Hagai Louber à Trump : “Merci… mais n’interviens pas dans nos affaires internes”

L’intervention américaine dans les débats judiciaires israéliens a franchi un nouveau cap cette semaine, lorsque le président des États-Unis, Donald Trump, a envoyé une lettre officielle au président israélien Itshak Herzog lui demandant d’envisager une grâce pour le Premier ministre Benyamin Netanyahou. Mais à la surprise générale, la réplique la plus marquante n’est pas venue d’un politicien, ni d’un juriste : elle est venue d’un père endeuillé.
Hagai Louber, dont le fils est tombé en service, a publié un message direct, clair et sans détour : “Monsieur le Président – n’intervenez pas.”

Sa déclaration, devenue virale en quelques heures, replace au centre du débat une question fondamentale : où s’arrête l’amitié stratégique entre Israël et les États-Unis, et où commence l’ingérence ? Dans un pays fracturé par des années de crises politiques, de procès, de divisions internes et d’émotions nationales exacerbées par la guerre, la plume de Louber a résonné plus fort que bien des discours officiels.

Dans son message, le père endeuillé ne nie ni ses critiques profondes envers le système judiciaire, ni ses doutes concernant les procès de Netanyahou. Au contraire, il les expose frontalement : “אני מניח בצד את סימני השאלה החריפים… אני מניח בצד את הכמיהה לסיים את המשפט בחנינה”. Il reconnaît la lassitude d’une société entière épuisée par des années de procédures, et l’envie réelle, chez beaucoup, de tourner la page.
Mais pour lui – et pour de nombreux citoyens – il existe une ligne rouge : la souveraineté israélienne.

En remerciant Trump pour son aide militaire, notamment contre l’Iran, et pour son rôle dans le retour des otages, Louber clarifie une distinction essentielle : “במקרים האלה ביקשנו ממך להתערב – והסכמת בטובך. אבל עד כאן.”
Un message qui, au-delà de la forme polie, constitue un rappel sévère : lorsque l’aide américaine répond à une demande israélienne explicite, elle est bienvenue. Lorsqu’elle franchit le seuil des affaires internes – elle devient une menace.

À droite comme à gauche, les réactions sont contrastées. Certains soutiens de Netanyahou ont applaudi la tentative de Trump, espérant y voir une voie d’issue rapide au dossier judiciaire. D’autres y ont vu un précédent dangereux : si le président américain peut influer sur les décisions judiciaires israéliennes, qu’est-ce qui l’empêcherait demain d’interférer sur des dossiers sécuritaires ou territoriaux ?

Louber, lui, élargit sa critique en visant également une partie du camp pro-Netanyahou. Il met en garde contre une hypocrisie fréquente : applaudir l’intervention américaine lorsqu’elle semble servir un objectif politique immédiat, mais condamner avec virulence toute tentative d’ingérence lorsqu’elle vient de responsables ou ONG de gauche.
Cette incohérence, avertit-il, pourrait se retourner dramatiquement contre le pays.

Le passage le plus frappant de son message touche à la question identitaire : “זה לא מה שרצינו… זה לא עם חופשי בארצנו”.
Ce refrain, gravé dans la mémoire collective, rappelle que pour une large partie de la population israélienne, la souveraineté n’est pas une abstraction juridique : c’est l’essence même du projet national.
Et la perspective, même lointaine, qu’Israël devienne une “מדינת חסות” – un État sous tutelle – est perçue comme une menace existentielle.

Cette mise en garde n’est pas théorique. Dans un contexte où l’alliance stratégique entre Jérusalem et Washington repose sur une confiance réciproque, chaque intervention américaine dans la vie intérieure israélienne a un coût : politique, symbolique, et parfois sécuritaire. Une pression excessive pourrait, selon Louber, limiter demain la liberté d’action d’Israël face aux défis régionaux.

Son texte souligne également une réalité : Israël n’a pas demandé cette intervention. Ni le gouvernement, ni la présidence, ni même les voix internes critiques du système judiciaire n’ont sollicité la médiation américaine.
C’est précisément ce qui, aux yeux de nombreux Israéliens, transforme ce geste de Trump – pourtant animé d’intentions amicables – en faux pas diplomatique.

Dans l’ensemble, le message de Louber cristallise une fatigue collective. Fatigue des procès. Fatigue des divisions. Fatigue des tentatives externes de trancher une question que seule la société israélienne peut régler.
Fatigue, enfin, de devoir expliquer encore et encore que l’amitié américaine – tout essentielle soit-elle – n’efface pas la souveraineté israélienne.

En conclusion, la lettre de Louber marque un moment politique rare, où un simple citoyen endeuillé rappelle à la première puissance mondiale une vérité incontournable : Israël remercie, Israël coopère, Israël écoute – mais Israël décide pour lui-même.



Rédaction francophone Infos Israel News pour l’actualité israélienne
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