Pendant que les sirènes continuent de retentir dans les villes d’Israël et que les familles pleurent leurs morts et leurs otages, une autre guerre, plus silencieuse mais tout aussi dévastatrice, est en train de se jouer dans les esprits : celle de la santé mentale nationale. Les chiffres sont accablants : le nombre de diagnostics de stress post-traumatique (PTSD) a doublé en 2024, et l’année 2025 promet malheureusement un nouveau record tragique.
Selon les données croisées des principales caisses d’assurance santé (Maccabi, Meuhedet et Leumit), plus de 15 380 adultes ont été diagnostiqués avec un trouble de stress post-traumatique en 2024, contre environ 8 000 deux ans plus tôt. Si l’on extrapole les chiffres en incluant la caisse Clalit – la plus importante du pays – on arrive à plus de 30 000 cas probables, et ce sans compter les enfants et adolescents.
En 2025, plus de 1 200 enfants ont été officiellement diagnostiqués dans seulement deux caisses, ce qui laisse présager plus de 3 000 cas à l’échelle nationale chez les mineurs. Et selon les psychiatres, cela ne représente que la partie émergée de l’iceberg.
Une population brisée, une santé mentale à genoux
Le PTSD en Israël ne touche plus uniquement les soldats revenus du front. Depuis le 7 octobre, c’est toute une population civile qui est traumatisée. Les symptômes sont violents : flashbacks, insomnies, irritabilité, évitement social, crises d’angoisse, détachement émotionnel…
Le Dr Dvir Irshi, psychologue à la caisse Meuhedet, décrit le cas d’un homme de 30 ans, évacué du sud d’Israël vers un hôtel à Jérusalem après le pogrom du 7 octobre. Cet homme, déjà marqué par des traumatismes passés, s’est retrouvé incapable de sortir de sa chambre pendant des semaines, bloqué dans un mutisme anxieux.
« Il était figé. Nous avons dû travailler pas à pas, en changeant à chaque fois le lieu du rendez-vous pour qu’il puisse réapprendre à marcher dans la rue », témoigne le psychologue.
Le cas n’est pas isolé. De nombreux patients de tout âge, y compris des personnes âgées de 65 à 80 ans, qui avaient déjà survécu à des épisodes traumatiques dans leur vie, ont replongé. L’onde de choc de la guerre actuelle ravive les blessures anciennes et brise les équilibres précaires construits au fil des années.
Une vague de suicides chez les soldats : le tabou brisé
La réalité est encore plus sombre dans les rangs de l’armée. Depuis début 2025, 17 soldats se sont suicidés, un chiffre qui dépasse déjà les bilans annuels habituels, à l’exception de 2024, où le nombre de suicides avait atteint un pic historique. Parmi eux : deux réservistes et trois soldats en service régulier ces dix derniers jours seulement. Ce drame en chaîne, souvent caché derrière les chiffres officiels, révèle une crise aussi structurelle que morale.
Selon le Dr Yarden Lewinsky, psychiatre en chef à la Clalit :
« L’exposition à des scènes de guerre, la perte de camarades, le sentiment de trahison morale – tout cela laisse des traces, même si les symptômes ne se manifestent pas immédiatement. »
Un soldat peut revenir physiquement intact du front, mais l’âme, elle, peut rester au combat, à jamais.
Le système de santé débordé : « on choisit qui on soigne »
Le diagnostic est sans appel : le système de santé mentale israélien est débordé. Le nombre de psychologues, psychiatres, centres de résilience, ne suffit plus. Les centres d’urgence offrent souvent un nombre limité de séances, alors que de nombreux patients nécessitent un suivi long, intensif, profond.
« On est face à un dilemme éthique, confie le Dr Dvir Irshi. Faut-il soigner un peu de monde correctement, ou beaucoup de monde superficiellement ? »
« Les listes d’attente explosent, les rendez-vous sont espacés de plusieurs semaines, parfois de mois, alors que les patients sont en détresse. »
La caisse Maccabi a vu le nombre de cas PTSD passer de 3 400 à plus de 8 000 en un an, et ce n’est que le début. Des outils numériques comme les applis de méditation ou de biofeedback sont utilisés comme pansements numériques face à une hémorragie émotionnelle massive.
Une guerre qui ne se voit pas
L’ennemi n’est plus seulement au-delà de la barrière, à Gaza ou au Liban. Il est en nous. Dans l’impossibilité de dormir, dans le regard vide d’un soldat revenu « entier », dans les cauchemars d’un enfant qui entend encore les cris de la nuit du 7 octobre.
Et alors que l’État augmente le volume de l’aide humanitaire à Gaza, les rescapés israéliens de cette même guerre n’ont parfois même pas accès à une thérapie décente.
Selon Infos-Israel.News, des familles demandent a se mobiliser pour exiger un plan national de soin psychique post-conflit, avec des moyens, des postes, et surtout une reconnaissance officielle de l’ampleur du traumatisme.
« À la guerre, on perd des soldats. Après la guerre, on perd des âmes. »
Et ça, aucun gouvernement ne peut se permettre de l’ignorer.
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