C’est une phrase qui glace le sang. « Je l’aurais étranglé avec des téfilines. » Ces mots ont été prononcés en direct à la télévision israélienne, sur la chaîne 13, lors d’un segment censé être humoristique ou critique, selon ses défenseurs. Mais il n’y a rien d’humoristique dans une telle déclaration. S’attaquer à un symbole sacré du judaïsme en le transformant en instrument de strangulation, c’est franchir une ligne rouge. Une ligne que la société israélienne – et au-delà, toute société démocratique – ne peut se permettre d’ignorer.

Car au-delà du choc immédiat, cet incident pose une question fondamentale : jusqu’où peut aller la haine d’une certaine élite médiatique envers la tradition, envers les religieux, envers les valeurs identitaires d’Israël ?

Le choc d’une déclaration inqualifiable

Tout s’est passé lors d’un débat télévisé animé autour de la place de la religion dans la sphère publique. L’invité en question, un chroniqueur connu pour ses prises de position antireligieuses acerbes, a voulu – selon ses mots – “faire une provocation symbolique”. Mais en prononçant :
« S’il avait mis des téfilines devant moi, je l’aurais étranglé avec »,
il a provoqué un séisme. Et à juste titre.

Les téfilines – ou phylactères – ne sont pas de simples objets religieux. Ils sont le lien sacré entre l’homme juif et Dieu, mis chaque matin en signe de foi et de connexion spirituelle. Les transformer verbalement en outil de meurtre est une agression contre toute une identité collective.

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Une parole tolérée, voire banalisée

Le plus choquant n’est peut-être pas la déclaration elle-même, mais le silence gêné, voire le rire gêné des autres participants. Personne n’a immédiatement interrompu l’émission. Aucun animateur n’a coupé la parole. Aucune alerte, aucune condamnation à chaud.

Ce mutisme a été perçu comme une validation implicite. Et pour beaucoup de téléspectateurs, notamment dans le public religieux ou traditionnel, c’est la confirmation d’un climat de mépris croissant à leur encontre dans les médias dominants.

Une haine qui ne se cache plus

Ce n’est pas un incident isolé. Depuis plusieurs mois, on assiste à une montée en puissance des discours antireligieux dans certains cercles médiatiques israéliens, souvent sous couvert de satire, d’ironie ou de critique sociale. Mais entre la satire et l’incitation, la frontière est claire – et ici, elle a été clairement franchie.

Ce type de déclaration n’est pas seulement offensant : il nourrit une haine réelle, décomplexée, qui se déverse sur les réseaux sociaux, dans les rues, et même parfois dans les urnes. C’est la délégitimation progressive d’une partie entière du peuple israélien : celle qui prie, qui respecte le Chabbat, qui met les téfilines le matin.

Une fracture israélienne qui s’aggrave

Cet épisode médiatique illustre une fracture de plus en plus visible entre “Israël Tel-Aviv” et “Israël Jérusalem”, pour reprendre une métaphore souvent utilisée. Entre ceux qui se revendiquent d’un sécularisme militant et ceux qui aspirent à un judaïsme vivant et présent dans la sphère publique.

Mais faut-il vraiment choisir entre modernité et tradition ? Le sionisme historique, rappelons-le, était à la fois laïque et nourri de références bibliques. Le drapeau israélien porte le Magen David, l’hymne s’appelle “Hatikva”, l’État repose sur le calendrier hébraïque. Judaïsme et démocratie ne sont pas incompatibles – ils sont les deux piliers d’Israël.

La réponse du public : indignation massive

Dès les premières heures suivant la diffusion, une vague d’indignation a envahi les réseaux sociaux. Des milliers de commentaires, des appels au boycott de la chaîne 13, des lettres de protestation, et même des manifestations devant les studios.

Des figures publiques – y compris laïques – ont exprimé leur horreur. Un député centriste a déclaré :
« Ce n’est pas une erreur, c’est une haine profonde qui s’est exprimée. Il faut la nommer, la condamner, et s’en protéger. »

Même certaines figures de gauche traditionnellement critiques envers les ultra-orthodoxes ont pris leurs distances avec la déclaration, craignant un climat de guerre civile symbolique.

Où est passée la tolérance ?

On parle souvent de tolérance en Israël, mais celle-ci semble souvent à sens unique. La religion est moquée, méprisée, tournée en dérision – mais gare à celui qui ose critiquer l’élite culturelle. Il serait immédiatement qualifié de populiste, de fasciste, de “Bibi-boy”.

Ce déséquilibre est dangereux. Une démocratie forte repose sur le respect mutuel, sur la possibilité de vivre ensemble malgré les différences. Et cela commence par respecter les croyances de l’autre, même si on ne les partage pas.

La chaîne 13 sous pression

Face à l’ampleur de la colère, la chaîne 13 a publié un communiqué jugé tiède, affirmant que « les propos n’engagent que leur auteur » et qu’il s’agissait d’un « moment malheureux dans le feu du débat ». Aucune sanction n’a été annoncée, aucun retrait de l’antenne.

Cela a attisé encore davantage la colère. Car ce n’est pas un dérapage anodin. Ce n’est pas une simple phrase malheureuse. C’est l’expression d’un mépris assumé, que la chaîne semble couvrir au nom de la liberté d’expression.

Mais la liberté d’expression n’est pas la liberté de menacer. Et certainement pas avec un objet aussi sacré que les téfilines.

La classe politique réagit

Certains députés ont demandé l’ouverture d’une enquête, voire le renvoi immédiat du chroniqueur en question. D’autres appellent à une réglementation plus stricte de l’incitation à la haine religieuse dans les médias. Le ministre des Communications a convoqué la direction de la chaîne pour “explications urgentes”.

Un débat est également relancé autour du rôle de l’Autorité israélienne de radiodiffusion, et de sa capacité à faire respecter les valeurs fondamentales de la société israélienne.

Une opportunité pour se réveiller ?

Ce scandale peut – et doit – être un tournant. Une prise de conscience. Un signal d’alarme.

Israël est un pays aux multiples visages : laïcs, religieux, traditionalistes, séfarades, ashkénazes, druzes, arabes, immigrants. Et cette diversité est sa richesse. Mais elle ne peut survivre que dans un cadre de respect mutuel.

Il est urgent de remettre des garde-fous à la parole publique, de revaloriser le rôle des symboles, et de rappeler que dans une société démocratique, la dignité des croyants vaut autant que celle de tout autre groupe.