“J’ai lu et j’ai pleuré” : le cri du rabbin Ilai Ofra contre la nouvelle loi sur la conscription

Le rabbin Ilai Ofra, figure respectée du sionisme religieux, dénonce avec émotion la nouvelle version du projet de loi sur la conscription des ultraorthodoxes. “Ce texte est écrit dans le sang de mes amis tombés au combat”, affirme-t-il dans une tribune bouleversante publiée sur le site Kipa.

La tempête autour du nouveau projet de loi sur la conscription ne cesse d’enfler.
Après la publication de la dernière mouture du “Hok HaGiyous” (loi sur la conscription), rédigée par le député du Likoud Boaz Bismuth, le rabbin Ilai Ofra — rabbin de la communauté de Kfar Batia et figure intellectuelle du camp national-religieux — a réagi avec une colère mêlée de désespoir.

📰 Source : Kipa – 29/10/2025

“Ce projet de loi est écrit avec le sang des soldats”

Dans un long message publié mercredi, le rabbin Ofra écrit :

« J’ai lu avec attention les 40 pages du projet de loi sur la conscription. J’ai lu et j’ai pleuré. Ces lignes sont écrites dans le sang de mes amis tombés au combat. »

Son message, d’une rare intensité, a bouleversé les réseaux sociaux israéliens.
Il y décrit une immense trahison morale : après deux années de guerre, des milliers de morts et de blessés, la coalition aurait, selon lui, choisi d’entériner l’inégalité plutôt que de l’affronter.

« Ce texte ne change rien. Pas une ligne, pas un chiffre, pas une goutte de courage politique. »

Un texte jugé “cynique et mensonger”

Le rabbin s’en prend directement aux auteurs du projet de loi, qu’il accuse d’avoir maquillé une loi d’exemption massive sous des formulations juridiques complexes.
Selon lui, la loi élargit abusivement la définition de “service militaire” en y incluant quelques heures de volontariat civil ou des missions ponctuelles.

« On nous parle d’un “service partiel” au Magen David Adom ou dans des institutions publiques. C’est une farce tragique. Ces amendements ne visent qu’à sauver la coalition, pas le pays. »

Le texte prévoit en effet que les jeunes ultraorthodoxes puissent différer leur service jusqu’à 23 ans et être dispensés s’ils entament un “service communautaire”, ce que le rabbin qualifie d’“insulte à la mémoire des soldats tombés”.

“Deux ans de guerre n’ont pas suffi à réveiller les consciences”

Dans son message, Ofra accuse le gouvernement d’avoir sacrifié la cohésion nationale sur l’autel de la stabilité politique.

« Même deux ans de guerre, deux mille morts et des dizaines de milliers de blessés n’ont pas suffi à briser cette arrogance. Ceux qui votent ce texte ne représentent pas Israël. »

Le rabbin rappelle qu’il a lui-même perdu plusieurs anciens élèves et amis sur le front de Gaza et dans le nord face au Hezbollah.
Son témoignage personnel — un mélange de deuil et de révolte — a été salué comme un électrochoc moral.

« La société israélienne ne tiendra pas si une moitié meurt pour défendre l’autre. Ce n’est pas une question de religion, c’est une question de décence. »

Une onde de choc politique

Ses propos ont provoqué un vaste débat politique.
Plusieurs députés de l’opposition ont repris ses mots à la Knesset.
Yair Lapid a déclaré :

« Quand un rabbin national-religieux pleure sur le mépris du service militaire, cela montre à quel point notre pays a perdu le nord moral. »

Du côté du gouvernement, certains élus du Likoud ont tenté de minimiser la portée du texte, assurant qu’il s’agissait d’un “compromis pragmatique”.
Mais dans l’opinion publique, la réaction a été violente : sur les réseaux sociaux, le mot-dièse #חוק_ההשתמטות (“loi de la fuite”) est devenu viral.

Une fracture morale au cœur du pays

Le texte de Boaz Bismuth, censé “régler définitivement” la question du service des haredim, semble au contraire raviver toutes les tensions.
Les associations de réservistes dénoncent un “coup de poignard” porté à ceux qui servent depuis des mois sans relève.
Des mères de soldats ont publié une lettre ouverte :

« Nos fils rentrent du front épuisés, et tout ce qu’ils voient, ce sont des politiciens qui trouvent mille excuses pour ne pas servir. »

“Le pays a besoin d’un mohel du cœur”

Dans une phrase devenue virale, le rabbin Ilai Ofra conclut son texte :

« La société israélienne a besoin d’un mohel — pas pour la chair, mais pour le cœur. Quelqu’un qui coupe l’indifférence, qui restaure le sens du sacrifice partagé. »

Ces mots résonnent comme un avertissement spirituel dans un Israël divisé entre foi, sécurité et responsabilité collective.


Rédaction francophone Infos Israel News pour l’actualité israélienne
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