Deux tragédies en 90 minutes : Israël dépasse les 400 morts sur les routes, une alerte nationale relancée

En l’espace d’une heure et demie, une fillette de 8 ans et un homme de 45 ans ont perdu la vie dans deux accidents distincts à Givat HaRael et près de Matzouva. Avec 407 morts depuis le début de l’année, Israël replonge dans une crise meurtrière déjà dénoncée par l’Autorité nationale de sécurité routière. Un signal d’alarme pour un pays où les menaces extérieures éclipsent souvent une autre forme de guerre : celle qui se joue sur l’asphalte.

Il est 15 h 42 quand le MDA reçoit un appel dramatique : une enfant de 8 ans vient d’être percutée par un autobus à Givat HaRael, dans le secteur de Binyamin. Lorsque les paramédics arrivent, la scène est d’une violence indicible. La fillette est retrouvée coincée sous le véhicule, en état d’arrêt complet, souffrant d’une polytraumatisation extrême. Malgré les tentatives de stabilisation et la rapidité de l’intervention, son décès est prononcé sur place.

Selon le rapport publié par Ynet et confirmé par les équipes médicales du Magen David Adom, les blessures étaient “incompatibles avec la vie”.

À peine une heure plus tard, un second drame survient, cette fois dans le nord, sur la route 70 près du kibboutz Matzouva. Un homme d’environ 45 ans est retrouvé coincé dans son véhicule, après un choc violent entre deux voitures. Il est inconscient, en arrêt cardiaque. Les équipes du MDA tentent une réanimation prolongée, mais doivent finalement constater son décès.

Deux morts en 90 minutes. Deux familles brisées. Et une statistique nationale qui continue d’exploser.

Un pays endeuillé : plus de 400 morts sur les routes en moins d’un an

Selon les données officielles publiées par l’Autorité nationale de sécurité routière (NRSA) — chiffres repris par Haaretz et The Times of Israel — Israël a atteint la barre de 407 morts depuis janvier, l’un des bilans les plus lourds de la dernière décennie.

Pour donner un ordre de grandeur :
– Israël compte plus de morts sur les routes que dans de nombreux attentats cumulés ces dernières années.
– La moyenne annuelle oscille entre 320 et 350 tués.
– L’année 2025 devrait être l’une des plus meurtrières depuis 2016.

L’insécurité routière est ainsi redevenue une menace stratégique. Le gouvernement, souvent absorbé par les questions sécuritaires et géopolitiques, peine à enrayer ce fléau intérieur.

Une responsabilité partagée : infrastructures, comportements et zones rurales vulnérables

Les deux accidents du jour reflètent une réalité complexe que les experts, notamment sur Walla! et Globes, décrivent depuis longtemps.

1. Les zones rurales et communautaires restent les plus exposées

Givat HaRael, comme de nombreux avant-postes et implantations de Binyamin, souffre d’infrastructures limitées :
– voies étroites,
– arrêts de bus mal protégés,
– circulation mixte enfants-bus-véhicules,
– visibilité réduite en fin de journée.

Les accidents impliquant des autobus dans ces zones représentent une part disproportionnée des décès d’enfants, comme l’avait rappelé un rapport de la NRSA en 2024.

2. La route 70 : l’une des plus dangereuses du nord

Calcalist et la NRSA classent régulièrement la route 70 parmi les axes les plus accidentogènes du pays, mêlant :
– virages abrupts,
– dépassements illégaux,
– trafic intense entre Galilée et littoral,
– proximité de zones industrielles.

L’accident près de Matzouva confirme un schéma tristement connu.

Témoignages du MDA : “Une scène déchirante”

Le paramédic du MDA Shaul Malka, présent sur la première scène à Givat HaRael, a décrit un accident “parmi les pires de ces derniers mois”, selon le communiqué publié par le MDA :

“L’enfant était coincée sous l’autobus. Nous avons immédiatement constaté l’absence de signes vitaux. Nous n’avons rien pu faire.”

Pour la collision du nord, la paramédic Hadar Shayer a expliqué :

“Le conducteur de 45 ans était totalement coincé, sans pouls ni respiration. Malgré les efforts, il n’a pas pu être ramené.”

Des récits qui traduisent l’épuisement d’équipes confrontées quotidiennement à des drames évitables.


Un phénomène structurel, pas une fatalité

Les experts israéliens interrogés par Haaretz identifient plusieurs causes récurrentes dans la flambée des accidents mortels :

  • Excès de vitesse, en particulier dans les zones rurales.
  • Manque de surveillance policière sur les routes secondaires.
  • Manque de passages piétons sécurisés dans les communautés de Judée-Samarie.
  • Infrastructures vieillissantes, en Galilée notamment.
  • Véhicules lourds insuffisamment contrôlés.
  • Défaillances d’entretien routier.

La NRSA a également pointé un problème culturel profond : une tolérance israélienne élevée pour les “presque accidents”, les dépassements risqués et les comportements agressifs.


La sécurité routière : un défi national, au même titre que la sécurité extérieure

Israël a toujours dû renforcer sa vigilance sur ses frontières : terrorisme, menaces iraniennes, tirs de roquettes, violences en Judée-Samarie.

Mais les données rappellent une vérité douloureuse :
la route tue plus d’Israéliens chaque année que la plupart des conflits armés récents.

Une urgence longtemps masquée par les crises géopolitiques.

Les autorités reconnaissent la nécessité de redéfinir la sécurité routière comme une question de sécurité nationale.


Deux vies perdues, une sonnette d’alarme qui hurle

La mort d’une fillette et d’un père de famille en moins de deux heures n’est pas un fait divers. C’est la manifestation la plus brutale d’une crise profonde que le pays refuse trop souvent de regarder en face.

Chaque accident révèle une même histoire : un système routier sous-équipé, des comportements à risque, un manque de prévention, et des infrastructures mal adaptées aux réalités territoriales.

Pour un pays qui consacre tant d’énergie à protéger ses citoyens des menaces extérieures, l’hécatombe routière représente un paradoxe douloureux — et un défi que l’État d’Israël ne peut plus différer.


Rédaction francophone Infos Israel News pour l’actualité israélienne
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