Les années passent, les négociations se succèdent, les avertissements s’enchaînent, et la République islamique d’Iran poursuit inlassablement son chemin vers l’obtention de l’arme nucléaire.

Les négociations de Genève réunissant les États-Unis, la Grande-Bretagne, la Russie, la Chine, l’Allemagne et la France ainsi que les négociateurs iraniens ont pour objectif de parvenir à une solution diplomatique qui permettrait d’éviter une intervention militaire afin de trouver une issue à la crise qui entoure le programme nucléaire depuis plusieurs années. Dans la nuit de samedi à dimanche, les négociateurs ne sont pas parvenus à s’entendre pour un accord temporaire de six mois censé déboucher sur une solution définitive après une période visant à tester le respect par l’Iran de ses engagements. Un nouveau cycle de négociations devrait cependant débuter à partir du 20 novembre prochain.

« Quand il s’agit de la sécurité du peuple juif, je ne me tairai pas ! » Ces quelques mots prononcés par Binyamin Netanyahou confirment la détermination absolue des dirigeants israéliens pour empêcher la conclusion de tout accord qui permettrait à l’Iran de profiter d’un allégement non-négligeable des sanctions qui paralysent actuellement l’économie du pays en échange de quelques concessions insignifiantes de par la possibilité de les contourner facilement, ou bien parce qu elles ne constituent en rien des garanties pour un arrêt définitif du programme nucléaire iranien.

Dès lors, Binyamin Netanyahou n’a pas hésité à dire que l’Iran était en passe de signer « l’accord du siècle » tellement celui-ci remplissait les objectifs de Hassan Rohani. « D’après ce que je comprends, les iraniens sont très satisfaits de Genève, et ils devraient l’être en effet puisqu’ils ont tout obtenu en échange de rien » résume le Premier ministre israélien qui en profite pour rappeler que son pays ne serait aucunement lié par un tel accord.

En outre, Naftali Bennett prévient que « si dans dix ans, une bombe nucléaire cachée dans une valise explose à New York ou qu’un missile nucléaire s’abat sur Rome, on pourra dire que tout cela est à cause des concessions qui auront été faites ».

Après avoir reconnu que des divergences avec l’administration Obama subsistaient sur la question iranienne, l’actuel ministre de l’économie et leader du parti sioniste-religieux, envisage de se rendre aux États-Unis pour faire campagne auprès des élus du Congrès afin de leur expliquer que « la sécurité d’Israël est en jeu ».

L’État juif envisagerait de jouer de son influence auprès des membres du Congrès américain -qui détient le pouvoir de décider des sanctions contre l’Iran- afin d’empêcher la conclusion d’un accord qui n’entraverait en rien la route des islamistes vers l’obtention de l’arme nucléaire. Binyamin Netanyahou bénéficie d’ailleurs d’une certaine popularité auprès des parlementaires américains : le discours qu’il avait tenu devant ces derniers en 2011 avait été chaleureusement applaudi et ponctué par une trentaine de standing ovations.

Cet accord ne manquerait pas non plus de compliquer la possibilité d’une intervention militaire israélienne en Iran notamment vis-à-vis de la communauté internationale. Il importe également de ne pas négliger l’évolution du réacteur d’Arak qui rendrait impossible toute tentative de bombardement au vu des conséquences radioactives d’une telle opération lorsque ce dernier deviendra fonctionnel. Certes, des critiques se font entendre sur la scène politique israélienne envers la stratégie diplomatique offensive adoptée par Netanyahou, mais il existe malgré tout un large consensus à propos du danger constitué par un Iran nucléaire ainsi que de la nécessité d’empêcher un accord qui servirait les intérêts iraniens. De plus, il est important de noter que tout l’appareil de sécurité israélien partage l’avis de Binyamin Netanyahou sur la question iranienne. L’actuel Premier ministre bénéficie par conséquent de la confiance et du soutien de son opinion publique ainsi que de son entourage.

Après la poignée de main historique entre François Hollande et Hassan Rohani en septembre dernier, la France est aujourd’hui pointée du doigt pour sa responsabilité dans l’échec des négociations visant à parvenir à un accord provisoire. Laurent Fabius s’est d’ailleurs montré très critique en imposant notamment des modifications au projet d’accord sur plusieurs points jugés comme « préoccupants ». En Iran, « l’intransigeance » française fait l’objet de toutes les critiques dans les milieux médiatiques et politiques. Mohammad Javad Zarif, ministre iranien des Affaires étrangères, accuse d’ailleurs ouvertement la France d’être plus intransigeante que les États-Unis. C’est dire à quel point l’administration Obama est disposée au compromis ou plus exactement à la compromission. En tout état de cause, on ne sera pas surpris d’apprendre que la position de la France a même fait l’objet de critiques parmi les négociateurs occidentaux ! La clairvoyance dont fait exceptionnellement preuve le Quai d’Orsay et le courage qui caractérise sa gestion du dossier iranien peuvent être expliqués par la prise de conscience des dirigeants français quant aux dangers relatifs à une nucléarisation de l’Iran ainsi que d’une réelle préoccupation pour ses conséquences sur la stabilité et la sécurité d’Israël, du Moyen-Orient et plus largement du monde libre. Il convient également de mentionner les liens solides qui unissent la France à un certain nombre de pays du Golf menacés par Téhéran dont l’Arabie Saoudite et le Qatar.

Alors que l’administration Obama et les autres partenaires du groupe semblaient satisfaits, la France s’est distinguée en présentant l’exigence de conditions solides et viables pour parvenir à un éventuel accord avec l’Iran sur la question du nucléaire. Elle rejoint ainsi de facto la ligne dure prônée depuis tant d’années par Binyamin Netanyahou et partagée par le Congrès américain. C’est donc sans surprise que l’engagement exemplaire de la France a été salué en Israël; mais aussi aux États-Unis où le « Vive la France ! » twitté par le sénateur John McCain n’est d’ailleurs pas passé inaperçu.

En 2004, l’accord prévoyant la suspension de l’enrichissement d’uranium s’est soldé par un échec retentissant. Dans un livre paru en 2011, Hassan Rohani, l’actuel président iranien et ancien chef des négociateurs pour le nucléaire, écrit : « pendant que nous parlions aux européens à Téhéran, nous avons ajouté des équipements à Ispahan ». Dans ces conditions et puisqu’il est impensable pour tout dirigeant politique d’abandonner une stratégie qui fonctionne, la République islamique d’Iran a l’art et la manière de parvenir à négocier sur ce qui ne peut l’être. En effet, aucun compromis n’est possible dans la mesure où il n’existe pas d’alternative à un démantèlement du programme nucléaire iranien -qu’il conviendrait d’exiger au moyen d’un ultimatum ou autrement dit d’une diplomatie coercitive n’hésitant pas à brandir la menace d’une intervention militaire- si ce n’est celle d’accepter les conséquences d’une bombe atomique entre les mains d’un régime totalitaire qui n’hésite pas à avoir recours au terrorisme ainsi qu’à menacer de destruction l’État juif. L’Histoire, pourtant riche en enseignements, ne semble malheureusement pas influencer davantage les choix des grands de ce monde, mais en Israël, au Congrès américain et visiblement en France aussi, on n’oublie pas certaines leçons du passé.

Par Yonatane Laïk – Alyaexpress-News