutĂŽt que des glorieux mandats Ă©thiques qui animent la tradition juive.
Dans ces accusations, nous jetons lâun sur lâautre lâopprobre, il y a juste assez de vĂ©ritĂ© des deux cĂŽtĂ©s pour nous mettre tous mal Ă lâaise. Mais il nâest pas difficile de percevoir la voix lĂ©sĂ©e de la victime, qui cherche Ă panser ses propres blessures en faisant du mal Ă dâautres. Le âclichĂ©â nâest finalement pas utile : cela ne renforce pas notre identitĂ© et nâaide pas les autres Ă mieux nous comprendre.
Notre peuple, fidĂšle Ă lui-mĂȘme, demeure capable du meilleur et du pire, un peuple contentieux.
La controverse fait partie intégrante de la prise au sérieux des idées.
Malheur Ă nous si jamais nous considĂ©rons nos idĂ©es et nos opinions comme caducs et ne valant plus la peine dâĂȘtre argumentĂ©es.
Quel état voulons-nous ?
Quelle société aspirons-nous?
Certes, nos diffĂ©rences ne peuvent ĂȘtre balayĂ©es, ni mĂȘme minimisĂ©es, mais la rĂ©ponse biensĂ©ante, face Ă des opinions divergentes, demeure davantage la discussion que le pugilat.
Se rencontrer et partager de cette maniĂšre nâexige pas lâoctroi de lâauthenticitĂ©, ni la reconnaissance dâune ouverture intellectuelle. Tout ce quâil faut, câest un dĂ©sir dâĂȘtre ensemble, la volontĂ© de sâĂ©couter les uns les autres et la capacitĂ© dâexprimer son dĂ©saccord dâune maniĂšre attentionnĂ©e et constructive.
Les Juifs, dans leur grande majoritĂ©, poursuivent, bienheureusement, cette voie et tentent dây persĂ©vĂ©rer, sans se soucier des titres provocateurs et subversifs Ă la une des medias israĂ©liens.
Si nous nâapprenons pas Ă parler les uns avec les autres de maniĂšre respectueuse, si nous ne pouvons pas exprimer les domaines importants dans lesquels nous diffĂ©rons avec dignitĂ© et compassion, nous briserons lâunitĂ© du peuple.
Il y a une diffĂ©rence entre lâunitĂ© et lâuniformitĂ©.
Nous nâavons jamais Ă©tĂ© un peuple uniforme, mais nous avons pu maintenir lâunitĂ© malgrĂ© nos discordes. Cette nĂ©cessitĂ© est encore, et toujours, Ă lâordre et au goĂ»t du jour.
Sur le plan personnel, cela signifie que pour le bien de Sion, je ne peux pas autoriser ma passion, pour lâHĂ©braĂŻsme renaissant, Ă diffamer les chemins de vie de mes autres compatriotes IsraĂ©liens.
Tous ensemble ou pas du tout.
En attendant, nous devrions peut-ĂȘtre travailler un peu plus fort pour nous traiter tous ensemble avec un minimum de dignitĂ©, de retenue et, jâose dire, dâamour?
LâAmour dâIsraĂ«l est un commandement aprĂšs tout!
Toutes les sociĂ©tĂ©s exigent un certain degrĂ© dâharmonie et de bonne volontĂ©. La cohĂ©sion sociale est essentielle Ă la prospĂ©ritĂ© et au succĂšs. Pour le peuple dâIsraĂ«l, toutefois, lâunitĂ© nâest pas simplement un moyen dâatteindre des objectifs matĂ©riels.
LâunitĂ© sociale est une valeur beaucoup plus grande, un objectif en soi.
Il existe une seconde diffĂ©rence entre lâunitĂ© recherchĂ©e par le peuple dâIsraĂ«l et celle des autres nations.
Une sociĂ©tĂ© peut ĂȘtre unifiĂ©e de deux maniĂšres: en actes et en pensĂ©es. « Lâharmonie dans lâaction» dĂ©signe des actions concrĂštes visant Ă aider ses voisins ou Ă contribuer Ă la nation dans son ensemble. « Lâharmonie a travers une alliance de vocation » signifie altĂ©ritĂ© et amour quant au devenir de son peuple.
Toutes les nations ont besoin de ces deux formes, mais seule une coopĂ©ration concrĂšte est essentielle Ă la rĂ©alisation des objectifs matĂ©riels dâune nation.
Pour les HĂ©breux, cependant, la paix est une condition prĂ©alable Ă la prĂ©sence de Dieu et Ă une providence originale, et cette paix dĂ©pend, principalement, de lâunitĂ© dans le cĆur.
Ainsi, pour IsraĂ«l, « lâunanimitĂ© quant Ă lâalliance de vocation » est lâobjectif ultime, alors que « lâunitĂ© dâaction » est un moyen de lâentĂ©riner et de lâassurer.