
Moshe Zonder a vite remarquĂ©: «Mes Ă©tudiants sont tout Ă fait sĂ©rieux. Ils Ă©crivent. Ils font les missions. Tous. Câest formidable dâenseigner ici.
Zonder ne devrait pas ĂȘtre aussi surpris. Pour un futur scĂ©nariste, avec qui mieux Ă©tudier que celui qui a Ă©crit toute la premiĂšre saison de «Fauda», le film controversĂ© international israĂ©lien diffusĂ© aux Ătats-Unis sur Netflix?
Durant le semestre dâautomne, Zonder a enseignĂ© un cours sur la scĂ©narisation et la tĂ©lĂ©vision Ă la Rutgers University, au Nouveau-Brunswick, dans le New Jersey. Cela fait partie du programme Schusterman qui propose des artistes israĂ©liens dans des universitĂ©s amĂ©ricaines et dâautres institutions culturelles.
«Fauda», dont la deuxiĂšme saison a Ă©tĂ© lancĂ©e en mai, est le mot arabe qui signifie « chaos » et câest ce que les tĂ©lĂ©spectateurs ressentent. Il est centrĂ© sur une unitĂ© militaire secrĂšte israĂ©lienne dâĂ©lite dont les membres se dĂ©guisent en Arabes, traversent la JudĂ©e Samarie et recourent Ă la violence, souvent mortelle, pour Ă©liminer les terroristes. Câest Ă la fois excitant et dĂ©primant, donnant lâimpression quâil nây a aucun espoir de rĂ©solution pacifique du diffĂ©rend controversĂ©.
Zonder a Ă©tĂ© impliquĂ© dans la sĂ©rie dĂšs le dĂ©but, lorsque les crĂ©ateurs Lior Raz (qui interprĂšte Ă©galement le personnage principal de la sĂ©rie, Doron Kavillio) et Avi Issacharoff (qui Ă©crit Ă©galement des chroniques pour le Times of Israel) ont dâabord tentĂ© de la vendre. Le processus a pris plus de quatre ans, a dĂ©clarĂ© Zonder dans un entretien tĂ©lĂ©phonique.
La rĂ©ticence des rĂ©seaux israĂ©liens Ă diffuser le spectacle est peut-ĂȘtre comprĂ©hensible. Le trio avait créé une histoire qui impliquait une unitĂ© de lutte contre le terrorisme israĂ©lienne moralement compromise, qui vivait selon ses propres rĂšgles, tirant sans distinction sur les Palestiniens, envahissant leurs maisons et les enlevant.
Ce qui est le plus effrayant, câest que âFaudaâ semble reflĂ©ter la rĂ©alitĂ© sur le terrain. Il a Ă©tĂ© rapportĂ© que Raz a servi dans lâunitĂ© Duvdevan, une force de commando dâĂ©lite connue pour se faire passer pour des Arabes. Zonder a passĂ© des annĂ©es en tant que journaliste dâinvestigation couvrant le Mossad et le Shin Bet, le service de sĂ©curitĂ© interne dâIsraĂ«l.
« Bien sĂ»r, le monde que nous dĂ©crivons est totalement rĂ©aliste, mĂȘme si les personnages sont issus de notre imagination », a dĂ©clarĂ© Zonder.
«Fauda» a également été remarqué pour avoir donné un visage humain aux Arabes vivant en Judée Samarie, y compris aux terroristes. Zonder était une grande partie de ce geste audacieux.
«Je me suis senti â comment dire?» Zonder a demandĂ© Ă sa femme en hĂ©breu de traduire une phrase. «Je ne sais pas exactement comment dire cela en anglais. Les membres du Hamas nâexistaient pas en tant que vĂ©ritables ĂȘtres humains [pour certains IsraĂ©liens] et je voulais quâils aient une femme et des enfants quâils adoraient et quâils ne pourraient pas [visiter et voir]. Câest un motif [pour leur comportement] que vous pouvez comprendre.
âCâĂ©tait une sorte de rĂ©volution. Il nây avait pas de tels personnages Ă la tĂ©lĂ©vision avant.
Pour les humaniser, Zonder a dĂ©clarĂ©: «CâĂ©tait mon intention. »
«Les crĂ©ateurs mâont tous accompagné», a-t-il dĂ©clarĂ©. « Nous avons tous ressenti cela. »
à son avis, le spectacle a une autre caractéristique distinctive.
« Il nây a pas de hĂ©ros dans le sens dâun bon ou dâun mĂ©chant », a dĂ©clarĂ© Zonder. «La vie est plus compliquĂ©e. Il y a un protagoniste et un antagoniste â Doron est le protagoniste et Abu Ahmad (Hisham Suleiman) est lâantagoniste.
«Ce nâest pas que Doron soit bon et Abou Ahmad, mauvais. ⊠En tant quâIsraĂ©lien, il Ă©tait important de montrer que les membres de lâaile militaire du Hamas avaient leurs familles et leurs motivations. Ils ne sont pas [totalement] mauvais. Câest la base de lâADN de la premiĂšre saison de âFauda.â  »
Le spectacle a Ă©tĂ© louĂ© pour cette perspective et Ă©galement pour son intrigue saisissante. LâĂ©crivain palestinien Yasmeen Serhan a Ă©crit dans The Atlantic en juin que malgrĂ© ses rĂ©ticences Ă regarder une Ă©mission sur le conflit dâun point de vue israĂ©lien, il sâagit dâune «tĂ©lĂ© Ă la consommation excessive».
«Fauda» a été un succÚs surprise en Israël et, par la suite, dans une grande partie du reste du monde.
«Les colons ont adorĂ©. MĂȘme le Hamas », a dĂ©clarĂ© Zonder. «Leur porte-parole a dĂ©clarĂ© en ligne que« les sionistes ne pourraient pas nous tuer sur le terrain, alors ils nous tuent Ă la tĂ©lĂ©vision ». Ensuite, ils mettent un lien vers le premier Ă©pisode sur leur site Web. »
En mars, le mouvement Boycott, DĂ©sinvestissement et Sanctions contre IsraĂ«l a insistĂ© pour que Netflix abandonne la sĂ©rie, affirmant quâelle « promeut et lĂ©gitimise les crimes de guerre commis par les escadrons de la mort ». Un partisan israĂ©lien sâarrĂȘte sur les tactiques utilisĂ©es par lâarmĂ©e israĂ©lienne.
Avant «Fauda», Zonder a Ă©crit le documentaire dramatique primĂ© «Sabena Hijacking: My Version» sur le dĂ©tournement en 1997 dâun vol de Sabena Airlines et le sauvetage de ses passagers. CâĂ©tait lâentrĂ©e dâIsraĂ«l dans la course au film Ă©tranger des Oscars 2015.
Entre les cours, il Ă©crit un autre docudrama sur lâopĂ©ration Wrath of God du Mossad, qui consiste Ă tenter de tuer les terroristes responsables du massacre des Jeux olympiques de Munich (ce film a Ă©tĂ© reprĂ©sentĂ© Ă lâĂ©cran dans le film «Munich» de Steven Spielberg).
Zonder est arrivĂ© Ă Rutgers Ă peu prĂšs au mĂȘme moment oĂč le gouvernement fĂ©dĂ©ral a rouvert son procĂšs, accusant lâĂ©cole de ne pas rĂ©agir Ă la discrimination visant les Ă©tudiants juifs . Un procĂšs intentĂ© par lâorganisation sioniste amĂ©ricaine affirme que les organisateurs dâun Ă©vĂ©nement pro-palestinien ont distinguĂ© des Ă©tudiants juifs en leur faisant payer lâadmission pour lâĂ©vĂ©nement gratuit.
Si les manifestants du BDS devaient se prĂ©senter quand il parlera Ă Rutgers, Zonder dĂ©clara quâil ne discuterait pas avec eux.
«Je dois vous dire que je ne suis pas vraiment un hĂ©ros, mais jâaimerais bien les rencontrer», a-t-il dĂ©clarĂ©. «Je suis prĂȘt Ă entendre ce quâils ont Ă dire au cas oĂč ils seraient prĂȘts Ă Ă©couter. Sinon pas.
Par Curt Schleier sur le site anglais JTA
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