Le Rebbe de Satmar dĂ©nonce la ‘gzerat shmad’ : un cri politique qui secoue le monde haredi et IsraĂ«l

En visite en IsraĂ«l, le Rebbe de Satmar a dĂ©clenchĂ© une tempĂȘte politique et religieuse en affirmant que la rĂ©forme de la conscription Ă©quivalait Ă  une “gzerat shmad”, un dĂ©cret d’anĂ©antissement spirituel. Devant des milliers de fidĂšles, il a rappelĂ© la prophĂ©tie du “Vayoel Moshe” et averti que “les haredim ne pourront plus vivre sous un gouvernement de destruction spirituelle”. Un discours explosif dans un climat israĂ©lien dĂ©jĂ  sous tension.


Le leader mondial de la dynastie hassidique Satmar, figure emblĂ©matique de l’antisionisme religieux, a atterri en IsraĂ«l hier soir pour une sĂ©rie d’évĂ©nements communautaires. DĂšs son arrivĂ©e, le ton a Ă©tĂ© donnĂ© : le Rebbe est venu, selon ses propres mots, “se tenir aux cĂŽtĂ©s de ceux qui combattent les guerres de Dieu contre le dĂ©cret de conscription”.

La visite du Rebbe, rapportĂ©e par Kikar HaShabbat et confirmĂ©e par plusieurs sources haredies, a immĂ©diatement pris une tournure politique. À peine arrivĂ©, il s’est rendu chez le rav Moshe Sternbuch, gaon et prĂ©sident du Badatz de la Eda HaHaredit, puis a poursuivi vers les bureaux du tribunal rabbinique de la communautĂ© Ă  Zupnick, avant de rejoindre un gigantesque rassemblement sous une tente dressĂ©e Ă  JĂ©rusalem.

Ce voyage, pourtant annoncĂ© comme purement spirituel, est devenu un moment de mobilisation contre le projet de loi sur le service militaire des ultra-orthodoxes — un dossier explosif qui divise profondĂ©ment IsraĂ«l.


“Les compromis sur la conscription sont du shmad” : un discours d’une rare sĂ©vĂ©ritĂ©

Le Rebbe n’a pas mĂąchĂ© ses mots. Devant les responsables du Badatz, il a lancĂ© :

“Il y a ceux qui cherchent des compromis, prĂȘts Ă  voter une loi selon laquelle la moitiĂ© du peuple juif en Eretz Hakodesh irait Ă  l’armĂ©e. Ce sont des compromis de destruction. Le service militaire est un dĂ©cret de shmad.”

Le terme “shmad”, employĂ© par la tradition juive pour dĂ©signer des dĂ©crets historiques imposĂ©s par des rĂ©gimes visant l’éradication de la Torah, a un poids religieux exceptionnel. Son utilisation par le Rebbe contre un gouvernement israĂ©lien place sa dĂ©claration dans un registre d’alerte spirituelle maximale.

Il est allĂ© plus loin, rappelant une prophĂ©tie attribuĂ©e Ă  son oncle, le Rav YoĂ«l Teitelbaum, auteur du cĂ©lĂšbre Vayoel Moshe, texte fondateur de l’idĂ©ologie anti-sioniste haredie :

“Il viendra un jour oĂč un dĂ©cret de conscription sera imposĂ© en Eretz Yisrael, et aucun Juif haredi ne pourra vivre sous un gouvernement de shmad.”

Puis, il a ajouté :
“Ce jour est arrivĂ©.”

Ces phrases, rapportĂ©es par Behadrei Haredim et Kikar, ont provoquĂ© une onde de choc dans les milieux politiques israĂ©liens. Leur gravitĂ© dĂ©passe le cadre interne de la communautĂ© Satmar : elles viennent renforcer l’aile dure du monde haredi opposĂ©e Ă  tout compromis avec l’État.


Une visite transformée en tournée politique

Selon les vidéos publiées sur Kikar HaShabbat, le Rebbe a été accueilli dans chacune de ses étapes par des foules massives. Les rues de Jérusalem ont été bloquées par des milliers de fidÚles venus entendre un message de fermeté totale.

Plusieurs arrĂȘts ont marquĂ© la journĂ©e :

  • Maison du rav Sternbuch : Ă©changes prolongĂ©s sur la crise du recrutement.
  • Visite chez les rabbanim de Bratslav : chants et priĂšres, mais aussi avertissements contre “la tentation de l’assimilation spirituelle via l’armĂ©e”.
  • Rencontre avec les Rebbe de Gour et de Belz : une rare rĂ©union entre dynasties souvent rivales.
  • Grand rassemblement Ă  “Dover Shalom” : discours majeur, s’inscrivant dans la tradition hassidique des appels collectifs.

Lors de l’évĂ©nement central, accompagnĂ© d’une cĂ©rĂ©monie de fin d’écriture d’un Sefer Torah — symbole classique d’union spirituelle — le Rebbe a rĂ©pĂ©tĂ© que son voyage avait pour seul objectif de “se dresser contre le dĂ©cret de conscription”.

Le fait qu’une figure vivant aux États-Unis se dĂ©place en IsraĂ«l uniquement pour s’opposer Ă  une dĂ©cision gouvernementale montre la tension exceptionnelle du moment.


Le débat israélien sur la conscription atteint un point de rupture

La question de la conscription haredie n’a jamais Ă©tĂ© aussi explosive. Selon Haaretz et Times of Israel, la Cour suprĂȘme a rĂ©itĂ©rĂ© que l’État ne peut maintenir un systĂšme d’exemption totale sans base lĂ©gale explicite. Le gouvernement travaille donc sur une loi qui tenterait d’équilibrer exigences militaires, pression juridique et stabilitĂ© politique.

Mais pour Satmar, la simple idĂ©e d’intĂ©grer des jeunes haredim dans l’armĂ©e est inacceptable.

Le Rebbe l’a formulĂ© sans dĂ©tour :
“Chacun qui vote une telle loi vote pour la destruction de la religion. C’est un cas de yehareg ve’al yaavor.”
Autrement dit : mieux vaut mourir que transgresser — le niveau le plus extrĂȘme de l’interdit dans la loi juive.


Une fracture profonde, aux conséquences politiques trÚs concrÚtes

Si Satmar ne participe pas politiquement Ă  la Knesset — en accord avec son idĂ©ologie anti-sioniste — ses paroles influencent nĂ©anmoins des dizaines de milliers de familles haredies, en IsraĂ«l comme aux États-Unis. Elles renforcent la frange la plus radicale du camp anti-conscription, prĂ©cisĂ©ment au moment oĂč des nĂ©gociations sensibles sont en cours entre les partis haredim et le gouvernement.

Dans un pays oĂč les tensions internes sont dĂ©jĂ  exacerbĂ©es par les sĂ©quelles du 7 octobre, ce type de discours ajoute une couche supplĂ©mentaire : la peur d’un Ă©clatement social autour de la question militaire.

IsraĂ«l, qui lutte pour maintenir la cohĂ©sion nationale, voit ainsi ressurgir une vieille fracture : celle entre État moderne et communautĂ©s ultra-religieuses qui se perçoivent comme en guerre spirituelle permanente.


Conclusion : un avertissement qui pourrait redessiner le paysage haredi

Les mots du Rebbe de Satmar ne sont pas des déclarations passagÚres. Ils constituent un avertissement adressé à tout le spectre haredi :
la conscription n’est pas une rĂ©forme administrative, mais une ligne rouge existentielle.

Pour IsraĂ«l, en pleine reconstruction militaire et morale aprĂšs les attaques du Hamas, le dĂ©fi sera de parvenir Ă  Ă©tablir un modĂšle d’équitĂ© sociale sans provoquer une rupture avec une partie significative de la population juive orthodoxe.

L’histoire l’a montrĂ© : dans un pays au destin aussi fragile, la question du service militaire n’est jamais uniquement sĂ©curitaire — elle est identitaire, religieuse, et parfois explosive.


RĂ©daction francophone Infos Israel News pour l’actualitĂ© israĂ©lienne
© 2025 – Tous droits rĂ©servĂ©s

 

Â