Le cƓur s’est brisĂ© deux fois : les familles qui ont perdu plusieurs proches ce 7 octobre

Doudou Jerfi a perdu son fils Liel et ses deux sƓurs, Shom et Shanhav, Inbar Rosenfeld a perdu sa sƓur Hadar et son beau-frĂšre Itai et Rachel Malka a perdu ses deux fils, Michael et Osher. Dans de nombreuses familles, la tragĂ©die a touchĂ© plus d’un membre. Ce sont les histoires de trois de ces familles.

« PremiĂšre Pessah sans eux : c’est seulement maintenant que nous commençons Ă  digĂ©rer la perte »

« Il y a des jours oĂč nous sommes au lit et ne voulons pas en sortir », raconte Doudou Jarfi, qui a perdu le 7 octobre son fils aĂźnĂ© Liel (18 ans) et ses deux sƓurs cadettes, Shoam (30 ans) et Shanhav (27 ans) . Ce Shabbat aurait pu ĂȘtre un autre Shabbat de plaisir en famille, mais il s’est transformĂ© en un cauchemar sans fin pour toute une famille.

« Mes sƓurs travaillaient Ă  la fĂȘte en vendant des billets », raconte Doudou. « Ce samedi-lĂ , mon fils Liel et moi sommes arrivĂ©s Ă  Herzliya pour passer les vacances avec mes parents. En raison de nos relations trĂšs Ă©troites et bonnes, mes sƓurs ont suggĂ©rĂ© que Liel se joigne Ă  elles pour une fĂȘte et il est spontanĂ©ment sorti avec elles. Ma femme Nerdit ne savait mĂȘme pas qu’il se trouvait en bordure de Gaza. Lorsque les roquettes ont commencĂ©, nous avons eu une correspondance avec mes sƓurs, qui ont dit qu’elles se cachaient dans l’abri. À 9 heures, nous avons perdu le contact avec elles. Je suis descendu vers le sud pour les chercher, mais en chemin nous avons Ă©tĂ© arrĂȘtĂ©s par les forces de l’ordre. Nous avons cherchĂ© pendant des heures dans chaque bus ou hĂŽpital, mais il n’y avait aucune trace d’eux. »

Ce n’est qu’aprĂšs une semaine cauchemardesque que la dure nouvelle est arrivĂ©e. La famille a d’abord Ă©tĂ© informĂ©e de la mort de Shoham, un jour plus tard du meurtre de Liel et plus tard dans la journĂ©e Ă©galement de la dĂ©couverte du corps de Shenhav. « Ce n’est que maintenant que nous commençons Ă  digĂ©rer la perte. Ce dernier Pessah, nous avons fait les premiĂšres fĂȘtes sans eux, et contrairement aux annĂ©es prĂ©cĂ©dentes, nous l’avons fait sĂ©parĂ©ment – parce que c’était trop difficile. En outre, la perte nous a permis de nous rapprocher encore plus et d’ĂȘtre plus unis.  »

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Shoam (30 ans) et Shanhav (27 ans)

Liel Jarfi Ă©tait un enfant d’un foyer. « Il Ă©tait trĂšs axĂ© sur la famille », disent ses parents, « un bon garçon qui avait beaucoup de contentement qu’il transmettait Ă©galement Ă  ses frĂšres. Il aimait lire, jouer sur l’ordinateur, il souriait toujours. Il s’est spĂ©cialisĂ© en logiciels et prĂ©voyait de devenir ingĂ©nieur afin d’obtenir un bon poste dans l’armĂ©e. C’était un garçon trĂšs intelligent, tout comme Shenhav et les autres. C’est pourquoi nous Ă©tions sĂ»rs qu’ils s’étaient enfuis et se cachaient dans un endroit oĂč ils ne pouvaient pas accĂ©der mais les terroristes les ont Ă©galement attrapĂ©s. »

Avishag (37 ans), la sƓur aĂźnĂ©e de Shoham et Shanhav, Ă©tait pour eux une sorte de seconde mĂšre. Elle dit : « D’un cĂŽtĂ©, elle Ă©tait sĂ©rieuse, et de l’autre, elle aimait rire, vivre en grand et s’envoler. Elle rĂȘvait grand. Elle Ă©tait prĂ©paratrice physique et nutritionniste. Il Ă©tait important pour elle d’inculquer une mode de vie sain chez les autres. Elle a consacrĂ© sa vie au sport et a mĂȘme appris la boxe. Elle a toujours Ă©tĂ© active. Pour se dĂ©velopper, elle a fait de grands voyages dans des endroits lointains, en vacances , elle Ă©tait la photographe de la famille, enregistrant Ă  chaque instant. AprĂšs avoir rĂ©cupĂ©rĂ© son tĂ©lĂ©phone, nous avons vu qu’elle enregistrait Ă©galement leurs derniers instants dans le miroir.

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La famille prÚs de Migonit, photo : aucune

Ivory, comme Seham, avait Ă©galement un lien particulier avec les fĂȘtes nature. « Shanev est la fille des aĂźnĂ©s, notre bĂ©bĂ© qui est venu aprĂšs quatre frĂšres et quatre autres sƓurs. Elle voyait la vie quotidienne comme ennuyeuse et avait de grands rĂȘves. Elle voulait explorer le monde, s’envoler pour l’Australie pendant longtemps.  Chaque anniversaire, elle prĂ©parait un gĂąteau Ă  ma fille magnifique. Elle avait Ă©galement prĂ©vu d’ouvrir une pĂątisserie. Ils Ă©taient tous les deux liĂ©s l’un Ă  l’autre depuis leur naissance jusqu’au moment de leur assassinat. Ils Ă©taient opposĂ©s et se complĂ©taient tous les deux Ă  leur façon. »

« Leur rĂȘve Ă©tait d’ĂȘtre parents, malheureusement ils n’y sont pas vraiment parvenus »

« Nous avons deux souvenirs vivants devant nos yeux, il est donc difficile de ne pas penser Ă  Hadar et Itai. Vous donnez le bain Ă  leurs jumeaux et vous pensez : comment se fait-il qu’ils ne soient pas lĂ . Leur rĂȘve Ă©tait d’ĂȘtre parents.

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Itay et Hadar Bardichski avec leurs deux enfants,

Ces pensĂ©es traversent l’esprit d’Inbar Rosenfeld (28 ans), le frĂšre cadet de Hadar, qui a Ă©tĂ© assassinĂ© avec son mari Itai Bardichski lors du  Sabbath Ă  Kfar Gaza par des terroristes du Hamas, et ils n’ont que 30 ans. Ils formaient un couple magnifique, prospĂšre et aimant. , qui a laissĂ© derriĂšre lui des jumeaux, Guy et Roy. Depuis ce jour, ils grandissent sans papa et maman. Aujourd’hui Guy et Roi ont un an et demi, ils grandissent chez leur tante, ils ont une famille chaleureuse et aimante, mais on a du mal Ă  penser qu’ils ne connaĂźtront jamais leurs parents. « Ce sont des pensĂ©es qui surgissent : quand devrons-nous vraiment leur dire ce qui s’est passĂ©, mais il n’y a pas de rĂ©ponse, on ne sait pas quand cela arrivera. Ils sont trĂšs jeunes et ne se souviendront Ă©videmment de rien. »

Hadar (nĂ©e Rosenfeld) est nĂ©e Ă  Kfar Gaza. Ses parents sont venus lĂ -bas au cƓur de Nahal, sont tombĂ©s amoureux et y ont fondĂ© une famille composĂ©e d’un couple de parents et de six frĂšres et sƓurs. Inbar est l’aĂźnĂ© et Hadar a deux ans de plus que lui. Il Ă©tait lĂ  lorsqu’elle a rencontrĂ© son mari, Itay, qui a grandi Ă  Serigim :  » Ils se sont rencontrĂ©s grĂące Ă  un ami commun quand ils avaient 20 ans, et huit ans plus tard, ils se sont mariĂ©s. C’était censĂ© ĂȘtre la quatriĂšme annĂ©e de leur mariage. Pendant des annĂ©es, Itai a Ă©tĂ© officier dans l’armĂ©e, ils ont vĂ©cu Ă  Beer Sheva pendant leurs Ă©tudes et une fois installĂ©s, ils ont dĂ©cidĂ© de construire leur maison Ă  Kfar Gaza, Ă  proximitĂ© du reste de la famille. Ils savaient qu’ils allaient Ă©lever leurs enfants ici et fonder une famille. »

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Inbar avec ses deux neveux orphelins,

Ils ont fondĂ© leur famille Ă  Kfar Gaza, et c’est lĂ  que sont nĂ©s les jumeaux Guy et Roy. Ils Ă©taient les premiers jumeaux de la famille . Ce furent des moments de pur bonheur, mais aussi des moments de challenge : « S’occuper de jumeaux est une chose complexe, les nuits Ă©taient longues, pas faciles. Pourtant, cela leur a apportĂ© beaucoup, tant individuellement qu’en couple. MalgrĂ© toutes les difficultĂ©s, les enfants Ă©taient leur lumiĂšre et leur carburant. »

Mais le 7 octobre, les lumiĂšres s’éteignent. Kfar Aza Ă©tait attaquĂ©e, des terroristes sont entrĂ©s et ont assassinĂ© le couple. « Nous avons encore des questions sur ce qui s’est passĂ© Ă  la maison », dĂ©clare Inbar. « Le dernier message de Hadar Ă©tait Ă  6h54. Elle a dit qu’elle Ă©tait coincĂ©e dans l’abri avec les sacs des enfants. Elle a Ă©tĂ© retrouvĂ©e morte dans la cuisine, apparemment en train de prĂ©parer des biberons pour les enfants. Le corps d’Itai a Ă©tĂ© retrouvĂ© dans l’abri Ă  cĂŽtĂ© de Guy et Roy. Les forces qui sont entrĂ©es dans la maison les ont trouvĂ©s non pas cachĂ©s dans le placard mais cĂŽte Ă  cĂŽte dans le mĂȘme lit sur le cĂŽtĂ© de la piĂšce, et non dans le lit exposĂ© devant la porte. Itai n’a eu que le temps d’en habiller un, c’est quelque chose qui est impossible Ă  oublier « . Depuis, les familles des deux cotĂ©s tentent de combler le fossĂ© : « Avec tout le chagrin et la douleur, les enfants devraient retrouver une vie normale. »

Hadar, qui a Ă©tudiĂ© l’économie et la comptabilitĂ©, travaillait dans une start-up. « Tout me rappelle elle. Nous avions notre argot, nos chansons. Elle Ă©tait la meilleure dans ce qu’elle faisait, ils lui prĂ©disaient un grand avenir et voulaient qu’elle progresse dans la sociĂ©tĂ©. Itay aimait le fitness et ensemble, ils adoraient le sport, la nourriture et les bons restaurants. Elle aimait aussi cuisiner. C’étaient deux personnes extraordinaires, c’était difficile de ne pas tomber amoureux d’eux, ensemble et sĂ©parĂ©ment, ce n’est pas un clichĂ©, ils ont vraiment pris le meilleur de nous. Selon Inbar, il n’a toujours pas pu les pleurer : « Ma famille est toujours Ă©vacuĂ©e de chez moi, je dois m’occuper des jumeaux, me battre pour que ma meilleure amie, Emily Demari, revienne de captivitĂ©. Je me sens impuissante. »

« Ma vie s’est Ă©coulĂ©e en une seconde. Je n’ai plus d’enfants, je n’ai plus de raison de vivre. Ils me les ont tous deux pris »

« Ma vie s’est Ă©coulĂ©e en une seconde. Je n’ai plus d’enfants, je n’ai plus de raison de vivre. Ils me les ont tous deux enlevĂ©s. Je m’endors en pleurant et je me rĂ©veille en pleurant, tout le temps mes pensĂ©es courent et leurs images sont devant mes yeux, je ne peux pas ĂȘtre Ă  la maison, je me sens Ă©touffĂ©e », dit-elle honnĂȘtement et douloureusement sans fin Rachel Malka (72 ans), mĂšre des jumeaux Michael et Osher (35 ans) de JĂ©rusalem. Tous deux ont Ă©tĂ© assassinĂ©s lors d’une fĂȘte Ă  Beri le 7 octobre.

Elle revient un instant sur l’immense bonheur qu’elle a Ă©prouvĂ© Ă  leur naissance. « Il m’a fallu du temps avant de dĂ©cider de mettre un enfant au monde. C’était une trĂšs grande surprise que j’aie des jumeaux, une heureuse surprise. Je les ai Ă©levĂ©s avec bonheur et ils ont obtenu tout ce qu’ils demandaient, nous nous sommes battus pour qu’ils le soient. Avoir tout. »

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Michael et Osher Ă©taient Ă©galement les meilleurs amis. « C’est une journĂ©e portes ouvertes oĂč il y a toujours des amis. Ils aimaient tout faire ensemble : jouer au football, voyager Ă  l’étranger, aller Ă  des fĂȘtes, produire et organiser des fĂȘtes. Ils ont vĂ©cu une vie heureuse ensemble – ils ont passĂ© et travaillĂ© ensemble, oĂč Michael est allĂ©, Osher est allĂ©, et vice versa. C’était ma joie dans mon cƓur qu’ils ne fassent qu’un. L’un ne pouvait pas se passer de l’autre, et c’est pour cela qu’ils ne pouvaient pas se sĂ©parer. Dans leur vie et dans leur mort, ils n’ont pas Ă©tĂ© sĂ©parĂ©s. »

Rachel ne peut oublier la terrible matinĂ©e du 7 octobre, ni les heures et les jours qui ont suivi. « J’étais Ă  la maison avec ma petite-fille. Je ne savais pas que leur fĂȘte se dĂ©roulait en bordure de Gaza. Quand les roquettes ont commencĂ©, j’ai appelĂ© pour savoir ce qui se passait chez eux. Ils ne m’ont pas rĂ©pondu, ni mĂȘme lorsque j’envoyais des messages, je voulais aller les chercher. Une seule fois, j’ai rĂ©ussi Ă  attraper Michael, mais il a dit un mot Ă  voix basse, et quand j’ai entendu parler des centaines de terroristes, mon cƓur s’est serrĂ©. Lundi, nous avons reçu le message selon lequel Osher Ă©tait toujours portĂ© disparu, mais vendredi, ils sont venus nous informer  qu’il avait Ă©tĂ© assassinĂ©. »

Depuis ce jour, la famille s’engage Ă  perpĂ©tuer sa mĂ©moire. Ils ont lancĂ© un projet de stands pour placer les tĂ©filines. Rachel dit qu’elle a du mal Ă  trouver le rĂ©confort, la joie de vivre qu’elle avait Ă  la maison, la musique qu’ils y entendaient – tout est fini. « Ils avaient des milliers d’amis, ils connaissaient tout le monde et tout le monde savait qui Ă©taient les jumeaux Michael et Usher. Ils savaient comment rendre les gens heureux, les gens les aimaient pour leur sourire et leurs cĂąlins – ils donnaient toujours beaucoup d’amour Ă  tout le monde. »


RĂ©daction francophone Infos Israel News pour l’actualitĂ© israĂ©lienne
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