La routine continue, mais pour elles, chaque jour est un combat. Dâun cycle de rĂ©serve Ă lâautre, elles essaient de respirer et dĂ©couvrent quâil ne reste plus beaucoup dâair. Elles tiennent la maison, mais sâĂ©croulent sous lâinquiĂ©tude, Ă©puisĂ©es, elles demandent simplement dâĂȘtre vues. Les femmes des soldats de rĂ©serve vivent un autre Yom HaAtsmaout Ă lâarriĂšre, en attendant leur retour Ă la maison.
Rotem Levy, Ayelet Iron et Lital Shochat sont trois dâentre elles. Trois enfants chacune, des centaines de jours de service de rĂ©serve, et une vie en suspens.
« Mon mari repart ? Alors dis-lui de rester »
Rotem Levy, mĂšre de trois enfants Ă Tel Aviv et cadre supĂ©rieure, se souvient du jour oĂč tout a changĂ© : le 7 octobre. Depuis, son mari a Ă©tĂ© Ă Gaza, au Liban, maintenant en Syrie â cinquiĂšme rotation. Plus de 350 jours. Elle a arrĂȘtĂ© de compter.
Elle est aussi cofondatrice du Forum des Ă©pouses de rĂ©servistes, et raconte que lâattention publique sâest Ă©vaporĂ©e. « Au dĂ©but, il y avait des appels, de la nourriture, des questions. Aujourdâhui ? Presque rien. Câest devenu une affaire privĂ©e. On me dit : « Encore en rĂ©serve ? Alors dis-lui de rester ». Comme si câĂ©tait un caprice. »
Les enfants vivent ça chaque jour
« Mon fils de huit ans ne demande plus quand papa revient, mais sâil revient », dit-elle. « Les jumelles se jettent sur lui quand il rentre, et pleurent sâil va juste au supermarchĂ©. »
Ayelet Iron, de Modiin, physiothĂ©rapeute et mĂšre de trois enfants, raconte que son mari en est Ă son quatriĂšme ou cinquiĂšme tour en tant que commandant Ă Gaza. « Au dĂ©but, câĂ©tait une mission. Aujourdâhui, quand je dis quâil est reparti, on me demande pourquoi ? Et si je ne peux pas lui demander dâarrĂȘter. Je ne sais pas si je dois en rire ou en pleurer. »
« Il me demande dâĂȘtre forte, et je dis oui⊠mais je nâai plus de ressources »
« Mon mari mâappelle avant une opĂ©ration, il veut sâassurer que tout va bien Ă la maison. Je dis que ça va, mais au fond⊠je suis Ă©puisĂ©e. » Elle tient bon pour les enfants, pour le travail, pour elle-mĂȘme â « mais ce nâest pas humain sur la durĂ©e ».
Quand il revient, rien nâest simple
Lital Shochat, de JĂ©rusalem, mĂšre de trois enfants, Ă©conomiste, raconte : « Les gens pensent que quand un tour de rĂ©serve se termine, tout rentre dans lâordre. Faux. Ă chaque retour, la routine est dĂ©truite et il faut tout reconstruire. »
LâĂ©tĂ© dernier, elle Ă©tait seule avec trois enfants, une main immobilisĂ©e Ă cause dâune blessure, en plein travail Ă plein temps. Elle a suppliĂ© son mari de revenir. Il nâa pas pu. « Je lui en ai voulu. Ă lui, Ă lâarmĂ©e, Ă tout. Cet Ă©tĂ© a Ă©tĂ© pour moi plus traumatisant que nâimporte quelle fĂȘte. »
Un épuisement généralisé
Iron ajoute : « Mon mari commande des soldats qui nâen peuvent plus. Certains ne viennent pas pour la cinquiĂšme fois. Pas par faiblesse, mais parce quâil nây a personne pour les remplacer. » Levy poursuit : « Ă la Knesset, on entend des promesses. Mais sur le terrain ? Moins de prĂ©sents. Plus dâeffondrements. »
« Viens me voir Ă 7 h du matin, et dis-moi que je ne suis quâĂ lâarriĂšre »
Les trois femmes poursuivent leur carriĂšre Ă plein temps. Ayelet Iron : « Je suis indĂ©pendante. Si je ne travaille pas, je nâai pas de revenus. Et je dois rester forte, seule, sans savoir quand il reviendra. »
Shochat : « On dit parfois : elle nâest pas au front, elle est juste Ă lâarriĂšre. Viens me voir Ă 7 h du matin, sortir trois enfants en pleurs, un email au travail, des larmes Ă essuyer. Dis-moi encore que câest juste. »
La fierté ne suffit pas
Levy : « Je suis fiĂšre de mon mari, fiĂšre de moi. Mais ça ne suffit pas pour faire tenir une famille. » Iron : « Jây crois, Ă ce pays. Mais le pays doit aussi croire en moi, me voir, me protĂ©ger. »
Shochat conclut : « Je ne cherche pas la reconnaissance. Juste quâon nous voie. GrĂące Ă nous, vous cĂ©lĂ©brez Yom HaAtsmaout. GrĂące Ă celles qui tiennent seules, en silence. »
RĂ©daction francophone Infos Israel News pour lâactualitĂ© israĂ©lienne
© 2025 â Tous droits rĂ©servĂ©s