Nous voilà contraints de revivre ces scènes de sauvagerie inhumaine, ces douloureux moments où la barbarie reprend ses devoirs immondes.

Depuis des jours, des semaines, que dis-je, depuis des mois, des années, nous avons la nette impression d’être les victimes innocentes de la folie meurtrière, de la haine sans fin, d’un antisémitisme aux mille et un visage.

 

Bafoué, vilipendé par le Monde entier, mais aussi de l’intérieur, le peuple d’Israël résiste sur tous les fronts envers et contre toutes ses angoisses bien légitimes.

Pourquoi tant d’acharnement? Jusqu’à quand se demande-t-il?

Les questions, les interrogations fusent de toutes parts et rencontrent trop souvent des pouvoirs politiques et religieux incapables d’y apporter ne serait-ce que l’once d’une véritable et honnête réponse. Une grande majorité de la population respecte ses gouvernants comme ses différents gouvernements, mais nul ne comprend ce doute maléfique, cette frilosité exilique, ce mauvais génie qui les entreprend lors de périodes vitales pour le devenir d’Israël.

 

J’ai très souvent l’impression d’avoir face à moi des personnages désolés d’avoir dû se battre, combattre, faire la guerre, devoir conquérir, occuper, coloniser.

Ils voudraient presque s’excuser de déranger, de déséquilibrer l’ordre mondial, d’avoir voulu un tant soit peu de souveraineté et d’indépendance, quelle outrecuidance de la part de ces « sales juifs ».

En conséquence nous voici depuis la guerre des Six jours confrontés aux hésitations et aux mensonges idéologiques: Jérusalem se lamente sur sa double personnalité, Rachel se lamente du fond de son nouveau bunker à Bethléem, Yossef souffre de ces seules visites nocturnes jamais mises à jour et nos Patriarches et Matriarches se consolent mutuellement car ils ne voient que des pèlerins et rarement des citoyens.

 

Disons le peu ou prou, il est grand temps de prendre une sérieuse et difficile décision, nul n’a le droit de se jouer de millions d’hommes, de femmes et d’enfants, nul n’a le droit de mettre en danger de mort quotidienne plus d’un demi-million d’individus en Judée Samarie. Nul n’a le droit de revendiquer une capitale qui ne l’est guère de facto, nul n’a le droit de se dédouaner politiquement, militairement, policièrement au dépend de tout un peuple, ici et en diaspora, encore et toujours empli de confiance et de fidélité au projet Israël.

 

S’il en est ainsi et ce, depuis tant d’années, ne devrions-nous pas alors trancher dans le vif du sujet et décider une bonne fois pour toutes: soit d’accepter de revenir aux frontières d’avant 1967, soit d’annexer définitivement l’ensemble des territoires et advienne que pourra. Mais faire cesser cette situation où l’avant comme l’arrière train de notre Histoire se trouve pris entre deux chaises, provoquant nombre de crises hémorroïdaires et trop souvent sanguinolentes. La vérité reste douloureuse car, si fier de notre état national, il n’en reste pas moins que notre état physiologique laisse trop souvent à désirer. Nos dirigeants politiques sont bien loin d’être les seuls à la direction du pays, ils sont accompagnés d’une pléthore de hauts fonctionnaires, de technocrates et autres magistrats vidés, depuis belle lurette, de sens et de sensibilité. Le pouvoir se partage en Israël entre une oligarchie et une ploutocratie s’affirmant comme la maîtresse d’œuvre d’une démocratie libérale sublimée où se retrouve dans la plus grande des camaraderies l’ensemble des acteurs politiques de « gauche et de droite ». Cette aristocratie déclare sans ambages ne pas croire à une possible victoire militaire, ni même pouvoir anéantir le terrorisme par la force et offrir à notre peuple un sentiment de paix, de sécurité et de sérénité. Ils estiment depuis des lustres que seule la négociation apportera son lot d’espoirs, seuls quelques retraits de-ci de-là  établiront un climat de paix pour des gens de bonne volonté.

 

Lisons entre les lignes, afin de mieux comprendre qui sont, d’une part, les dindons de la farce et qui sont, d’autre part, les bénéficiaires assurés de jouir des parts les plus grasses d’une économie de marché toute dévouée ?

Quels sont les véritables enjeux, qui veut répondre?

Revenons à nos moutons ou, plutôt, à nos dindons. Je les compte parmi la plus forte majorité de la population israélienne et j’affirme sans l’ombre d’un doute que jamais au grand jamais ces nobles et honorables personnes n’ont accepté de s’avilir au-devant des manants des pouvoirs dissolus. Convaincus de leur bon et juste droit sur une terre d’Israël leur appartenant, ils se donnent à elle corps et âme, ils s’offrent pour sa renaissance et sa réviviscence. Ils se savent pourtant préparés à l’ultime si jamais leur devenir venait à exiger le sacrifice suprême mais, en aucun cas, il ne faut accepter de servir de chair à canon pour des indécis, des douteux et surtout de ces fallacieux rêveurs d’un nouveau monde où les loups restent encore les maîtres.

 

Si nous, gens du peuple, acceptons que le concept « société » se conçoive comme une vérité intrinsèque, articulée séparément de ce que je suis, que pourrions-nous expliquer alors?

Est-il possible de soutenir que la morale soit uniquement une prescription provenant du tiers sociétal?

La conscience du pouvoir être et devenir est-elle simplement ce que la société aspire à former et façonner comme connaissance ultime?

Serions-nous capable d’honorer la norme du « droit » si celle-ci était le fruit d’une hégémonie politique, d’une force d’assignation de la société?

Être libre ne veut-il pas dire n’être point asservi intellectuellement, ne subir aucune dictature, mais aussi reconnaître pour soi-même l’évidence de la loi qui m’autorise cela?

 

Si nous venons et apprécions l’ensemble de notre vécu comme inhérent à la société en général, jugeons l’individu comme victime, il faut alors bien admettre que toutes les situations, quelles qu’elles soient, sont essentiellement l’aboutissement voulu par nous. L’ensemble de nos projections sur les responsabilités de la société trouve leurs origines dans notre propre insuffisance, inconséquence et légèreté condamnable. En essayant de voir plus loin que le bout de notre nez, en tentant d’être plus lucide que de mesure, nous serions certainement à même de remarquer que ce que ce nous déplorons le plus chez la créature sociétale, trouve son essence en notre propre sein. Il s’agit de nous et seulement de nous, tout n’est que grâce ou par la faute de l’individu, celui-ci poursuit inlassablement l’avoir, radote sans fin son manque, se calque au pire et s’assimile sans honte à des régimes que l’on dénomme « régimes sociaux ». C’est dire tout le manque avec de tels régimes!

 

L’antinomie définie ici est très sérieuse, tant dans son aspect conceptuel que dans son aspect fonctionnel. Si j’envisage, ma société démocratique, comme étrangère mais bien réelle, elle me brise sous le joug  de son étrangeté et de sa certitude, et me laisse ainsi figé et paralysé. Mais si je parvenais à me convaincre, au plus profond de mon âme et de ma conscience, que si l’Homme est dans le monde, le monde n’en est pas moins dans l’Homme.

 

Je suis, non seulement, à l’ origine du beau, du bien et du vrai mais tout autant du pire.

 

Mon pays, mon état, mon monde ne sont rien d’autre que le plus pur reflet de tout ce que j’ai aussi pensé, voulu, défendu consciemment ou non.

 

Cependant il nous faut savoir que rien n’est irréparable, les drames que nous générons peuvent ne plus être dès demain.

 

S’il se pouvait, oh mon Dieu, que les hommes soient plus terrorisés par la terreur des injustices, par les crimes de l’immoralité, par la violence des mots comme des gestes, tout pourrait changer et notre société devenir un havre de paix où il ferait si bon de vivre!