Elizabeth Tsurkov : la prisonnière israélienne libérée critique Netanyahu et appelle à la compassion pour Gaza

Libérée le mois dernier après deux ans et demi de captivité en Irak, Elizabeth Tsurkov, chercheuse israélienne à Princeton, a publié un message à la mémoire du 7 octobre. Dans un tweet en arabe, elle a évoqué le moment où elle a appris, depuis sa cellule de Bagdad, l’attaque du Hamas, et adressé une prière ambiguë : « Que Dieu apporte un soulagement à Gaza ». Derrière la compassion apparente, une critique sévère se dessine contre des dirigeants « qui ne pensent qu’à rester au pouvoir ».


Les mots de Tsurkov, 38 ans, résonnent comme un écho d’un autre enfer : celui d’une Israélienne retenue par une milice chiite pro-iranienne, contrainte d’écouter, impuissante, les premières nouvelles du massacre du 7 octobre. « Les gardiens ont monté le son de la télévision, pour que j’entende les nouvelles sur l’opération du Hamas », écrit-elle. « D’après les chaînes du camp iranien, j’ai cru d’abord qu’il s’agissait d’une attaque ciblée sur des bases militaires. Les commentateurs parlaient de prisonniers, pas d’otages’. » Ce détail, presque anodin, illustre le brouillard de propagande qui enveloppe le monde chiite radical — celui-là même qui l’a détenue pendant plus de 900 jours.

Tsurkov raconte comment, derrière les murs de son second cachot, elle a compris que le désastre s’étendrait bien au-delà de Gaza : « Les gardiens faisaient la fête, mais je savais déjà qu’un malheur allait frapper Gaza et son peuple, même sans imaginer l’ampleur du massacre. »


La chercheuse israélienne, diplômée de Princeton et spécialiste du Moyen-Orient, a été kidnappée à Bagdad le 26 mars 2023 par la milice Kataeb Hezbollah, bras armé de l’Iran en Irak. Ses ravisseurs, comme souvent, ont nié leur responsabilité, alors que toutes les agences de renseignement occidentales confirmaient leur implication. Tsurkov, qui possédait aussi la nationalité russe, s’était rendue à Bagdad dans le cadre de recherches sur la société civile post-État islamique. Son arrestation — en pleine capitale irakienne — a démontré à quel point le réseau iranien contrôle aujourd’hui la sécurité irakienne.

Elle a été libérée à la suite d’une opération complexe impliquant des médiations américaines et jordaniennes, puis transférée en Israël, où elle a rencontré le Premier ministre Benyamin Netanyahu depuis sa chambre à l’hôpital Sheba. À l’époque, elle déclarait : « J’ai été torturée. Il me faudra du temps pour guérir. » Elle avait aussi tenu à rappeler le sort des otages israéliens encore détenus à Gaza, notamment Gali et Ziv Berman, en soulignant que « les anniversaires sont les jours les plus cruels dans la captivité ».


Mais son message du 7 octobre 2025 marque une rupture de ton. Publié en arabe, il semble s’adresser moins à l’opinion israélienne qu’au monde arabe : « Les affamés et les blessés de Gaza, et les otages épuisés, paient tous le prix des décisions de dirigeants qui ne se soucient que de leur survie politique. » Sans le nommer directement, c’est Netanyahu qu’elle vise — celui-là même qu’elle remerciait publiquement un mois plus tôt. L’ironie n’échappe à personne.

Certains observateurs, comme le journaliste Daniel Edelson du Jerusalem Post, y voient une tentative de réhabilitation morale : Tsurkov, intellectuelle de gauche, chercherait à reprendre le discours humanitaire qui lui avait valu la sympathie du monde académique occidental avant sa captivité. D’autres y lisent le symptôme d’un traumatisme psychologique profond, nourri par deux ans de propagande anti-israélienne.


Ce tweet a immédiatement suscité des réactions en Israël. Sur les réseaux sociaux, beaucoup ont rappelé qu’elle avait été kidnappée « non pas par un régime démocratique, mais par des alliés du Hamas et de Téhéran ». Certains ont dénoncé son « syndrome de Stockholm », d’autres sa « naïveté tragique ». Une voix dissonante, celle de l’analyste Amit Segal, a résumé le sentiment dominant : « Nous ne devons pas juger une survivante, mais nous avons le droit de refuser la culpabilisation de notre nation. »

Malgré sa critique, le témoignage de Tsurkov confirme l’omniprésence de la propagande iranienne jusque dans les prisons de Bagdad : célébration du Hamas, inversion des mots, diabolisation d’Israël — un mécanisme de guerre psychologique que les services israéliens connaissent bien.


Le parcours d’Elizabeth Tsurkov reste à la fois fascinant et dérangeant. Israélienne, russe, américaine par ses études, elle incarne cette intelligentsia cosmopolite que l’idéologie islamiste méprise autant qu’elle utilise. Qu’elle prie pour les habitants de Gaza ne choque pas ; mais qu’elle place sur le même plan les « affamés » et les « otages épuisés » révèle une confusion morale que seule la douleur peut expliquer.

À Tel-Aviv comme à Jérusalem, la phrase qui retient l’attention est celle-ci : « Tous paient le prix des décisions de dirigeants qui ne pensent qu’à rester au pouvoir. » Un constat universel, peut-être, mais aussi une mise en cause politique au moment où Israël, deux ans après le 7 octobre, continue de chercher ses disparus et de se défendre contre un ennemi qui, lui, n’a jamais demandé à Dieu le soulagement des Israéliens.



Rédaction francophone Infos Israel News pour l’actualité israélienne
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