Le chef du Shin Bet David Zini dénonce une dérive des valeurs et une culture de façade

Des enregistrements obtenus par Hadashot Kippa révèlent un discours inhabituellement franc du chef du Shin Bet, David Zini, qui critique ouvertement la culture interne du service de sécurité et, plus largement, celle de l’ensemble des organismes de défense israéliens. Ses propos, prononcés lors d’une rencontre fermée avec de hauts responsables policiers à Jérusalem, exposent une remise en question profonde : le Shin Bet et l’appareil sécuritaire israélien auraient abandonné la réflexion sur les valeurs au profit d’une culture “occidentale” centrée sur l’apparence.

Une critique rare venant du chef d’un service habituellement discret et mesuré.
Et surtout, un signal d’alarme au cœur d’une période où Israël se trouve confronté à des menaces internes et externes sans précédent.


« Trop de prudence pour éviter la politique » : Zini expose un malaise structurel

Dans ces enregistrements, Zini affirme qu’un “excès de prudence” a paralysé les institutions sécuritaires, au point de les empêcher d’aborder les enjeux de valeurs qui devraient pourtant guider leurs décisions.
Selon lui, la réticence à parler d’éthique et de responsabilité au nom du principe de neutralité politique a créé un vide dangereux.

« Les dernières années, dans les organismes de sécurité, il n’y a pas assez de discussion sur les valeurs. Nous ne sommes pas des organisations politiques, alors il y a trop de prudence, et on se cache derrière cette excuse pour ne pas traiter des questions complexes. Dans notre culture, parler de valeurs n’est pas “politiquement correct”. »

Pour Zini, cette autocensure interne conduit à des dérives :
une perte de repères, une culture de façade, et une obsession de l’image au détriment de la mission.


Une charge sévère contre le Shin Bet : « Shomer HaHomot a été un échec »

Plus loin, Zini s’attaque frontalement à la performance passée du Shin Bet, évoquant notamment les événements de l’opération Shomer HaHomot (2021), qu’il qualifie sans détour « d’échec du service ».

Il insiste sur son style de commandement direct :

« Je ne suis pas de ceux qui maquillent ou caressent. Je traite les problèmes quand ils doivent être traités. »

Ce discours marque un tournant, venant de la plus haute autorité du service chargé de prévenir le terrorisme et de soutenir les forces de sécurité intérieure.


Des procédures aberrantes : “Une évaluation de situation par téléphone, en pleine nuit de Simhat Torah”

L’un des exemples les plus marquants fournis par Zini concerne des décisions prises selon lui dans un contexte de désordre et de perte de discipline :

« Quand il y a une dérive, on finit par faire une évaluation de situation par téléphone, la nuit de Simhat Torah. Quoi ? Je devrais sauter de chez moi ? »

Cette phrase, choquante par son réalisme, traduit une frustration profonde :
le système sécuritaire fonctionnerait parfois dans l’improvisation, la précipitation, et l’absence de protocole rigoureux.


Critique envers l’armée : “Le courage de dire la vérité n’existe plus”

Zini étend sa critique à Tsahal, évoquant ce qu’il décrit comme une “maladie culturelle” rencontrée dans l’armée : un déficit de responsabilité, une peur de dire les choses clairement, et une préférence pour l’apparence plutôt que pour l’action.

Il raconte :

« Celui qui vient avec une conscience de confiance dans le bien prend une responsabilité totale. C’est une maladie que j’ai rencontrée dans l’armée. Si tu viens travailler ou accomplir une mission, la norme doit être la responsabilité absolue. Le courage de dire la vérité n’existe pas. »

Ces propos, venant du chef du service de sécurité intérieure, frappent par leur sévérité.

Ils font écho aux critiques croissantes exprimées après les défaillances sécuritaires du 7 octobre et les failles révélées dans la coordination interorganismes.


« Pas agréable de dire à une station qu’elle n’a pas fait son travail » : le dossier des armes illégales

Zini évoque également la crise des armes illégales dans le secteur arabe, un sujet explosif depuis des années.

« Ce n’est pas agréable d’être celui qui dit : votre station n’a pas rempli ses missions. Dans une culture obsédée par la façade, l’extérieur passe avant l’intérieur. C’est bien dans les présentations, mais face à la réalité c’est une bombe en plein visage. »

Pour lui, la dérive de culture organisationnelle empêche les forces de sécurité de traiter sérieusement les racines du phénomène :
manque de responsabilité, absence de transparence, et incapacité à évaluer correctement les performances.


L’affaire Meni Binyamin (Lahav 433) : Zini loue la conduite du commissaire

Enfin, Zini aborde la polémique autour de l’interrogatoire du commandant de Lahav 433, Meni Binyamin, qualifiant l’affaire de « cas d’embarras ».
Il salue néanmoins le comportement du commissaire de police, Dani Halevi, qu’il décrit comme ayant fait preuve d’un véritable leadership :

« Il s’est mis en danger, mentalement et publiquement. C’est de la direction. »


Un signal alarmant pour l’appareil sécuritaire

Les enregistrements de Zini dessinent un tableau préoccupant :
un système saturé par la culture de l’image, affaibli par la peur de la parole, miné par l’incapacité d’assumer ses responsabilités — et, selon lui, incapable d’affronter les enjeux éthiques qui déterminent la capacité d’Israël à se défendre.

Dans un pays confronté à la guerre contre le Hamas, à la montée des milices pro-iraniennes, aux tensions internes et aux défis sécuritaires en Cisjordanie, ces paroles résonnent comme un avertissement majeur.


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