Si, dans le judaïsme, la prière est une obligation pour les hommes, elle ne l’est pas pour les femmes. « Sexisme » ? Que non pas ! Nos Sages ont simplement estimé que nos compagnes avaient mieux à faire en s’occupant du foyer… ce qui est considéré – Et ce n’est pas rien ! – comme équivalent au Service du Temple. L’égalité ? Oui mais avec d’autres fonctions, comme – pour prendre un exemple à la portée du premier « droit-de-l’hommiste » de base venu – au football avec l’avant-centre et le gardien de but. « Sexisme » ? Que non pas ! Comment alors expliquer cette différence, la raison pour laquelle c’est l’homme qui doit prier et pourquoi son rôle n’est pas interchangeable.

 

Rachi nous rapporte (Béréchith II, 4) « C’est avec les deux lettres yodי – et heyה – de Son Nom que Hachèm a créé les deux mondes (1). Et ici on nous apprend que ce monde-ci a été créé avec la lettre hey… » De leur côté, les kabbalistes nous ont dit que les initiales des mots « Yom Hachichi » (« Jour le-sixième » – יום הששיBéréchith I, 31 – phrase qui marque dans Béréchith la fin de la Création et le début du Shabbath !) constituent le mot “יה, car c’est le Nom avec lequel D‑ieu a formé l’Univers, comme il est dit : « C’est avec יה que Hachèm forme les mondes » (Ichayahou XXVI, 4). Nos Sages ont dit encore que les initiales des mots « Yom Hachichi Véyékhoulou Hachamayim » (2) (יום הששי ויכלו השמים) forment le Tétragramme.

 

On peut donc en déduire que, puisque ce qui constitue le matériel a été créé avec la lettre “hey”, ce qui constitue dans ce monde-ci la part du spirituel a été créé avec la lettre “yod”. Sachant que, selon le Midrach, le Nom de Hachèm réside au milieu du couple (L’homme se dit en hébreu ich et s’écrit איש“alèph”, “yod”, “chin”, la femme se dit icha et s’écrit אשה“alèph”, “chin”, “hey”; si l’on retire le “yod” – י – du mot ich et le “hey” ה – du mot icha, c’est-à-dire la Présence de D‑ieu, il ne reste que èch אש/“alèph”  et “chin” – c’est-à-dire le « feu » !), on peut dire que, dans ce monde-ci, l’homme a reçu un élément prédominant tendant vers le spirituel, tandis que la femme a reçu un élément prédominant tendant vers le matériel… et, comme par hasard, le besoin de sécurité matérielle est reconnu, par les psychologues, plus développé chez celle-ci que chez l’homme. L’un des secrets de la bonne marche de notre monde, « le monde de l’action », se situerait donc dans un fragile équilibre entre le spirituel et le matériel, entre l’homme et la femme qui doivent s’unir pour ne faire que « une seule chair » car l’homme sans substrat matériel ne serait qu’un « ange » – et n’aurait rien à faire dans ce monde-ci – et la femme sans substrat spirituel ne serait qu’une « bête » (H’aya – חיה) – pareille aux animaux (3). Et elle ne l’est pas (4) ! Car la femme a conscience de l’importance de son rôle dans la marche de ce monde-ci vers sa perfection, ainsi qu’on a pu le voir dans l’épisode de la akédat Ytzh’ak (« sacrifice d’Ytzh’ak » mais, traduit littéralement, « ligature d’Ytzh’ak » car, après tout, il n’a finalement pas été « sacrifié »).

 

Je résume : accompagné de son serviteur Eliézer de Damas, d’Esav et d’Ytzh’ak, Avraham déambule à la recherche du lieu où il devra sacrifier son fils, « son unique, celui qu’il aime » (5). Soudain, il aperçoit un étrange nuage accroché à une montagne (la montagne est en fait le Mont Moriah, centre métaphysique de la Terre, où ont été élevés les deux premiers Temples et où sera très bientôt élevé le troisième). Il apostrophe Ytzh’ak et lui demande : « Vois-tu ce que je vois ? » « Oui ! » répond celui-ci. Avraham se tourne ensuite vers ses deux autres accompagnateurs, leur pose la même question et, devant leur réponse négative, saisit qu’il s’agit du lieu choisi pour l’akédat. Il comprend aussi que « la nuée » n’est perceptible qu’à ceux ayant atteint un haut niveau spirituel et c’est pourquoi il dit à son serviteur et à Ichmaël « Installez-vous ici avec l’âne… »  Chvou lakhem po im ha-h’amor… » – …שבו־לכם פה עם־החמור), c’est-à-dire « Restez à ce niveau-ci peuples-du-matérialisme, Ytzh’ak et moi allons nous élever à un niveau spirituel que ni vous, ni vos descendants n’atteindront ». Car, en hébreu, un « âne » (h’amorחמור) a la même racine que h’omer (חמר – « matière ») et im (עם – « avec ») peut aussi se lire am (עם – “peuple”). Ce rapport entre « l’âne » et « la matière » explique aussi la prophétie du Machiah’ Ben David « chevauchant un âne », « dominant la matière », faite par Zkharya. Oui, mais voilà ! Restée seule, Sarah – partenaire parfaite d’Avraham et au rôle indispensable dans l’équilibre du devenir de ce monde (toujours cette balance entre le “hey” –  ה – et le “yod” – י) – se rend compte que Avraham, en sacrifiant son fils dans un geste d’abnégation totale, de confiance aveugle en D‑ieu, s’élèvera spirituellement à un point tel qu’il créera une distorsion entraînant la destruction de ce monde. D’autant que Ytzh’ak vivant est nécessaire à la poursuite de la marche de l’humanité vers le but final de la Création, vers la stabilité harmonieuse entre le matériel et le spirituel. Bien sûr, pour tenter de le dissuader, elle aurait pu chanter « Avi, tu n’es pas un ange ! » mais elle ne connaissait pas le groupe Vaya Con Dios et c’est pourquoi le choc fut tellement rude qu’elle en est morte avant le retour de son époux et de son fils sain et sauf.

 

« La femme est (donc bien) l’avenir de l’homme ! » et Adam (אדם – “alèph”, “daleth” et “mèm” final) – Qui n’était pas un imbécile et « voyait d’un bout à l’autre du monde » (C’est-à-dire qu’il voyait l’avenir du monde depuis sa Création jusqu’à son issue heureuse !) – ne s’y est pas trompé en acceptant de goûter au « fruit défendu » proposé par celle-ci : pour être des  Mench (6), ses descendants – pour « avoir les pieds sur terre » (אדמה – adama) tout en « gardant la tête au Ciel » – devront ajouter aux dimensions du “alèph” –  א (« Alèph est un et il est le secret de l’Un » Zohar sur Chir Hachirim 74c) et du דם (dam – « sang »), ce petit « plus » de « matérialité » qu’est la lettre “hey” –  ה ! C’est pourquoi, Messieurs, si l’étude et la prière sont importantes, il serait quand même bon, de temps à autre… d’aider votre épouse à faire la vaisselle !

 

Par Yéh’ezkel Ben Avraham  pour Alyaexpress-News 

(1) Ces « deux mondes » sont Hachamayim vé Haaretz (« les Cieux et la Terre », créés dès le Jour Un) et constituent selon Abrabanel (« Commentaire du récit de la création », « Explication du passage : Au commencement D‑ieu créa le ciel et la terre ») : (a) pour les Cieux : « un terme générique englobant tous les intellects séparés selon leur hiérarchie, et le globe céleste qui est la résidence des réalités spirituelles » ; (b) pour la Terre : « un comble de la matérialité qui comprend les quatre éléments ». Il est à remarquer que, comme seul D-ieu est « Un », en dehors de Lui toute chose possède une dualité ou une multiplicité qui se rejoignent dans l’Un.

(2) Début de la phrase inaugurant le kiddoush de Shabbath : « Yom hachichi: Véyékhoulou hachamayim véha-aretz vécol tséva’am » (יום הששי ויכלו השמים והארץ וכל צבאם – « Le sixième jour : Le ciel, la terre et tout ce qu’ils renferment étaient achevés » – Béréchith I, 31‑II, 1)

(3) Il existe bien sûr de nombreuses exceptions et, quand certaines femmes –  telles, par exemple, que Dvora au temps des Juges ou, actuellement en Israël, que Nadia Matar (« Les Femmes en Vert ») – se mettent à agir pour pallier la pusillanimité de la majorité des hommes en ce qui concerne le kiddouch Hachèm (« Sanctification du Nom »), on ne peut que rester sans voix face à leur élévation spirituelle, leur courage et leur esprit d’abnégation. Quant au caractère de « spiritualité » prédominant chez l’homme, souffrant de trop nombreuses exceptions aujourd’hui (Ce serait plutôt ce « caractère prédominant » qui serait l’exception et il n’est pas étonnant – comme le remarquait Eric Zemour – que l’homme actuel semble « se féminiser » !), il faut rappeler le commentaire de Rachi sur Béréchith I, 26 : « Faisons l’homme à notre image, comme à notre ressemblance et qu’ils dominent… sur toute la terre, et sur tous les êtres qui s’y meuvent »Na’asé Adam bétsalménou kédmouténou véirdou … békhol haaretz ou vékhol harémès haromès al-haaretz – נעשה אדם בצלמנו כדמותנו וירדו…בכל הארץ ובכל הרמש הרמש על-הארץ : ET QU’ILS DOMINENT – וירדו mot à double face : domination (רִידוּי ridouï) ou déchéance (יְרִידָה yérida). S’il a du mérite, l’homme domine la bête. S’il n’a pas de mérite, il descend plus bas que la bête, la bête le domine ». Il est cependant à noter que cela s’adressait tant à la femme qu’à l’homme (Il s’agit ici d’Adam avant que H’ava n’en soit détachée et non d’Adam en tant qu’être « séparé » !) et que le pluriel (« qu’ils dominent ») prouve que D‑ieu parle non seulement d’Adam mais aussi de toutes les générations qui lui succéderont.

(4) A ce propos, se demande Abrabanel  (« Commentaire du récit de la création »), « Pourquoi Adam a-t-il appelée notre mère à tous H’ava (חוה) ? Si c’est parce qu’elle était la mère de tout être vivant, il aurait dû l’appeler H’aya  (חיה – “vivante”) et si c’est parce que les lettres “vav” et “yod” sont toujours interchangeables, la question reste de savoir pourquoi il ne l’a pas appelée H’aya en utilisant ce nom selon ses lettres propres plutôt que H’ava en utilisant les lettres interchangeables ? » On trouvera dans son étude les longues explications qu’il apporte à cette question mais – pour ma part et sachant que ce nom lui a été donné après la « faute » (Qui, en fait, n’en était pas vraiment une !) – je constate que, par ce petit changement, les deux dernières lettres du nom de celle qui devient « mère de tous les vivants », en s’ajoutant au “yod” – י – du mot ich et au “hey” ה – du mot icha, permet de développer les quatre lettres du Tétragramme dans notre monde… Je laisse le soin à nos Sages d’infirmer mes réflexions ou d’en étendre toutes les conclusions.

(5) Hachèm lui avait dit (Béréchith XXII, 2) « Prends donc ton fils, ton unique, celui que tu aimes – Ytzh’ak ; achemine-toi vers le pays de Moriah (« Jérusalem » selon II Divré hayamim III, 1), et là offre-le en holocauste sur une des montagnes que je te désignerai ». « Prends donc », il s’agit d’une prière instante et non d’un ordre ; « ton fils », Avraham en ayant deux, D‑ieu ajoute alors « ton unique ». Comme tant Ichmaël que Ytzh’ak étaient chacun « l’unique » de leur mère, Il précise « Ytzh’ak ». Ceci, explique Rachi, « Pour ne pas le jeter brusquement dans le désarroi et troubler son esprit et le déchirer. Et aussi pour lui rendre plus cher le Commandement divin, et pour le récompenser pour avoir obéi à chaque parole prononcée ici»

(6) Mench : terme yiddish, pratiquement intraduisible, signifiant approximativement « Un Homme courageux, ne manquant pas de grandeur ».