CONTE A REBOURS –

 

Certains d’entre nous, qui se veulent « modernistes », considĂšrent notre Torah comme un conte pour enfants sages oĂč on remplace l’ogre par Pharaon, le Prince Charmant par MoĂŻse et la Belle Princesse par Esther. « Si encore, disent-ils de façon ironique, elle commençait de façon classique par : Il Ă©tait une fois
 ! »

 

« Il Ă©tait une foi  », la formule serait bien orthographiĂ©e sans “s” mais elle serait fausse. « Pourquoi donc ? » me demanderont-ils ! D’abord parce que notre foi, en hĂ©breu « notre Ă©mouna » (ŚŚžŚ•Ś Ś” – “alĂšph”, “mĂšm”, “vav”, “noun” et “hey” – traduction exacte: « fidĂ©lité », « confiance ») n’est pas une simple « croyance ». Et si le terme amen (ŚŚžŚŸ – “alĂšph”, “mĂšm” et “noun” final) vient de la mĂȘme racine
 il ne veut pas dire « Ainsi soit-il ! », vƓu passif plus qu’engagement actif. En effet, de nombreux Sages juifs n’ont pas manquĂ© de noter le rapprochement avec imoun (ŚŚžŚ•ŚŸ – “alĂšph”, “mĂšm”, “vav”, “noun” final) : « l’exercice » ou « l’entraĂźnement ». L’ñme humaine doit en effet ĂȘtre active et non passive, « s’entraĂźner » pour s’élever et non stagner dans une croyance bĂ©ate, « s’exercer » pour acquĂ©rir de l’expĂ©rience : naasĂ© vĂ© nichma (Ś ŚąŚ©Ś” Ś•Ś Ś©ŚžŚą – « Nous ferons et nous Ă©couterons ») comme nous nous y sommes engagĂ©s avant mĂȘme que MochĂ© ne reçoive la Torah. De plus, Ă  l’inverse des autres monothĂ©ismes, notre Ă©mouna ne se base pas sur le tĂ©moignage indirect « d’un homme qui a entendu un homme dire que  » ! Elle repose sur des faits prĂ©cis et incontestables : quelque 603.550 enfants d’IsraĂ«l bien vivants – sans compter les femmes, les vieillards, les enfants et les membres de la tribu de LĂ©vy (selon le dĂ©nombrement rapportĂ© dans BĂ©midbar I, 46) – furent tĂ©moins des miracles que HachĂšm a accompli pour nous au sortir de l’Egypte, dans le dĂ©sert et lors de la promulgation de la Torah. Pensez-vous sĂ©rieusement que, si ce rĂ©cit n’était qu’un roman issu d’une imagination fĂ©conde, la majoritĂ© de leurs enfants, de leurs petits-enfants, ne se serait levĂ©e pour dĂ©noncer l’imposture ? Mieux ! Toutes les prĂ©dictions de nos prophĂštes se sont rĂ©alisĂ©es ou sont en train de l’ĂȘtre. Notre Ă©mouna s’inscrit non seulement dans le passĂ© mais aussi dans le prĂ©sent et dans le futur
 sans compter l’espace ! En hĂ©breu, on le sait, le monde matĂ©riel se dit olam (ŚąŚ•ŚœŚ – “ayin”, “vav”, “lamed”, “mĂšm” terminal), ce qui inclut une dimension temporelle (olam dans le sens de « temps ») et une dimension spatiale (olam dans le sens de « univers »). Cette dimension spatio-temporelle – qui sous-tend la thĂ©orie de la relativitĂ©, dans laquelle Einstein a fait du « temps » la quatriĂšme dimension du continuum espace/temps – est une invite Ă  reconnaĂźtre la source rĂ©elle, intĂ©rieure, de la rĂ©alitĂ© matĂ©rielle, c’est-Ă -dire le CrĂ©ateur qui Se cache derriĂšre ce masque naturel, physique (olam s’inscrit Ă©galement dans la racine du mot né’élam – Ś ŚąŚœŚÂ : “noun”, “ayin”, “lamed”, “mĂšm” terminal – « cachĂ©, mystĂ©rieux »). Le « travail » de l’homme consiste Ă  dĂ©couvrir D‑ieu par-delĂ  la nature. Le but de cet effort intellectuel – en hĂ©breu amal, ŚąŚžŚœ: “ayin”, “mĂšm”, “lamed”, trois lettres que l’on trouve Ă©galement dans la racine du mot olam – n’est pas la jouissance, bien que celle-ci puisse ĂȘtre un moyen pour arriver au but.

C’est ce qui nous sĂ©pare actuellement des nations et c’est probablement une des raisons de l’antisĂ©mitisme. Si, depuis que notre peuple existe et jusqu’à nos jours, les nations (1) se sont penchĂ©es sur ce que certains ont nommĂ© « la question juive » – transformĂ©e par d’autres en « problĂšme juif » – c’est, sans aucun doute, que cette prĂ©occupation leur semble – en leur subconscient – centrale, primordiale, pour l’humanitĂ©. En effet, le seul fait que cette « interrogation », cette « difficulté », ait touchĂ© toutes les civilisations cĂŽtoyĂ©es par le judaĂŻsme, et toutes les Ă©poques (2), est bien la preuve que – intuitivement – le non-juif donne Ă  cette « question », ce « problĂšme » – sa « question », son « problĂšme » – une importance existentielle. Pour plagier, a contrario, Jean-Paul Sartre (3) : « Nous verrons tout Ă  l’heure que la racine de l’inquiĂ©tude des nations, c’est cette nĂ©cessitĂ© mĂ©taphysique oĂč est le goy (4)  de s’interroger sans cesse et finalement de prendre inconsciemment parti sur le personnage fantĂŽme, inconnu et familier, insaisissable et tout proche, qui le hante et qui n’est autre que le juif, le juif que son Ăąme lui dit devoir ĂȘtre exemplaire”
 mais que toute sa raison, atavique et subjective, lui fait rejeter avec horreur ! Pourtant, si « questionnement philosophique » de l’existentiel il y a, le « Peuple du Livre » sait, lui, que la bonne interrogation pour rĂ©soudre cette recherche d’ordre spĂ©culatif n’est pas seulement « juive » mais qu’elle transcende les peuples, le temps et la matĂ©rialité : la vraie, la bonne, question Ă  poser, « La question de l’Homme », est : « Quelles sont la raison premiĂšre et la finalitĂ© de la CrĂ©ation ? » La Torah, en est la rĂ©ponse juive qui nous l’explique et, ce faisant, nous rend son Ă©clairage quant aux grands dĂ©bats Ă©thiques actuels.

 

La conception de l’univers que se font les nations, coincĂ©es dans un entendement Ă©triquĂ© de l’espace/temps/ego – concevant l’espace aux seules dimensions physiques, voulant « tuer le temps » et rĂ©duisant leur ego au « je » exclusif – ne peut atteindre cette dimension et ne peut que stagner dans la civilisation de l’instant-prĂ©sent, devenue aujourd’hui – mondialisme aidant – la civilisation du (de la) « main-tenant » (5). Incapables de se plonger dans le passĂ© et/ou le futur, d’élever leurs pensĂ©es au-delĂ  les menhirs, obĂ©lisques ou autres flĂšches des lieux sacrĂ©s locaux, de sortir de leur Ă©gotisme absolu, leurs philosophes – et autres « gourous » – cherchent alors dans leur environnement immĂ©diat un modĂšle « matĂ©riel » devant leur permettre de pallier leur carence spirituelle
 tout en n’examinant celui-ci que d’un point de vue externe, Ă  l’instar de ces « savants » qui – pour Ă©tudier le fonctionnement du cerveau d’un animal – le trĂ©panent Ă  vif et lui posent des Ă©lectrodes. (Exemple vĂ©ridique « mineur »  mais nous avons vu, avec le nazisme et – entre autres – ses « expĂ©riences mĂ©dicales », le paroxysme de l’horreur qu’a pu atteindre ce genre de « civilisation ».) Qui mieux que « le juif millĂ©naire » dĂ©fiant le temps, « le juif errant » traversant tous les espaces, pourrait leur servir de cobaye ? Évidemment, avec cette approche Ă©gocentrique, ils n’y comprennent toujours rien, leur « curiosité » reste insatisfaite et certains, comme des gosses caractĂ©riels, en viennent bientĂŽt Ă  vouloir « casser » leur « jouet » !

 

Le questionnement des nations est donc trop superficiel ou plutĂŽt « trop extrinsĂšque »  un peu comme un chercheur d’or qui se pencherait sur une riviĂšre qu’il devine aurifĂšre, espĂ©rant de son seul regard y trouver fortune sans mĂȘme se donner la peine de la tamiser. Bien sĂ»r, il n’y verrait que sa propre image rĂ©flĂ©chie par l’eau et en viendrait rapidement Ă  envier, puis Ă  haĂŻr, les ĂȘtres aquatiques qui, eux, font corps avec cet Ă©lĂ©ment. Si ceux-ci, de surcroĂźt – tels les sirĂšnes de ses lĂ©gendes – l’invitent Ă  y tremper le petit orteil en vantant les bienfaits de l’onde, il pourrait bien, paresse et/ou peur de l’inconnu aidant, justifier de son inaction en accusant les « sĂ©ducteurs » de « vouloir l’engloutir » !

 

L’allĂ©gorie peut sembler audacieuse et pourtant ce n’est pas pour rien que la Torah – approche juive de l’existence-Ciel – est comparĂ©e Ă  l’eau (6). Elle est Source de Vie indispensable Ă  l’Homme, pas seulement l’HÂČO chimique inodore, incolore et insipide, mais un Ă©lĂ©ment vital aux multiples saveurs. Celui qui se plonge dans cette onde vivifiante, Ă  force de temps et d’études, finit par faire corps avec elle, Ă  se dĂ©lecter de son goĂ»t, Ă  en distinguer peu Ă  peu la plupart de ses mouvements et composantes.

 

Cette « apnĂ©e de l’impossible », le Peuple juif l’a entamĂ©e il y a quelque 3.325 ans, dirigĂ© dans ses premiĂšres brasses par le plus savant, le plus sage de ses « MaĂźtres nageurs » – MochĂ© RabbĂ©nou
 qui me pardonnera la mĂ©taphore ! – suivi bientĂŽt par les autres ProphĂštes, Sages et Poskim. Depuis lors, de gĂ©nĂ©rations en gĂ©nĂ©rations, se basant sur la sapience des anciens, nombre d’entre nous poursuivent cette quĂȘte vers les abysses du Savoir. Ne serions-nous pas Ă©tonnĂ©s aprĂšs cela, que certains rabbanim nous comparent Ă  des poissons ! Mais, aprĂšs tout, la comparaison est frappante : « De mĂȘme qu’un poisson retirĂ© de l’eau s’agite quelques instants et se meurt, un juif retirĂ© de la Torah et des Mitzvoth s’agite vainement et meurt (
) Il est arrivĂ© frĂ©quemment, au cours de l’Histoire juive, que des Juifs tentassent de sauter hors de l’eau ». On se souvient Ă  ce propos de l’histoire de Rabbi Akiva qui, alors que les Romains avaient interdit aux Juifs – sous peine d’exĂ©cution – d’étudier la Torah, n’en continua pas moins Ă  dispenser ouvertement son enseignement Ă  de nombreux disciples. (Pour ce « crime contre Rome », il sera d’ailleurs bientĂŽt Ă©corchĂ© vif avec des peignes de fer chauffĂ©s au rouge !). Un dĂ©nommĂ© Pappos Ben YĂ©houda, « un poisson qui avait dĂ©jĂ  sautĂ© hors de l’eau », l’interpella et lui demanda :

– Akiva ! Ne crains-tu donc pas la mort ?

Et Rabbi Akiva de lui répondre :

– Je vais te raconter une histoire :

“Un renard qui se promenait le long d’une riviùre vit des petits poissons qui nageaient ça et là. Il leur dit :

– Pourquoi donc, chers amis, ĂȘtes-vous si terrorisĂ©s ?

– Nous craignons les filets par lesquels on nous piĂšge, rĂ©pliquĂšrent les poissons.

– Sortez donc hors de l’eau, poursuivit le renard, et venez donc me rejoindre sur la terre ferme ! Nous y demeurerons en fort bonne entente ensemble ! C’est ainsi que vos ancĂȘtres ont vĂ©cu antan, en compagnie des miens.

– Et tu serais la bĂȘte la plus sage de la terre, comme on le dit, s’étonnĂšrent les poissons. Tu n’es qu’un sot et un hypocrite ! Vois donc : ici, dans notre Ă©lĂ©ment, nous sommes bouleversĂ©s de frayeur Ă  cause des filets que l’on tend pour nous prendre ! Et nous irions de nous-mĂȘmes sur cette terre ferme qui est notre mort certaine ?”

Il en est ainsi de nous, conclut Rabbi Akiva. La Torah est notre Ă©lĂ©ment et nous sommes les petits poissons qui y vivent. Les peuples qui veulent nous retirer de l’eau ressemblent au renard de cette histoire. Cela peut-il avoir un sens pour un poisson que de sauter sur la terre ferme Ă  seule fin d’échapper aux filets qui veulent, justement, l’y emporter de force ? Non, Pappos ! C’est dans l’OcĂ©an de la Torah seul que nous sommes sĂ»rs de survivre.

 

Mais revenons Ă  la formule « Il Ă©tait une fois ». MĂȘme orthographiĂ©e avec “s” elle ne peut marquer le dĂ©but du rĂ©cit de la Torah, car elle implique une notion du temps, le « temps » qui a Ă©tĂ© créé « avec » l’univers et non « avant ». Ainsi est-il Ă©crit : « Istakel bĂ© OraĂŻta ou bara alma » (Ś”ŚĄŚȘŚ›Śœ Ś‘ŚŚ•ŚšŚ™ŚȘڐ Ś•Ś‘ŚšŚ ŚąŚœŚžŚ – « Il a regardĂ© dans la Torah et a créé le monde »)
 ce qui implique que HachĂšm a d’abord conçu la Torah – en dehors du « temps » – et a créé ensuite le monde en utilisant celle-ci comme Son plan. Vous faut-il une autre preuve que le rĂ©cit de la Torah Ă©tait prĂ©cĂ©dĂ© « d’autre chose » ? Les hĂ©braĂŻstes distinguĂ©s que vous ĂȘtes savent que notre « alphabet » commence par la lettre “alĂšph” (ڐ) suivie de la lettre “bĂšth” (Ś‘), que chaque lettre hĂ©braĂŻque reprĂ©sente un nombre (“alĂšph” = Un, “bĂšth” = 2, “guimĂšl” = 3, etc.) et que l’hĂ©breu se lit de droite Ă  gauche. Nos Sages nous font remarquer la forme du “bĂšth”, lettre qui « ouvre » le rĂ©cit de la CrĂ©ation : fermĂ©e en carrĂ© de tous cĂŽtĂ©s sauf dans le sens de la lecture. On pourrait en dĂ©duire qu’il s’agit lĂ  d’un signe de « commencement ». Ben, non! Zut! On semble avoir oubliĂ© que le “alĂšph” (Un) prĂ©cĂšde logiquement le “bĂšth” (le chiffre 2). Le Midrach raconte d’ailleurs que cette lettre s’en est plainte au CrĂ©ateur qui, « pour la consoler », lui a permis de devenir la premiĂšre lettre des « Dix Commandements » (7) 
 et si le “alĂšph” a prĂ©sidĂ© spĂ©cialement Ă  ceux-ci, c’est que « AlĂšph est un et il est le secret de l’Un » (Zohar sur Chir Hachirim 74c), c’est-Ă -dire du CrĂ©ateur qui Seul est Un car, hors Lui, rien n’existe ! Ein Sof, hors de tous temps et imaginations, transcendant la CrĂ©ation, est donc bien prĂ©sent mais « se cache » en mettant en avant le “bĂšth” pour « n’apparaĂźtre » que bien plus tard, au moment le plus important de l’Histoire d’IsraĂ«l. C’est un peu comme un Roi qui laisse le « petit personnel » prĂ©parer la cĂ©rĂ©monie du sacre et ne se prĂ©sente Ă  la vue de tous qu’au moment du couronnement.

 

Si donc la Torah est trĂšs Ă©loignĂ©e des belles histoires imaginaires, laissons quand mĂȘme un os Ă  ronger Ă  ses contempteurs : depuis que nous avons reçu la Torah « Nous fĂ»mes (sommes et seront) heureux et nos Patriarches eurent beaucoup d’enfants »  qui, im ezrat HachĂšm (« Avec l’aide de D-ieu »), sont « aussi nombreux que les Ă©toiles du ciel, pareille au sable qui est au bord de la mer » (BĂ©rĂ©chith XXII, 17) !

 

Par YĂ©h’ezkel Ben Avraham pour Alyaexpress-News

 

(1) La Torah nous indique qu’il existe originellement 70 nations dont toutes les autres sont issues, pas une seule de plus
 en dehors d’IsraĂ«l qui est un peuple non pas « élu » (sinon dans le sens de « choisi » comme « élire domicile »  vu qu’un seul « Electeur » ferait quelque peu penser Ă  une « dĂ©mocratie arabe ») mais « spĂ©cial » (en hĂ©breu: ŚąŚ Ś”ŚžŚ™Ś—Ś“ – Am ha-miouh’ad, c’est-Ă -dire « Peuple spĂ©cial/particulier »). Comme pour confirmer cette diffĂ©rence, nos Sages reprĂ©sentent souvent IsraĂ«l « comme un agneau au milieu de 70 loups » et soulignent qu’une telle situation – oĂč « l’agneau survit tout au long de l’Histoire alors que les loups qui l’attaquent disparaissent » – ne peut se concevoir selon l’ordre naturel et historique des choses.

(2) Parmi les nations oĂč le « Juif » ne se dĂ©finissait pas comme tel – mais continuait Ă  pratiquer, peu ou prou, les enseignements de la Torah – cette « inquiĂ©tude » a Ă©galement touchĂ© les populations indigĂšnes. L’Histoire des dix « Tribus perdues » (suite Ă  l’Exil de Babylone) – dont plusieurs ont Ă©tĂ© retrouvĂ©es derniĂšrement – prouve Ă  suffisance que, tant en ExtrĂȘme-Orient qu’en Afrique noire, notre peuple posa aussi « question » et/ou « problĂšme ». (Il n’y a que dans le « Grand Orient » qu’ĂȘtre Juif est sans consĂ©quence ! Quoique, selon certains, depuis quelques temps
) Sur son passage, comme dans la chrĂ©tientĂ© et dans l’islam, les « civilisations » locales tentĂšrent aussi de rĂ©soudre la « question », le « problĂšme », par des massacres, des assimilations forcĂ©es, etc. N’en dĂ©plaise aux inconditionnels de J.‑P. Sartre, la tchouva – terme qui, en hĂ©breu, signifie aussi bien « retour » que « rĂ©ponse »  – des descendants actuels des ces tribus, dĂ©montre l’erreur de la thĂ©orie selon laquelle on ne serait Juif  « qu’ en raison du regard de l’autre ».

(3) « Nous verrons tout Ă  l’heure que la racine de l’inquiĂ©tude juive, c’est cette nĂ©cessitĂ© oĂč est le Juif de s’interroger sans cesse et finalement de prendre parti sur le personnage fantĂŽme, inconnu et familier, insaisissable et tout proche, qui le hante et qui n’est autre que lui-mĂȘme, lui-mĂȘme tel qu’il est pour autrui. » (Extrait de : « RĂ©flexions sur la question juive »,  J.‑P. Sartre.)

(4) « Ce terme goy est souvent mal compris. Etymologiquement, il signifie peuple, gens en latin, d’oĂč le terme gentils pour dĂ©signer les autres peuples : les goyim. Si, dans le langage courant, on appelle goy tout non-juif, nous sommes aussi, vous et moi, membres d’un goy ! La Bible dĂ©signe mĂȘme IsraĂ«l comme un goy kadosh :  un peuple saint (Chemoth XIX, 6). » (« Le testament de MoĂŻse », Josy Eisenberg & Benjamin Gross.)

(5) Image forte qui dĂ©crit parfaitement l’aboutissement de la philosophie Ă©picurienne de l’instant-prĂ©sent (« Carpe diem ! » – « Profite du jour prĂ©sent ! ») : on veut, pour soi seul, « l’objet dĂ©siré » (mĂȘme si cet « objet » est, parfois, la derniĂšre dialectique Ă  la mode !), tout de suite, Ă  n’importe quel prix (mais sans effort !). DĂšs qu’on le possĂšde – tel l’oiseau de proie assurant sa griffe sur sa prise – on le serre dedans son poing, on l’agrippe ! Evidemment, trop vite enfermĂ© au creux de la main, on ne prend pas le temps de l’examiner et on ne sait pas trĂšs bien Ă  quoi il ressemble
 mais – Qu’importe ! – il paraĂźt que, d’aprĂšs « les autres », c’est « tendance ». Bien sĂ»r, on n’a pas pesĂ©, pour le futur, les avantages et dĂ©savantages de sa possession et l’on se retrouve dans la position handicapĂ©e du singe Ă  qui on prĂ©sente une prune, dans une bouteille au goulot juste assez large pour y passer sa paluche dĂ©pliĂ©e, et qui – aprĂšs l’avoir saisie – se voit fort embĂȘtĂ© pour sortir sa main sans abandonner le fruit de sa gourmandise. (Contrairement Ă  l’animal, certains hommes d’aujourd’hui prĂ©fĂšrent rester physiquement, ou intellectuellement, dĂ©ficients plutĂŽt que de renoncer Ă  leurs avoirs et/ou Ă  leurs idĂ©es !) Le poing est Ă©galement symbole de pugilat
 Et pourtant ! Quoi de plus beau qu’une main ouverte et tendue vers l’autre : elle comble le vide entre les ĂȘtres, elle peut demander Ă  recevoir mais aussi donner assistance ! Dans cette image du (de la) « main-tenant », nous retrouvons donc la nĂ©gation des trois donnĂ©es communes aux quatre mondes (tels que dĂ©crits* par le Rav Adin Steinsaltz/Even-IsraĂ«l dans son excellent livre : « La Rose aux treize pĂ©tales ») : refus de remplir « l’espace », refus de prendre en compte le « temps » et refus du « moi » (en entendant par ce dernier terme « l’expĂ©rience de l’ĂȘtre propre Ă  chacun ») ; car, comme le dit trĂšs bien, dans « Je et Tu », le philosophe juif Martin Buber : « Il n’y a pas de Je tout seul ;  il y a toujours un je-tu ou un je-il, le mĂȘme et l’autre. Je ne peux dire je s’il n’y a pas un tu ou un il. Aucun des deux termes ne peux ĂȘtre supprimé ; l’un n’existe que par rapport Ă  l’autre; ils sont insĂ©parables tout en demeurant sĂ©parĂ©s, car l’intervalle entre eux ne peut ĂȘtre supprimĂ©. »

* « Le monde dans lequel nous vivons habituellement, avec tout ce qu’il contient, est appelĂ© le monde de l’action  – Ă©tymologiquement le monde du faire, Ă  la fois par ce qu’il a Ă©tĂ© fait par D‑ieu et parce que c’est lĂ  que les hommes peuvent agir (
) Ce monde-lĂ , cependant, n’est qu’une des quatre structures d’un systĂšme gĂ©nĂ©ral qui comprend quatre dimensions fondamentales de l’ĂȘtre – quatre mondes diffĂ©rents – dont chacun constitue un univers particulier fait de diverses modalitĂ©s d’ĂȘtre. Ces autres mondes sont classiquement appelĂ©s, de haut en bas : Ă©manation, crĂ©ation, formation et action – en hĂ©breu : Atsilout, YĂštsira, BĂ©ria et Assya (
) Trois donnĂ©es sont communes aux quatre mondes. Ces donnĂ©es sont traditionnellement dĂ©signĂ©es sous le nom de monde, annĂ©e et Ăąme – en hĂ©breu : olam, chana et nĂ©phĂšche. On dirait aujourd’hui :  l’espace, le temps et le moi, en entendant par ce dernier terme l’expĂ©rience de l’ĂȘtre propre Ă  chacun. »

(6) Ainsi, l’Admor Hazaken, Rabbi ChnĂ©our Zalman de Lady (1745-1813), le fondateur de la H’assidouth H’abad, Ă©crit : «  la Torah est comparĂ©e Ă  l’eau. Tout comme l’eau coule de l’endroit le plus Ă©levĂ© vers l’endroit le plus bas, la Torah descendit du lieu de Sa gloire, puisqu’elle est la VolontĂ© de la Sagesse de D‑ieu, puisque D‑ieu et Sa Torah ne font qu’un, et que nulle pensĂ©e ne saurait saisir. C’est de lĂ  que la Torah descendit, franchissant les stades cachĂ©s, Ă©tape aprĂšs Ă©tape, suivant l’enchaĂźnement des mondes, jusqu’à se vĂȘtir d’objets matĂ©riels et de choses du monde, ceux-ci sont la quasi-totalitĂ© des PrĂ©ceptes divins de la Torah, avec leurs lois d’application et des combinaisons de lettres matĂ©riellement inscrites avec de l’encre sur un parchemin et composant les vingt-quatre livres de la Torah, des ProphĂštes et des Hagiographes. Ainsi, toute pensĂ©e peut les saisir. MĂȘme la parole et l’action, plus basses que la pensĂ©e, les saisissent Ă©galement et s’en vĂȘtissent » (Tanya, ch. 4).

(7) En fait, il n’est pas Ă©crit les « Dix Commandements » mais « les Dix Paroles » (ŚąŚ©ŚšŚȘ Ś”Ś“Ś‘ŚšŚ™Ś – AssĂ©rĂšt ha-Dvarim). Il faut remarquer que le mot davar (Ś“Ś‘Śš – singulier de dvarim – Ś“Ś‘ŚšŚ™Ś) peut vouloir dire « parole » ou « chose » mais cette homonymie, Ă  laquelle de nombreux commentaires de nos Sages se rattachent, serait trop longue Ă  dĂ©tailler ici ! Quoiqu’il en soit, le fait que les « Commandements » soient en rĂ©alitĂ© des « Paroles » donne encore plus de sens Ă  la priĂšre du ChĂ©ma (« Ecoute IsraĂ«l  ») !


RĂ©daction francophone Infos Israel News pour l’actualitĂ© israĂ©lienne
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