Yair Lapid, qui prendra ses fonctions de Premier ministre cette semaine, devra formuler sa politique concernant l’accord nucléaire avec l’Iran, qui est maintenant de retour sur la table, d’ici quelques jours. Le gouvernement de Bennett s’est ouvertement opposé à l’accord, mais Lapid subira des pressions, y compris par des responsables de la sécurité, pour changer de politique.
Le retour des pourparlers sur l’accord nucléaire ne devrait pas surprendre : l’Iran et les États-Unis ont un intérêt stratégique à signer rapidement un accord renouvelé, chacun pour ses propres raisons.
L’administration Biden est profondément préoccupée par les prix du carburant aux États-Unis, qui reflètent la flambée du coût de la vie, et leur impact attendu sur les élections de mi-mandat en novembre, qui devraient vaincre les démocrates.
Dans tous les cas, Biden a soutenu l’accord depuis le début et y voyait le moyen le plus important d’empêcher l’Iran de devenir un État nucléaire. Les Américains pensent qu’en retirant l’uranium iranien riche de son territoire, il sera possible de s’éloigner considérablement de la bombe, ou du moins de « gagner du temps », qui servira à améliorer le futur accord ou à préparer d’autres options qui empêcheront l’Iran d’atteindre la capacité nucléaire.
Les Iraniens ont besoin d’un accord pour lever les sanctions économiques qui l’accompagnent et pour débloquer des milliards de dollars qui ont été gelés sur divers comptes bancaires à travers le monde. Revenir à l’accord permettra également de produire 6 à 5 fois plus de pétrole, ce qui signifie que d’énormes sommes d’argent afflueront chaque année dans leurs coffres. Cet argent permettra de redresser légèrement l’économie iranienne, qui traverse une crise profonde, et de freiner la vague de protestations dans le pays.
Il est probable qu’avec la reprise des négociations, les Iraniens reviendront et exigeront le retrait des Gardiens de la révolution de la liste des organisations terroristes, mais ils pourraient s’en retirer. Il s’agit en tout cas de questions tactiques, qui ne doivent pas occulter l’objectif stratégique des parties : le retour à un accord.
Jusqu’à présent, Israël s’est opposé avec véhémence à l’accord. Naftali Bennett, contrairement à Benjamin Netanyahu, a choisi de ne pas affronter ouvertement le gouvernement Biden mais d’agir dans les coulisses, mais leur politique concernant l’accord lui-même était la même : ils pensaient tous les deux qu’il s’agissait d’un mauvais accord, qui ne réglait pas les nombreux problèmes dans l’accord initial de l’Iran dans le développement et l’installation de centrifugeuses avancées, qui lui permettent d’enrichir l’uranium à un rythme beaucoup plus rapide que par le passé.
Lapid devra, en tant que Premier ministre par intérim, formuler sa politique immédiatement, avant même que Biden ne se rende dans la région le mois prochain. Il apprendra que de hauts responsables de Tsahal – dirigés par le chef d’état-major et des hauts responsables des services de sécurité et de l’aile iranienne – soutiennent l’accord, qui, selon eux, soustrait l’Iran à la bombe et donne à Israël un certain temps pour se préparer à une option militaire importante.
D’autre part, d’autres facteurs politiques et de sécurité dirigés par le Mossad estiment que, tant sur le plan professionnel que moral, il est interdit de modifier la politique existante. À leur avis, Israël ne peut pas être partenaire d’un mauvais accord, dont l’expiration est proche et ne corrige pas les trous qui figuraient dans l’accord initial avec les puissances et ceux qui ont été découverts depuis.
Cette position est partagée par Bennett, qui servira dans le gouvernement Lapid en tant que ministre responsable de la question iranienne. Il est possible que Bennett ait cherché à garder le poste pour lui parce qu’il craignait que la pression de Tsahal – qui nécessite au moins une explication publique, étant controversée – imprègne et affecte la politique de Lapid, qui n’a pas encore été formulée.
Implications politiques
La décision aura des implications stratégiques mais aussi politiques. Bien que le public ne connaisse généralement pas les détails de l’accord, il s’y oppose instinctivement. Le changement de politique actuel, à la veille d’une campagne électorale qui semble particulièrement aiguë, peut le présenter comme s’alignant sur une politique américaine problématique sur une question existentielle pour Israël..
Des sources politiques estiment qu’Israël ne peut pas être partenaire d’un mauvais accord. Il est possible que Bennett ait cherché à garder le portefeuille de l’Iran pour lui-même de peur que la pression de Tsahal n’affecte Lapid.