Evan, Gilad et S.L.G. sont des LGBT de droite, et ils nâont pas lâintention de sâexcuser âą La panique qui sâest emparĂ©e des milieux de gauche aprĂšs les Ă©lections ne les Ă©meut pas : « LâhystĂ©rie nâest pas justifiĂ©e, elle est alimentĂ©e par les mĂ©dias » âą Ils accusent les organisations LGBT de rejoindre la gauche : « Câest une catastrophe » âą Et ils estiment que la bonne nouvelle viendra justement de la droite : « Lâassociation avec Ben Gvir et Smotrich a changĂ© leur opinion ».
Le nouveau gouvernement nâa pas encore Ă©tĂ© formĂ© et les nĂ©gociations de coalition sont en cours, mais dĂšs lâannonce des rĂ©sultats des Ă©lections, des cris de dĂ©tresse ont Ă©tĂ© entendus des partisans du bloc de gauche disant que « le pays est detruit ». La question qui retient le plus lâattention est celle des LGBT : le fait que la coalition Ă©mergente devrait inclure une majoritĂ© religieuse-conservatrice, des partis ultra-orthodoxes au sionisme religieux de Smotrich, Ben Gvir, et surtout les ultra-conservateurs. La composante orthodoxe â le dĂ©putĂ© Avi Maoz du parti Noam â suscite des inquiĂ©tudes dans la communautĂ©.
Face aux voix apeurĂ©es, il y a aussi des voix presque inaudibles, des personnes LGBT qui nâappartiennent pas au bloc de gauche et qui ont votĂ© fiĂšrement et sans rĂ©serve pour les partis du bloc de droite. Lâun dâeux est Evan Cohen (54 ans), docteur en linguistique Ă lâuniversitĂ© de Tel-Aviv, qui vit Ă Ramat Gan avec son compagnon, membre du Likoud et militant politique.
« Jâai travaillĂ© trĂšs dur pour que le bloc de droite gagne. Jâai amenĂ© des dizaines de personnes Ă voter pour le camp national en gĂ©nĂ©ral et le Likoud en particulier. Ăvidemment, il y a de la complexitĂ©, mais nous sommes de grands enfants et câest la meilleure option du deux, sans Ă©quivoque. »
Pourquoi ĂȘtes-vous heureux ? DĂ©sormais, les personnes qui sâopposent ouvertement Ă la communautĂ© LGBT serviront Ă la Knesset et votre situation empirera ?Â
« Je ne suis pas dâaccord avec cette hypothĂšse. Tout dâabord, celui qui se tient au centre du gouvernement qui sera formĂ© est le parti Likoud, le mĂȘme parti qui a Ă©crit il y a une dizaine dâannĂ©es dans sa constitution quâil agirait contre toute discrimination fondĂ©e sur les prĂ©fĂ©rences sexuelles. Je conviens que lâattitude envers les personnes LGBT des autres partis de la coalition semble ĂȘtre problĂ©matique, mais la composition de la coalition est presque la mĂȘme quâau sein du gouvernement en 2015-2019, et au cours de ces annĂ©es, il y a eu des progrĂšs dans tous les aspects. Aujourdâhui le Likud est un parti trĂšs progressiste dans ce domaine : un homme ouvertement homosexuel a Ă©tĂ© Ă©lu Ă la cinquiĂšme place des primaires ».
Mais sous un gouvernement de gauche, la situation de la communautĂ© LGBT est meilleure, non ? Concernant le mariage, la maternitĂ© de substitution ou lâadoption ?Â
» Le gouvernement Lapid-Ganz-Bennett a siĂ©gĂ© ici pendant un an et demi. Non seulement une loi autorisant le mariage civil nâa pas Ă©tĂ© approuvĂ©e pendant ce mandat, mais une telle loi nâa mĂȘme pas Ă©tĂ© soumise. Il nây a mĂȘme pas une loi, rien, zĂ©ro. Le problĂšme est quâil nây a pas de mariages civils en IsraĂ«l, point final. Câest quelque chose qui blesse quiconque veut se marier dans un mariage non religieux, y compris les gais et les lesbiennes. Les personnes LGBT qui se sont mariĂ©es Ă lâĂ©tranger ne sont pas discriminĂ©es, ces mariages sont reconnus en IsraĂ«l, et leur statut de notoriĂ©tĂ© publique lâest Ă©galement.
« Sur la question de la gestation pour autrui, le seul ministre homosexuel du gouvernement sortant, Nitzan Horowitz, a dĂ©clarĂ© Ă la Haute Cour que âla chance de modifier la loi dans la Knesset actuelle est nulleâ, et câest dans un gouvernement de gauche. La question de la maternitĂ© de substitution a Ă©tĂ© rĂ©solue par la Cour suprĂȘme contrairement Ă la loi expresse, ce qui est bon pour la maternitĂ© de substitution mais problĂ©matique en soi que le tribunal contredit le lĂ©gislateur Ă©lu. Câest un cri depuis des gĂ©nĂ©rations que nous permettons Ă la cour de faire ce quâelle veut. En matiĂšre dâadoption, les homosexuels nâont aucun problĂšme juridique Ă adopter. Le problĂšme est personnel, dans les comitĂ©s eux-mĂȘmes, oĂč ils sont souvent discriminĂ©s. »
Mais les opinions de certains des membres de la coalition émergente ne seront-elles pas projetées vers le bas, vers le public ?
« Je ne mentirai pas, les dĂ©clarations dâAvi Maoz sont trĂšs problĂ©matiques. Il a son Ă©lectorat, 20 Ă 30 000 personnes qui le suivent, câest-Ă -dire aprĂšs le rabbin Tao. Moi et Avi Maoz nâavons rien Ă nous dire.  »
Et avec le reste oui ?
« Ben Gvir a dit quâil sâoppose aux dĂ©filĂ©s des fiertĂ©s, mais quâil ne les limitera pas. Son point de vue est plus large : toute la nation et son intĂ©gritĂ© sont importantes pour lui. Il ne fait pas de distinction entre les personnes LGBT et les hĂ©tĂ©ros. Avec lui, et en gĂ©nĂ©ral avec la droite religieuse, on assiste ces derniĂšres annĂ©es Ă une Ă©volution vers plus dâouverture. Ils ont rĂ©alisĂ© que les gays et les lesbiennes ne sont pas quelque chose qui nâexiste quâĂ gauche. Ils sont partout, gĂ©ographiquement et politiquement.
« Il y a aussi un autre versant Ă cela : des associations et des organisations Ćuvrant pour les droits des personnes LGBT qui ne sont pas censĂ©es ĂȘtre politiques, liĂ©es Ă lâagenda dâunification des luttes et ont rejoint la gauche. Lâamener Ă une section politique est un dĂ©sastre. Lors des derniĂšres Ă©lections, jâai vu des organisations LGBT appeler ouvertement Ă ne pas voter pour les partis de droite, comme sâil y avait un lien entre la prĂ©fĂ©rence sexuelle et lâopinion politique. Leur erreur fondamentale est quâelles sont censĂ©es travailler pour les personnes LGBT, pas pour le Meretz. »
Cohen nâĂ©pargne pas les critiques des gauchistes qui sont restĂ©s silencieux face aux dĂ©clarations homophobes de leurs membres de la coalition du parti Raam : « Ce qui est plus grave, ce nâest pas que lâhomophobe Walid Taha faisait partie de la prĂ©cĂ©dente coalition. Ce qui est surtout grave, câest que les autres membres de la coalition, y compris les homosexuels, lâont pris pour acquis. « Je comprends, mais je ne peux pas accepter », a dĂ©clarĂ© Yorai Lahav-Hertzno. Lâhomophobie ne doit pas ĂȘtre comprise, point final. Lâun des militants de la communautĂ© trans est mĂȘme allĂ© jusquâĂ dire que lâhomophobie de certains Arabes nâest pas terrible car « accessoire », comparĂ©e Ă lâhomophobie prĂ©mĂ©ditĂ©e des « kahanistes ». Je suis fier que mes reprĂ©sentants du Likoud ne soient pas silencieux face Ă lâhomophobie, point final. Quelque chose que je ne peux pas dire Ă propos de la gauche. »
Comme on le sait, le premier ministre ouvertement gay des gouvernements israĂ©liens nâa pas Ă©tĂ© nommĂ© dans un gouvernement de gauche mais plutĂŽt dans le gouvernement du Likud par Netanyahu. Il sâagit, bien sĂ»r, du dĂ©putĂ© Amir Ohana, qui devrait Ă©galement occuper un poste de direction dans le gouvernement dĂ©signĂ©. Ohana est considĂ©rĂ© comme lâun des favoris du Likud, et lors des rĂ©centes primaires, il est arrivĂ© Ă la cinquiĂšme place.
Ohana a rĂ©cemment publiĂ© sur sa page Facebook son expĂ©rience de visite Ă la synagogue Ă Yom Kippour, avec son fils et son compagnon : « Nous voulions emmener le petit David Ă la synagogue pour la priĂšre de clĂŽture et entendre le shofar⊠Nous avons recu Ă Alon , David et moi une place dâhonneur et avons rejoint la priĂšre. Nous avons priĂ© jusquâĂ la fermeture. .. Lorsque nous nous sommes retournĂ©s pour partir, lâun des fidĂšles a demandĂ© au rabbin de « donner une bĂ©nĂ©diction Ă lâenfant », en dĂ©signant David. Maintenant, je sais comment se passe la bĂ©nĂ©diction et je comprends quâaprĂšs « celui qui a bĂ©ni nos ancĂȘtres Abraham, Isaac et Jacob » vient aussi « il bĂ©nira » un tel fils dâun tel.
Cette histoire du dĂ©putĂ© Ohana en apprend peut-ĂȘtre plus que tout sur le processus que les cercles conservateurs en IsraĂ«l ont traversĂ©, oui, aussi grĂące au fait quâOhana est lâun des leaders de la droite aux cĂŽtĂ©s de son orientation sexuelle.
Peut-ĂȘtre que ce nâest pas une grande sagesse dâĂȘtre un homosexuel de droite quand vous agissez Ă la lumiĂšre de Jabotinsky. Mais que ressentent ceux qui ont votĂ© pour le sionisme religieux, dont lâintensification a provoquĂ© la panique actuelle ? Gilad HaLhami (38 ans) est lâun dâentre eux. Il vit en couple dans le sud de Tel-Aviv, possĂšde un garage et milite pour la libĂ©ration du sud de Tel-Aviv.
Avez-vous fait vos valises seul ?
« Pardon? »
Les mĂ©dias parlent dâune baisse massive des personnes LGBT du pays au vu des rĂ©sultats des Ă©lections.
« Oh, non. Je nâai pas lâintention de partir, je suis content des rĂ©sultats des Ă©lections. Pendant sept ans, jâai Ă©tĂ© actif au sein du Front de libĂ©ration du sud de Tel-Aviv avec Shafi Paz. Au dĂ©but, nous avons travaillĂ© avec Shaked, mais en raison de son dĂ©part du camp, nous avons dĂ©mĂ©nagĂ© pour travailler avec le sionisme religieux. Nous travaillons en Ă©troite collaboration avec Smotrich, Rothman et Ben Gvir. Rotman mâa invitĂ© chez lui, et Ben Gvir est venu Ă mon anniversaire avec Shafi Paz, il sâest assis, a ri, a mangĂ© et bu avec dix personnes LGBT assises avec nous. Quand on voit une personne qui est dĂ©peinte dans les mĂ©dias comme un homophobe venir Ă un anniversaire de sa propre initiative, les deux parties se dĂ©tendent.
« Ils ne nient pas que dans le passĂ©, ils se sont comportĂ©s diffĂ©remment et quâeux aussi ont subi un changement. Les relations personnelles rĂ©duisent la phobie LGBT. Aujourdâhui, ils ont une objection Ă lâordre du jour de la communautĂ© LGBT, pas Ă la chose mĂȘme. Ils disent oui : « Ce sont nos frĂšres, nous ne les haĂŻssons pas et nous nâagirons pas contre eux personnellement, mais nous, en tant que parti religieux, ne pouvons accepter lâagenda LGBT. â ».
Quây a-t-il de mal Ă exiger des droits fondamentaux comme le mariage ou la maternitĂ© de substitution ?
« Lâagenda affichĂ© des organisations a depuis longtemps cessĂ© de parler de droits fondamentaux. Câest loin dâĂȘtre lâespace qui copie lâagenda amĂ©ricain, qui oblige aussi les Ă©coles religieuses Ă permettre Ă un enfant de se dĂ©finir comme trans Ă lâĂąge de 6 ou 7 ans. Câest trĂšs controversĂ© mĂȘme au sein de la communautĂ©, certains y voient du pĂ©chĂ© et que ce nâest pas le bon Ăąge pour sâen occuper.
« Je connais des femmes laĂŻques hĂ©tĂ©rosexuelles qui ont vraiment soutenu la communautĂ© et participĂ© Ă des dĂ©filĂ©s dans le passĂ©, qui ont sorti leurs enfants de lâĂ©cole laĂŻque et les ont transfĂ©rĂ©s dans lâenseignement religieux parce quâils ne leur imposent pas ce programme. »
Quand Lehami classe les tĂąches nationales par ordre dâimportance, les droits des LGBT ne figurent mĂȘme pas dans le top cinq. « Je ne suis pas innocent. Je nâai pas votĂ© pour le sionisme religieux en pensant que le mariage homosexuel serait promu. Je suis Ă©galement favorable aux transports en commun le Shabbat et je sais que cela ne sera pas promu non plus, pourtant jâai votĂ© pour eux, car il y a des choses plus importantes que cela. Dans le systĂšme Ă©lectoral actuel, il nây a pas dâautre option, mĂȘme si vous nâĂȘtes dâaccord quâavec certaines choses. Je vote pour ceux qui sont en faveur de la rĂ©forme du systĂšme judiciaire, en faveur de lâexpulsion des infiltrĂ©s, du renforcement de lâidentitĂ© juive, et ce sont des choses qui sont importantes pour moi. Il est plus important pour moi de lutter contre la rĂ©alitĂ© quâil y a trois coups de couteau par semaine dans le sud de Tel-Aviv et que trois quartiers ont dĂ©jĂ perdu leur majoritĂ© juive, que tous les droits de la communautĂ© LGBT »
Halami dit que lui et Shafi Paz, Ă©galement ouvertement LGBT, sont dĂ©noncĂ©s et attaquĂ©s par la communautĂ© en raison de leur proximitĂ© avec la droite et les conservateurs. Selon lui, la communautĂ© devrait les remercier pour cette proximitĂ©, car elle permet Ă la droite et LGBT religieuse Ă sortir du placard. « Si un jeune homosexuel grandit dans une famille de colons ou de conservateurs de la pĂ©riphĂ©rie, et que ses parents nous voient prononcer des discours Ă la confĂ©rence Otzma Yehudit, ou Amir Ohana atteindre des sommets au Likud, il a plus de chances de sâen sortir. Câest plus confortable pour lui. Ma connexion avec Ben Gvir et Smotrich a changĂ© leur opinion. Au-delĂ des droits, il y a une chose importante dâacceptation, et parfois câest encore plus important. Ce sont des choses qui poussent dâen bas, pas nĂ©cessairement de la lĂ©gislation.
Halami affirme que de par sa connaissance des plans de travail du sionisme religieux, il sait quâils nâont aucune rĂ©fĂ©rence Ă la question LGBT, pour le meilleur ou pour le pire. Le seul qui travaille sur la question est Avi Maoz, et il ne le fait quâen son nom. Selon lui, mĂȘme si Maoz essaie dâannuler le dĂ©filĂ© de la fiertĂ© â il ne pourra pas le faire car il nâaura pas de partenaires pour cela. « LâhystĂ©rie nâest pas justifiĂ©e, et elle est alimentĂ©e par les mĂ©dias . »
Quâest-ce qui vous rend heureux dans les rĂ©sultats des Ă©lections ?
« Je suis dans une crise de panique continue de la part de ce gouvernement depuis un an et demi, sous tous les aspects possibles. Maintenant, je suis calme. Le fait que je suis de la communautĂ© LGBT ne dĂ©finit pas qui je suis. Je suis aussi orthodoxe, et Je sais que le prochain gouvernement sâoccupera de choses qui sont plus importantes pour moi que mon identitĂ© et ma prĂ©fĂ©rence sexuelle. Jâai dâautres domaines dâintĂ©rĂȘt tels que la sĂ©curitĂ©, la politique Ă©trangĂšre, lâĂ©conomie, lâĂ©ducation et la culture. Le domaine du judaĂŻsme sera Ă©galement ĂȘtre manipulĂ©s correctement, comme le hamets de Pessah ou les transports en commun de Shabbat. Câest beaucoup plus important pour moi que les droits des LGBT. Concernant la question LGBT, jâai lâimpression que dans la derniĂšre dĂ©cennie je nâai rien Ă redire. Jâai tous les droits dont jâai besoin. Nous sommes reconnus partout, mĂȘme Ă la SĂ©curitĂ© sociale. Que voulez-vous de plus ? Se marier avec un voile et les sanctifications? Cela nâarrivera pas.
« Nos enfants vont bien, ils nous accueillent partout, les synagogues mâaccueillent, je suis invitĂ© aux repas de Shabbat chez lâĂ©lite du rabbinat israĂ©lien, qui Ă©coute ma place et me voit. MĂȘme le rabbin Rafi Peretz mâa rencontrĂ© pendant la tempĂȘte quand il a parlĂ© contre les LGBT, et je lui ai expliquĂ© les difficultĂ©s, alors il mâa Ă©coutĂ© et mâa compris. AprĂšs cette rĂ©union, il mâa invitĂ©, moi et mon partenaire, Ă nous asseoir avec lui. »
Ben Shatrit sâoppose aux organisations LGBT qui, selon elle, investissent les fonds qui leur sont transfĂ©rĂ©s par le gouvernement pour des questions politiques au lieu de les orienter vers lâaide Ă la communautĂ© elle-mĂȘme et dâinvestir dans des agents dĂ©vouĂ©s, Ă lever le bras LGBT dans la police et la justice. « Ils ont reçu tant dâargent, mais ils ne lâont pas utilisĂ© correctement et sagement. Je pense que le traitement de la communautĂ© doit provenir dâun organisme officiel de lâĂtat. Elle ne peut pas ĂȘtre entre les mains dâorganisations autonomes de la communautĂ©. »
RĂ©daction francophone Infos Israel News pour lâactualitĂ© israĂ©lienne
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