Ghaith al-Omari, de l’Institut de Washington pour la politique au Proche-Orient, a occupé plusieurs postes au sein de l’Autorité palestinienne, notamment celui de directeur du Département des relations internationales au bureau du président palestinien et de conseiller de Mahmoud Abbas. Il a également été conseiller de l’équipe de négociation de l’OLP de 1999 à 2001.

Son analyse de ce que l’accord Israël / EAU signifie pour les Palestiniens est donc très intéressante.

Surtout, la reconnaissance d’Israël par les EAU teste également si la question palestinienne résonne toujours avec la rue arabe, en particulier la jeune génération. Alors que les EAU ne sont pas une démocratie à tous égards, leurs dirigeants, comme c’est le cas dans tout le monde arabe, sont sensibles à l’opinion publique. Bien que cette décision ne soit pas aussi populaire auprès des Emiratis que des Israéliens, il y a des indications que la question palestinienne n’est plus une priorité élevée pour le public émirien.

La volonté historique des États arabes de placer la détresse des Palestiniens au centre de leur politique étrangère a amplifié le poids des Palestiniens et de leur lutte. Mais si les EAU peuvent réussir ce tournant de 180° diplomatique, cela suggérera que la question palestinienne perd sa résonance traditionnelle et est maintenant incapable de mobiliser les masses. Cela pourrait affaiblir davantage la main diplomatique des Palestiniens.

Le plus immédiat est la suppression de l’annexion de l’ordre du jour.

Mais au-delà de cet avantage à court terme pour les Palestiniens, l’histoire a montré que les pays arabes qui entretiennent des relations avec Israël – à savoir l’Égypte et la Jordanie – sont plus efficaces pour faire avancer les intérêts palestiniens. C’est en partie parce qu’ils ont des conversations directes avec Israël, qui ne veut pas perdre ses liens avec ces deux voisins. Mais c’est aussi parce qu’à Washington et dans la communauté internationale au sens large, leurs relations formelles avec Israël leur confèrent plus de crédibilité que les pays qui n’ont pas ce statut et sont perçus comme critiquant automatiquement l’État juif. Les EAU seront un ajout précieux et efficace à ce groupe, en particulier dans la mesure où ils étendent le dialogue israélo-arabe au Golfe stratégiquement important.

Le processus de paix israélo-arabe est embourbé depuis de nombreuses années. Ce vide a conduit au durcissement des positions parmi les Palestiniens et les Israéliens, et de nombreux acteurs internationaux et régionaux ont renoncé à toute perspective de progrès entre les deux parties. En effet, la solution à deux États – l’idée que le conflit peut être résolu en divisant la Terre Sainte entre Israël et un État palestinien – a rapidement perdu son soutien. L’annexion aurait mis fin à toute perspective de progrès, car elle aurait rendu une future Palestine non viable. Ce nouveau développement peut créer une fenêtre pour commencer à changer ces dynamiques.

Je ne suis pas tellement optimiste quant à la conclusion d’Israël et des Palestiniens par rapport à une quelconque sorte d’accord, car la position palestinienne n’a été que du rejet et d’attendre que la communauté internationale fasse pression sur Israël pour cela sans compromis.

La dynamique est maintenant différente. Si l’OLP ne peut plus compter sur le monde arabe pour la soutenir par réflexe, elle doit recalibrer sa stratégie. Pour le moment, il n’a pas de leader avec la clairvoyance ou le courage de le faire. Cependant, une condition préalable à toute sorte de paix est la sécurité israélienne – et la sécurité psychologique d’Israël est aussi importante que sa sécurité physique.

Si Israël a l’impression de faire partie du Moyen-Orient, et qu’il est un véritable allié du monde arabe, et s’il sait que ses amis arabes veulent la paix plus qu’ils ne veulent voir Israël disparaître, il sera plus disposé à le faire, et prendre des risques pour la paix.

Si les Palestiniens réalisent que leur stratégie de s’appuyer sur un solide mur de soutien arabe a échoué, ils seront confrontés au choix difficile de devenir un vassal de l’Iran et de devenir une mini-Syrie ou le Liban, ou de choisir de faire ce qui est le mieux pour leurs citoyens.

Jusqu’ici dans leur brève histoire, les dirigeants palestiniens ont toujours fait les pires choix. Il n y a aucune raison de penser que cela va changer. Mais ce coup de foudre diplomatique leur donne au moins la chance de se réveiller.