Fuite massive au Royaume‑Uni : l’Iran et les talibans exploitent une liste de 25 000 collaborateurs afghans pour traquer des agents du MI6

Selon une enquête du Telegraph, les Gardiens de la Révolution iraniens ont demandé officiellement aux talibans un accès à une base de données sensible contenant les noms de 25 000 Afghans ayant collaboré avec l’armée britannique ou les services de renseignement du Royaume‑Uni pendant la guerre d’Afghanistan.
Objectif assumé par une source iranienne : identifier d’éventuels agents du MI6 et les utiliser comme « otages politiques » dans les négociations nucléaires avec l’Europe.

Une fuite qui remonte à 2022

La liste aurait été divulguée par erreur en février 2022 lorsqu’un soldat britannique a envoyé par e‑mail le fichier complet à des contacts afghans, au lieu d’une version expurgée.
Elle contient des noms de soldats afghans, de fonctionnaires de l’ancien gouvernement de Kaboul et de traducteurs.
Selon une source talibane citée par le Telegraph, le mouvement islamiste disposait déjà de ce document la même année, mais Londres n’en aurait eu connaissance qu’en août 2023.

Face au risque de représailles, le Royaume‑Uni a mené une opération secrète pour exfiltrer environ 900 Afghans figurant sur la liste, ainsi que 3 600 membres de leurs familles, pour un coût estimé à 2 milliards de livres sterling. L’affaire a été couverte par une interdiction de publication jusqu’en juillet dernier.

L’Iran et les talibans, un intérêt commun

La demande iranienne intervient alors que Londres, Berlin et Paris menacent de réactiver le mécanisme de « snapback » de l’accord nucléaire de 2015, qui permet de rétablir toutes les sanctions internationales contre Téhéran si aucun progrès n’est réalisé d’ici la fin du mois.
Pour Téhéran comme pour Kaboul, détenir ces personnes serait un levier de pression stratégique dans leurs échanges avec l’Occident.

Selon le Telegraph, une commission spéciale aurait été créée à Téhéran pour exploiter la liste, et la coopération avec les talibans aurait déjà commencé : un Afghan dont le nom figure dans la base aurait été expulsé d’Iran vers l’Afghanistan la semaine dernière, malgré ses appels à l’aide et ses craintes pour sa vie.

Réaction britannique

Le ministère de la Défense à Londres affirme qu’il est « très improbable » que la présence d’un nom dans cette liste expose directement la personne concernée à un danger, tout en assurant que la sécurité des personnels sensibles reste « une priorité absolue ».
Pourtant, le témoignage recueilli par le Telegraph du réfugié expulsé d’Iran dément ce discours : aujourd’hui caché à Kaboul, il dit vivre sous la menace constante de représailles talibanes.

Cette affaire, au croisement du renseignement, de la diplomatie et des droits humains, souligne la fragilité des réseaux alliés en zone de conflit et la manière dont une fuite accidentelle peut se transformer en arme géopolitique.

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