Une dépendance accrue à l’ingénierie de combat

« De l’ingénierie de combat, encore et toujours. Si nous pouvions doubler nos unités d’ingénierie, ce serait déjà fait », explique un haut responsable de Tsahal. Pour répondre à l’intensité des combats dans plusieurs zones, Tsahal a lancé la création d’un nouveau bataillon d’ingénierie de combat, qui s’ajoutera aux trois existants. Cependant, cela reste insuffisant face aux besoins.

Selon des informations recueillies par Ynet, l’armée fait appel depuis plusieurs mois à des entrepreneurs civils pour des missions opérationnelles en zone de combat. Sous la supervision de commandants militaires (généralement au niveau de chef de compagnie ou de bataillon), des civils réalisent des travaux au-delà des frontières. Ce recours, limité au début de l’année, a pris de l’ampleur avec le temps.

Des missions dans des zones sensibles

Ces civils effectuent des tâches variées, comme la démolition complète de centaines de bâtiments à Gaza, notamment dans le corridor Netzarim, ainsi que des forages pour détecter des tunnels du Hamas. Dans le nord de la bande de Gaza, les bulldozers détruisent quotidiennement des structures ciblées par l’armée pour sécuriser la présence des soldats.

Ces pratiques se sont également étendues au front nord, où des entrepreneurs traversent la frontière libanaise pour aider à défricher des milliers d’hectares. Ces zones boisées servaient de couverture au Hezbollah pour construire des infrastructures militaires (bunkers, points de tir). Depuis la chute du régime d’Assad, des équipes civiles travaillent également à la frontière syrienne, où elles dynamitent des amas de basalte, creusent des tranchées profondes et érigent des monticules de terre dans le cadre du projet « Nouveau Moyen-Orient », visant à renforcer la frontière contre les milices armées.

Un besoin urgent de matériel et d’expertise

Le manque de main-d’œuvre et de matériel est aggravé par l’usure des équipements pendant les combats dans la bande de Gaza. De nombreux bulldozers, y compris des D9, sont hors d’usage. L’armée a dû se tourner vers des machines civiles, mais également recruter des opérateurs externes.

Le retard dans la livraison de 132 bulldozers D9 commandés aux États-Unis (bloqués par un embargo discret) a également poussé l’armée à élargir le recours aux civils. Selon un cadre de Tsahal : « Les entreprises civiles nous offrent de la flexibilité : les unités militaires d’ingénierie opèrent en première ligne, sur des missions très risquées, tandis que les civils travaillent sur des tâches plus « sûres », après que nous avons sécurisé la zone ».

Conditions de travail et risques

Les missions confiées aux civils sont strictement définies. Par exemple, démolir 20 bâtiments dans un quartier de Gaza en journée, sous la protection de soldats et avec la supervision d’ingénieurs militaires. À la fin de la journée, les civils quittent la zone et reprennent le lendemain.

Un chef d’équipe civile explique : « Nous recrutons des opérateurs d’excavateurs pour des contrats de deux mois, cinq jours par semaine, de 6h à 18h. Les rémunérations varient : ceux qui apportent leur propre machine gagnent le plus, tandis que les employés d’une entreprise perçoivent un salaire horaire supérieur à la moyenne ».

Bien que protégés, ces civils travaillent souvent sans gilets pare-balles ni casques, ce qui peut poser problème en cas d’incidents. L’un d’eux confie : « Porter un équipement de protection toute la journée sous le soleil est difficile. Nous savons que ce travail est risqué, mais nous sommes formés pour gérer les situations d’urgence ».

Des accidents parfois mortels

En mai dernier, Liron Itzhak, un civil de 30 ans, a été tué par un tir de mortier dans la bande de Gaza. Sa famille se bat pour qu’il soit reconnu comme un soldat mort en service. Cette question reste sensible, car d’autres civils tués dans des missions similaires ont été reconnus comme des « martyrs de Tsahal ».

Selon l’armée, ces civils sont essentiels pour maintenir un rythme opérationnel élevé et fournir une expertise en ingénierie spécifique, notamment pour des travaux de forage complexes. Cependant, ces missions impliquent des risques inhérents, et l’armée veille à leur fournir un maximum de sécurité dans des conditions extrêmes.